Après un hiver silencieux et sournois, nous sommes heureux de retrouver un printemps hurlant et généreux. Quatrième édition du festival et Les printemps hurlants continuent de réveiller la ville de sa froide hibernation à coup de son électro, reggae, rock, punk et pas que… Cette année, le festival grossit, se diversifie et investit le centre ville de Saint-Étienne avec chapiteau et village associatif. Quelques noms s’affichent, comme pour montrer aux passants que le rendez-vous du 21 mars sera, cette année, accompagné d’encore plus de cris : Nosfell, Alboroie, Da Silva, Gérard Baste de Svinkels, Danakil, Didier Super…
Les grenouilles stéphanoises ne pouvaient pas louper ça et se sont invités pour picorer quelques morceaux choisis, dont nous vous offrons un aperçu :
17 mars : Nosfell
C'est avec la plus grande impatiente que j'attendais la venue de Nosfell dans notre bonne ville de Saint-Étienne. Les anges ont exaucé ma demande pour cette édition 2010 des printemps hurlants.
Dès les premières notes, un constat s'impose : c'est puissant, très rock même, à l'image de son nouvelle album éponyme. Entouré des ses compères Pierre le bourgeois à la basse ou au violoncelle et d'Horkhan Murat à la batterie, Labyala Nosfell nous assène tout son univers musical, toute sa folie créatrice.
Cet homme est un véritable ovni sur scène, arrêtant son set pour nous conter l'histoire de Klokochazia sortie tout droit de son imagination débordante, n'hésitant pas à exécuter quelques pas de danses/gestuelles totalement synchronisées à l'ambiance féerique omniprésente, confortée par les nappes de violoncelle.
Le concert offre une bonne part des titres de son nouvel opus, sans oublier les titres phares de ses premiers albums – très attendus des fans de la première heure à en écouter les cris du public aux premières notes de guitare. Le public, en grande partie venu écouter Siméo en début de soirée, est partagé entre une incompréhension visuelle ou auditive et une fascination pour ce son alambiqué, torturé même.
Et oui, c'est comme ça ! Nosfell, c'est avant tout un spectacle, un univers, pas seulement un simple concert ou l'artiste enchaîne ses titres.
En début de soirée, j'étais rentré dans le chapiteau stressé de ma journée de travail, j'en suis ressorti rêveur ! Merci Monsieur !
19 mars : Didier Super
Didier Super est-il complètement con ? Pas sûr… Est-il vraiment mauvais musicien, chanteur et parolier ? Pas si sûr non plus… Pourtant, on le comprend assez vite dès les premières notes, son show est à la limite de l’inaudible, toute notion d’esthétique étant méticuleusement gommée. Mais le public est là et une bonne partie reprend les couplets – parmi les plus débiles jamais écrits – par cœur et à tue tête. Alors… ?
Alors je pense qu’il ne faut pas chercher à expliquer le show provocant de Didier Super. Il pourrait être le fils chanteur spirituel du Professeur Choron, un adepte de la pédagogie "bête et méchante"… Ses amis sont Les Suprêmes Dindes, Les Fatals Picards, Karlit et Kabok, rien que des poètes de la première heure ! Ne soyons donc pas étonné que ses concerts penchent dans la douceur romantique la plus printanière, à coup de curés pédophiles, de "A bas les gens qui bossent", de barbus extrémistes, de pauvres trop cons pour être riches…
Tout le monde en prend pour son grade, le public en premier lieu. Roi de la réparti, Didier enchaîne les provocations, répondant aux perches tendus par un public qui ne sort jamais vainqueur de ces joutes verbales, mais qui est ravi d’avoir donné l’occasion à Super de placer une bonne grosse saloperie. Même les organisateurs trinquent au passage lorsqu’à plusieurs reprises Didier Super insiste sur le prix excessif des places, précisant que "grâce à cette politique tarifaire qui fait que la salle est à moitié vide, on peut en profiter pour s’asseoir par terre bien à notre aise"… Tout le monde s’assoit sur le parquet que rayent quelques dents, pour un petit set acoustique tout aussi barré mais plus proche du quotidien de l’artiste.
Pour sa première date à Saint-Étienne, Didier est venu accompagné de 3 musiciens basse-batterie-guitare au look punk-rock-skined, mais régulièrement il calme le jeu avec des morceaux en solo.
Peut-être pour privilégier l’écoute et la découverte des textes ? Non je déconne ! c’est pour rire… Mais sûrement en tout pour gérer au mieux l’ambiance de la salle et ne pas perdre le public en route, car Super reste un homme de scène aguerri, un show man décalé mais authentique, là-dessus on peut tous être d’accord.
Allez pour conclure, si vous y êtes préparé et que vous êtes en condition, allez voir Didier Super, car au final et contre toute attente on se rend compte qu’on a passé un bon moment, ce qui confirme que quand tout le monde est prêt à rire, on peut vraiment rire de tout !
21 mars : Les Touffes Kretiennes
Après un long changement de plateau, c’est avec beaucoup d’impatience que nous attendions Les Touffes Krétiennes. Fanfare composée de huit ou neuf cuivres, une guitare et batterie, le groupe a de quoi attiré l’attention. Des musiciens parmi Les Hurlements d’Léo, Les Fils de Teuphu, Les Chevals, Raoul Petite, Babylon Circus, Mabreuch, ou encore Les Têtes Raides, réunis pour le plaisir de jouer, ça fait du monde et du beau monde !
Campé dans un univers Groovy, changeant, aux multiples facettes, la fanfare a déjà multiplié depuis plusieurs années les dates partout en Europe. Le show est bien rodé. Les cuivres tempêtent, les corps se remuent. La plupart des musiciens deviennent chanteur le temps d’un ou deux morceaux. Ça bouge, ça saute.
Le set est très plaisant, très coloré. Le plaisir des membres à se retrouver est palpable et se communique.
Mais très vite, à mon grand regret, le tout semble manquer de fil conducteur. Comme affranchi de leur chanteur respectif, les musiciens de l’ombre se retrouvent en lumière et s’amusent. Mais le sens s’étiole…
Tout est très carré, très propre, mais il manque le petit quelque chose qui fait qu’on sort de la mise en commun des talents pour en faire un concept artistique original.
C’est toute la différence entre l’artisan et l’artiste qui sublime sa propre technique pour créer… Mais ne soyons pas trop sévère, les Touffes Krétiennes n’ont jamais revendiqué autre chose. Ils font de la musique en partageant, offre le résultat au public, et propose de passer un bon moment.
En soi, l’objectif est atteint le public semble apprécier l’enthousiasme et le dynamisme du groupe, avec ses hauts et ses bas. L’ambiance est là, pour le reste attendons de les retrouver chacun dans leur formation respective, et profitons de la récréation, parfois c’est bon aussi !
21 mars : Danakil
Voici le groupe attendu. 10 ans d’existence, 2 albums, 1 live au Cabaret sauvage sorti il y a moins d’un an, Danakil a le vent en poupe.
Une longue introduction attire les derniers badauds et place tout le monde dans un univers cotonneux. Le son est très travaillé, il s’y croise des sonorités très modernes et les bases d’un reggae roots de bonne facture. Le chant arrive clair et précis. Le tout est cohérent et porte les messages du groupe bien au-delà du chapiteau. Danakil nous amène là "le destin nous dépose". Le groupe avance calmement. Les retours ne marchent pas sur scène… qu’à cela ne tienne, "le son est bon en salle ?", alors c’est l’essentiel et ça continue ! …et le groupe de dérouler sereinement son set.
A la fois l’univers musical prête à se poser, à flâner avec plaisir et à la fois les paroles nous ramènent à une critique parfois sévère du monde qui nous entoure. La tendresse de forme n’a d’égale que la dureté de fond. Cette dualité surprenante confère à cette performance une réussite à noter.
21 mars : dernier jour des Printemps Hurlants, Danakil vient refermer cette édition. Mais premier jour de printemps, le reggae bourgeonne tandis que Danakil trace sa route.
Gardons un œil sur eux car avec les beaux jours les petites pousses deviennent parfois des baobabs indéracinables.
La quatrième édition des Printemps Hurlants s’achève. Un virage est pris. Souhaitons aux organisateurs de bien profiter de l’été-automne-hiver pour nous préparer une cinquième édition encore plus hurlante et asseoir le festival dans la ville. Il est heureux de voir fleurir toutes une diversité de festivals à Saint-Étienne, quelle que soit la saison.
Et pour les grenouilles stéphanoises, prochain festival dans la ville aux beaux jours, avec le festival Paroles et Musique du 12 au 16 mai, d’ici là restez couvert, en avril ne te découvre qu’au Fil… |