Retour thématique
sur l'événement de ce début d'année
2004, à savoir la venue, dans un Olympia archi-complet depuis
des lustres, du pape de la pop music, compositeur de génie,
mythique bassiste des Beach Boys, auteur
de Pet Sounds en 1966, le cultissime
et toujours - pour combien de temps encore ? - bien vivant parmi
nous, ladies & gentlemen ... Brian Wilson
!
Le spectacle.
En toute objectivité : merveilleux, absolument rien à
redire, même les quelques titres récents, à
peine à la hauteur des illustres classiques, n'apporteront
que peu d'ombre au tableau.
Ponctualité inhabituelle, ambiance feu de bois sur la plage,
tous les musiciens se regroupent sur un coin de scène autour
du patriarche. Et d'enchaîner les classiques : "Surfer
Girl", "In My Room",
"Please Let Me Wonder" ...
Les harmonies vocales sont à tomber par terre, le public
ne pipe pas mot, l'instant tient du religieux ...
Deuxième partie du premier set, chacun rejoint son instrument,
Brian Wilson se retrouvant au centre derrière un clavier,
pour poursuivre le florilège du répertoire des garçons
de la plage ("Sloop John B",
"God Only Knows", "Dance,
Dance, Dance", "California
Girls" ... le genre de babioles balancées au
hasard) avant un final un poil en dessous.
Le show s'achève au bout de soixante minutes pour une demi-heure
de relâche, histoire de faire monter la pression.
Quand le groupe revient, c'est pour dévoiler Smile,
ce projet complètement fou devant faire suite à Pet
Sounds, abandonné puis disséminé en
partie dans la foulée. Et de reconnaître, perdues ça
et là, des pépites comme "Heroes
And Villains", "Surf's Up"
avant une époustouflante version de "Good
Vibrations" en guise d'apothéose finale.
Plus de 35 ans après sa sortie programmée, Smile
demeure toujours aussi novateur, les trouvailles sont à ramasser
à la pelle, jamais le concept de pop music n'a semble-t-il
trouvé meilleure illustration que durant ces quarante-cinq
minutes ...
22h, fin de l'interminable présentation à l'américaine
des dix-huit musiciens, le légendaire bassiste des Beach
Boys refait son apparition sous un tonnerre d'applaudissements pour
délivrer cinq titres période surf, comme autant de
classiques de la musique populaire américaine : "I
Get Around", "Help Me Rhonda",
"Barbara Ann", "Surfin
USA" et "Fun Fun Fun".
La salle est debout, les musiciens jettent leurs dernières
forces dans la bataille, l'instant restera inoubliable ...
Quelques instants plus tard, Brian Wilson revient pour délivrer
au piano un "Love And Mercy"
dédié aux victimes des attentats de Madrid.
Brian Wilson.
Brian Wilson a 61 ans, plutôt jeune pour un homme de nos jours.
Cependant, comme beaucoup de musiciens doués de sa génération,
Brian Wilson n'a pas fait semblant, s'est brûlé les
ailes, flirtant avec les drogues dures, la folie, pour miraculeusement
refaire surface en 2000 avec cette ré-interprétation
de Pet Sounds.
Alors oui bien-sûr, inutile de tourner autour du pot, Brian
Wilson est désormais vieux, marche avec peine dans son survêtement
et sa large chemise masquant un léger embonpoint. Musicalement,
il fait également son âge : sa voix manque de puissance,
flirte avec le faux ("Love And Mercy"),
son jeu au piano est quasi-inexistant, quelques intros par-ci, quelques
accords par-là, il perd le rythme en battant la mesure avec
ses mains, toussote sur "God Only Knows",
lit les paroles sur un prompteur ... mais qu'importe : il est présent
sur le devant de la scène. Pas pour interpréter son
oeuvre, d'autres beaucoup plus à même que lui s'en
chargent dans son dos, mais en qualité de chef d'orchestre,
comme pour veiller au bon déroulement des opérations.
La morale de l'histoire.
Au final, malgré l'impression d'avoir assisté à
la prestation d'un excellent tribute band des Beach Boys ou d'une
formidable mise en scène de la comédie musicale "Smile"
starring Brian Wilson dans sa papamobile, on ne peut que rester
coi (et respectueux) devant le show, l'homme et avant tout l'oeuvre
indémodable de ce groupe de faux surfeurs californiens.
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