Une pseudo-star de la culture rock underground anime la nuit une émission de radio.
Tatiana, ukrainienne – cela a, semble-t-il, une importance pour l’auteur – une de ses fans lui écrit pour lui signifier sa béate admiration. Il lui fixe rendez-vous et ils enchainent sur une certaine forme de liaison. Elle tombe enceinte, se fait avorter, et quelques années plus tard lui réclame 100 euros, la différence entre le prix de l’intervention et le remboursement de la sécu. C’est au moment de cette demande d’argent que le récit commence.
Par flashbacks, associations d’idées et de situations, l’auteur nous transplante de pays en villes, de rencontres en réflexions fumeuses, de lieux-dits en lits. Auteur d’un Dictionnaire du Rock, Michka Assayas possède certainement une grande culture musicale, dont malheureusement il ne nous livre dans Solo qu’une infime partie, le plus souvent en mode anecdotes trash et détails soi-disant révélateurs.
Comme frappé d’inertie, Denis, personnage central, et unique personnage du roman, regarde le monde changer autour de lui, avec le sentiment que c’était peut-être mieux avant, et la grande lucidité que tout du moins c’était différent.
Dans un flou artistiquement étendu à tout le récit, sans repères chronologiques, il nous balade d’un sex-shop londonien à une soirée bcbg en grande banlieue, de l’URSS d’avant où les filles ne coûtaient que quelques roupies à la Russie de maintenant où lesdites filles coûtent une mallette de dollars, des événements de 68 à Tchernobyl.
Tout s’entremêle dans ce long soliloque d’un homme vieillissant, marié et père, qui vit pourtant sa vie en "solo", revendiquant une pseudo-liberté, tentative de refus des responsabilités.
Seul devant son micro imaginant la multitude qui n’écoute que sa voix dans la nuit, seul dans le bus dont il imagine l’explosion apocalyptique, seul dans les souvenirs sadomasochistes de sa liaison avec Tatiana, Denis, nombril du roman, n’en finit pas de radoter sur ce monde qui a tant changé sans qu’il s’en rende compte. Au sentiment de vide intellectuel, artistique ou tout simplement humain qu’il ressent, il oppose une vie parallèle, libérée des contraintes quotidiennes, uniquement faite de voix, essentiellement la sienne, parfois celle de Tatiana.
Solo est un roman désespérant de vacuité, une errance dans l’espace et le temps, où l’on y apprend enfin que le sexe n’est pas l’amour, que le mensonge est préférable à l’effroyable vérité, que le confort du divan du psychanalyste est proportionnel à la durée et au prix de la séance. La question de savoir si Denis paiera les 100 euros, demeure finalement le seul fil rouge dans cet assortiment baroque de lieux communs sur le conflit générationnel, la consommation à tout va et le culte du "tout, tout de suite, maintenant". |