Réalisé par Joào Pedro Rodrigues. France/Portugal. 2010. Comédie dramatique. Avec Fernando Santos, Alexander David, Gonçalo Ferreira de Almeida, Fernando Gomez, Jenny Larrue, André Murraças et Chantal Malatitch. Joào Pedro Rodrigues n’est
pas un cinéaste inconnu. Cet homme qui commença,
bien avant de toucher une caméra, à apprendre
la sagesse d’observer de par ses études, elles
auraient dû le mener à l’ornithologie, il
préféra mettre son clignotant pour le 7ème
Art. Dommage pour le petit monde scientifique tant mieux pour
le cinoche.
"Mourir comme un homme", sélection officielle
"Un certain regard" au dernier festival de Cannes
sort en salle le 28 avril. Film d’honneur d’un auteur
qui croit fortement que raconter une histoire c'est oser. Oser
demander au spectateur d’ouvrir leur regard sur autre
chose que l’écran blanc aseptisé.
"Mourir comme un homme" est un titre métaphore.
Celui de la transformation, de la réalité de soi,
de quitter le personnage pour être enfin ce que l’on
redoutait être, caché par son rôle théâtral.
Tonia, une transsexuelle, est une star de spectacles de travestis
à Lisbonne. L’arrivée de jeunes artistes
menacent le statut de la vedette. Une identité entre
deux eaux, faut-il que Tonia traverse le miroir comme lui suggère
son jeune compagnon pour assumer enfin son identité désirée,
de femme ? Une renaissance qui se joue comme une tragédie.
Entre ressemblance et réalité, Tonia choisit la
complexité du double, refusant, de par ses convictions
religieuses d’oser parachever sa transformation.
La magie n’est jamais loin dans le film de Rodrigues
avec cette forêt enchantée ou Tonia se réfugie
un temps et y rencontre l’étrange Marie Bakker
et sa copine Paula. Un clin d’œil on peut l’imaginer
à Lewis Carroll, naturellement… Mais aussi puisant
dans les codes "magiques" de la comédie musicale
( à noter les chansons a capella).
Un sujet fort nourri de témoignages de travestis et
de transsexuels, un film romanesque et sensible à la
recherche du Moi profond sans pour autant se prendre la tête,
sans fausse nuance, la complexité de l’être
qui doute de son identité est ici, en total harmonie,
conjuguant au même temps les frayeurs, les doutes devant
l’hypothèse de l’ultime rupture des conventions
socialement admissibles.
La dramaturgie, comme on peut le penser est en suspension.
A fleur de peau, c’est tout le talent de Joàa Pedro
Rodrigues.
Lorsque l’on sait que "Mourir comme un homme"
est soutenu à la fois par le Groupement national des
cinémas de recherche et de l’autre par les cinéastes
de l’Association du Cinéma Indépendant pour
sa Diffusion, on se dit qu’il est bon d’avoir ainsi
des béquilles pour qu’un cinéma de qualité
ne passe pas inaperçu. Et plaisant au regard, nous racontant
parfois ce que l’on ne veut pas voir, entendre mais qui
nous ouvre les yeux, offrant une perspective nouvelle à
notre Ego.
Le film de Joào Pedro Rodrigues a valeur d’exemple
citoyen. |