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La Guinguette Pirate  (Paris)  19 mars 2004

Avant même l’arrivée de la première partie on sait déjà qu’on est mieux sur la Guinguette que devant sa télé, la succession des titres de Fugazi diffusés dans les enceintes de l’esquif du XIIIe empêche de s’ennuyer et c’est donc sur un fade-out de Ex-Spectator que Goom entre sur scène.

Pour situer les choses, le quatuor sont des Superheroes qui s’énerveraient et servent un électro-clash qui fonctionne parfois mais n’apporte pas grand chose, en gros guitares sur synthétiseurs et on crie pas mal, le genre de groupe qu’on ne croise presque plus ces temps-ci. Question de mode ? Le sentiment d’anachronisme domine et on est plus remué par le retour des Fugazi.

Avec 90 Day Men on sent rapidement qu’on est face à la musique du 21e siècle, une musique qui se cherche et qu’on n’imaginait pas tout à fait, sans époque et à l’écart des modes, qui s’appuie sur des références musicales diverses pour mieux s’en affranchir et offrir une musique totalement inédite et clairement hypnotique avec une classe à laquelle on ne peut être insensible.

La littérature évoque à leur sujet Bowie période berlinoise, c’est plutôt bien vu même si cela ne retranscrit en rien leur musique, comme cela pourrait il être possible d’ailleurs : en caricaturant on y trouve un fond bien digéré d’indie-rock/post-rock/free-jazz/prog-rock sur des nappes de piano qui rappellent un peu un Black Heart Procession en moins lourd mais surtout Berg Sans Nipple (on ne s’étonnera peu de croiser Lori Sean Berg ce soir là), lui aussi inclassable et touche à tout, en moins répétitif et plus "pop".

Sur scène la formation dégage un charisme certain : Robert à la basse, fait penser à un Arthur Lee encore vert, à la fois sage et passionné, possédant une voix totalement stupéfiante, androgyne et aux envolée imprévisibles et habitées. Brian cultive lui un retrait tout aussi intriguant de tête brûlée de l’indie rock à la Enon chantant par contraste de manière monocorde et effacée totalement accaparé par sa guitare. Cayce assure la section rythmique avec sa batterie et sa moustache de bucheron et Andy, à la pose edgy et sans complexe, ne quitte pas les doigts des touches de son piano qu’il parcourt avec exhubérance et sans affect parfois en poussant son chant de crooner décadent. On est donc bien loin de cette pose de guitaristes élevés au rock fm et au gibolin, de la simplicité et de la classe made in chicago.

Un vieux refrain des blasés de musique indé revenus de tout consiste à affirmer péremptoirement que plus rien de nouveau n’arrive dans le "rock", au mieux on voit des groupes qui font se téléscoper des genres musicaux passés de mode, mais tout cela n’innove en rien et fonctionne en vase clos sans surprise. Ce refrain tient avant tout du reflexe de chroniqueur qui pousse à mettre des étiquettes et à trouver des filiations même si c’est souvent a posteriori et artificiellement qu’on raccorde une musique à un mouvement virtuel.

L’innovation musicale entendue chez 90 day men dépasse cela, la synthèse de genres empruntant au free jazz, comme au math rock ne s’est pas faite par confrontation directe mais en repartant de la base et en réétablissant des fondamentaux, d’où une complémentarité des intruments dans des constructions psychédéliques et épiques sans jamais céder à la tentation du mur du son du post rock épique.

Cette création est rendue clairement possible par une maîtrise complètement aboutie et sans complexe de leurs instruments pour les amener où ils veulent et pas uniquement là où on les attend. Pas une musique expérimentale qui se regarde et s’étonne elle même des accidents qu’elle produit, mais la sérénité qu’apporte la lisibilité de ce qu’ils font et des portes qui s’ouvrent pour conduire leurs morceaux quelque part, c’est à dire ailleurs.

Ce qu’il en resort ne ressemble au final intimement à aucun titre de notre discothèque mais on est en même temps face à une musique qu’on s’en très proche d’une certaine idée de la musique qu’on attend : une musique qui tire vers le haut, sans vulgarité, à la fois intuitive et intelligente, radicale mais sans caricature, entêtante et habitée, qui n’essaie pas de vous séduire par des "trucs" mais dont la sincérité et l’ambition écrase toute la modestie apparente du groupe

. A la fois répétitive et toujours en progression, les mélodies de guitare, de basse et de piano s’épousent et se relancent avec justesse, on regrettera juste la balance qui a laissé la voix de Brian un peu sur le carreau, et un titre un tout petit peu trop allongé par contraste avec le reste du répertoire toujours en mouvement, virevoltant et refusant toutes les ficelles mêmes les plus acceptables (les syncopes du math rock détournées, les constrastes brutaux du post-rock contournés, etc…).

Ainsi on ne nous fait pas le coup des virtuoses qui se lancent dans un solo pendant que le groupe sert de faire valoir, la musique progresse de tous les côtés avec cette impression de construction qui transporte et sidère parallèllement à ce sentiment de liberté qui amène un air neuf et vitalisant.

C’est une expérience rare que de rencontrer un groupe qui ose cultiver une individualité aussi convaincante et inédite, la révélation de l’année pour l’instant et on sent qu’ils en ont encore sous la pédale pour encore évoluer et sonner un peu moins prog-rock parfois.

On espère que le groupe, à l’issue du break qu’ils compte prendre après cette tournée, trouvera les ressources pour continuer sur cette voie qu’il trace en éclaireur solitaire... on en attend vraiment beaucoup.

 

 

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L'interview de 90 Day Men (19 mars 2004)


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