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Interview  (Bourges)  16 avril 2010

A l'occasion du printemps de Bourges, nous avons rencontré The Fitzcarraldo Sessions qui ont répondu à nos questions entre balance et concert alors qu'ils venaient d'apprendre que Craig Walker ne pourrait être des leurs,à cause d'un certain volcan Islandais.

Le 3 juillet, les Fitzcarraldo et de nombreux invités comme Phoebe Killdeer ou Dominique A seront en concert exceptionnel à la Salle Pleyel à Paris ... A ne rater sous aucun prétexte

On se demande toujours en voyant ce que vous avez fait, comment peut naître un projet d'une telle envergure, avec autant de personnes talentueuses à vos cotés. Est-ce que cela a été un travail de longue haleine ?

Cela n’a pas été un plan prémédité complètement à l’avance. On avait vraiment envie, après la fin de Jack The Ripper qui nous a quand même beaucoup marqués, de ne pas rester dans cette ambiance confinée, un peu triste. On a eu envie d’ouvrir l’horizon, d’aller au contact de musiciens qu’on aimait bien, de chanteurs que l’on connaissait… On a commencé à mettre tout cela en chemin avec l’idée qu'éventuellement, que peut-être, un jour, un album finira par jaillir de tout ça. Et puis petit à petit, cela s’est tissé tout seul. Du coup, il y a un effet d’entrainement,  cela a fait "boule de neige" : un tel dit oui puis un autre, puis finalement là d’un coup, voilà Dominique A, Stuart Staples, Joey Burns… Tout grandit, mais sans qu’au départ on puisse l’imaginer. On s’est même un peu étonné nous-mêmes sur cette affaire.

Le choix des artistes s'est fait un peu par connaissance, par affinités. Cela a été un peu plus dur quand il s'agissait d'artistes qui ne vous connaissaient pas forcément ?

Oui, il faut faire preuve de patience pour certains. D’une part parce que j’imagine que le processus de décision n’est pas facile à prendre. Par exemple, Stuart Staples et Joey Burns ont des projets en cours, ils avaient des enregistrements, ils étaient en tournée, donc je pense que ce sont des choses qui peuvent "dans l’absolu" les intéresser, mais il y a bien un moment où il faut prendre une décision. C’est du travail de longue haleine de les relancer, de savoir à quel moment on peut les relancer, par quel biais… sans les déranger, etc. En même temps en règle générale, il faut y aller aussi de manière assez ferme pour donner une crédibilité au projet.

Mais c’est vrai que l’on a été assez chanceux dans l’ensemble. On a eu très peu de refus ou quand il y a eu des impossibilités, c’était dû à des contradictions d’emploi du temps. Cela ne veut pas dire que l’on n'a pas eu de "non", des "désolés" ou des personnes qui ne nous ont pas répondu mais dans l’ensemble, on a eu ces invités là qui nous ont répondu au bout d’un certain temps. Par exemple, cela s’est fait assez tardivement pour Joey Burns, même une fois impliqué dans le projet, on a reçu son chant, son enregistrement final – car cela s’est fait à distance – deux jours avant que l’on mixe, deux jours avant la fin. On pensait orienter ce morceau vers un instrumental et puis, inch'Allah, la voix est arrivée ! Il y a eu beaucoup de moments comme cela d’incertitude, de logistique, on a pas mal œuvré.

Et pour les concerts, c’est le même principe ?

A chaque fois, c’est comme si nous prenions les rames et que le bateau était toujours plus lourd. Mais c’est un immense plaisir en même temps. Avec des gens comme Phoebe Killdeer, Dominique A, Syd Matters, etc., il y a eu les rencontres en enregistrement, des répétitions, de très bons moments. C’est vrai que l’on arrive plus en terres inconnues, cela peut faciliter les choses et puis humainement, à chaque fois, cela c’est vraiment très bien passé. Que ce soit au Bataclan, en sessions d’enregistrement… Donc il y a quelque chose qui est en train de se créer même si on sait que l’on n’est pas non plus une grande famille, on ne part pas en vacances ensemble (rires). On prend grand plaisir à se retrouver et à faire de la musique et à jouer !

Ce soir, qui sera là ?

Alors il y a Syd Matters, Phoebe Killdeer, Rosemary Moriarty qui est sur les deux projets de la soirée (ndlr : spectacle "Les Françoises"), Marc Huygens de Venus qui n’est pas sur le disque mais qui était venu au Bataclan, il y a Stuart Staples, Dominique Sonic  qui vient nous faire une petite visite ! (ndlr : au même instant, il rentre dans la loge) et puis  Kropol (Pierre Gauthé), tromboniste des Têtes Raides… Et ce soir exceptionnellement, Adrien notre violoniste attitré qui ne pouvait pas être là ce soir est remplacé par Carla Pallone, la violoniste de Mansfield Tya.

Ce soir, c’est un peu une soirée spéciale au Printemps de Bourges puisque ce sont deux concerts assez atypiques qui se jouent  (Fitzcarraldo Sessions & Les Françoises). Que pensez-vous du projet des Françoises ? Etes-vous contents d’être programmés sur la même soirée ?

Très, puisque les deux projets ont quelque chose de commun, d’invitation sur des chanteurs tournants. Je suppose que c’était une bonne idée de les associer. Moi je suis assez épaté par leurs choix, c'est-à-dire de ne surtout pas prendre un groupe derrière qui aurait assuré le backing band et elles se seraient succédé, etc. Là, elles prennent tous les risques car elles se mettent derrière les instruments, qu’elles soient plus ou moins à l’aise. Rosemary va se mettre derrière la batterie, elle a dû jouer 15 heures dans sa vie, quelque chose comme ça. Face à  2500 personnes, je trouve que c’est vraiment très courageux et cela a l’air de très bien se passer. Apparemment, ce qu’elles pouvaient craindre, c’était une guerre des égos et ce n’est pas le cas, les répétitions ont l’air de se passer avec beaucoup de facilité, c’est un spectacle très drôle.

Le public qui vient pour les Françoises est peut-être différent du vôtre. Comment appréhendez-vous cela ?

Oui, je pense que le public est différent. On va revenir à nos premières amours du Printemps de Bourges, c'est-à-dire qu’on se considérera comme un groupe "découverte". Voilà… presque dix ans après… (Rires). C’est difficile de savoir quelle partie du public peut venir pour nous, on n’a pas de statistiques. Mais il y a sûrement des personnes qui viennent pour voir également par exemple Syd Matters, Stuart Staples ou Rosemary qui peuvent être les artistes les plus connus de l’affiche. Peut-être un petit peu aussi des ex-fans de Jack The Ripper. Mais c’est sûr que le public de ce soir ne vient pas pour cet album là, mais c’est toujours un défi ! Je n’aime pas trop ce terme, mais c’est marrant de jouer devant un public qui ne vous connait pas forcément et de voir comment ils vont réagir.

Vous aimeriez collaborer avec Yann Tiersen et surtout Blonde Redhead. Est-ce que cela a avancé ?

Yann Tiersen était prévu sur le disque normalement. Il a accepté, il aime bien le projet, et puis finalement il est tellement occupé qu’on n’a pas réussi à concrétiser mais avec lui, c’est prévu. On n’a jamais dépassé le stade du management avec Blonde Redhead.

On s’est aperçu que c’est un des noms évoqués mais malheureusement on n’a reçu aucune piste pour rentrer, ne serait-ce qu’un e-mail personnel ou quelque chose comme cela. On s’est donc bloqué à une "barrière officielle" du management : est-ce que l’information est réellement passée? On n’en sait rien. Il faut avoir l’opportunité de passer par des circuits un petit peu parallèles, pour ne traiter vraiment que de la musique dans un premier temps. Après le reste, par exemple les questions d’argent, ce ne sont pas nos affaires.

Maintenant il n’y a pas qu’eux évidemment, il y a plein de gens. Cela va de Beirut à Ziveli Orkestar et Suzana Djordjevic, une fanfare de musique de l’Europe de l’est avec une chanteuse serbe qui est absolument extraordinaire. Et même les cuivres également, les cuivres basses en nappes pourraient très bien agrémenter des chansons des Fitzcarraldo à mon avis. Ce qui est intéressant avec ce projet, c’est que cela ouvre un champ des possibles qui est assez passionnant. Ce n’est pas uniquement vocal d’ailleurs, c’est instrumental, cela peut s’ouvrir à d’autres horizons. On pensait peut-être faire intervenir aussi Christine Ott aux ondes Martenot, qui est un instrument très rare. Elle a joué entre autre avec Tiersen, mais aussi Radiohead. Elle a envie de jouer sur ce projet, nous aussi ! Cela va devenir aussi musical, donc pourquoi ne pas laisser nos places à tel bassiste ou tel guitariste ?

C’est excitant de se dire que c’est quelque chose qui est toujours en mouvement ?

Il y avait quelque chose qui pouvait être un peu figé dans notre histoire, un peu sédentaire, un peu fermé. Et puis là tout d’un coup, tout est en mouvement, tout est fluide et plus flexible… Avant on travaillait à construire nos albums, un groupe a toujours besoin de marquer sa différence. Là, c’est un geste complètement différent, il faut essayer de construire des ponts, se dire par exemple qu’est-ce que j’ai en commun avec Craig Walker ou Phoebe, quel est l’espace commun ? Et à partir de quoi on ne construit plus des digues mais des ponts, on relie en quelque sorte, c’est plus agréable comme geste ! C’est un vrai travail d’architectes ça ! (rires)

Auriez-vous le désir de proposer vos nouvelles collaborations de façon plus rapide et éphémère à la façon des nombreuses sessions d’artistes que l’on trouve maintenant souvent sur le net ?

Oui c’est une de nos envies, parce que nous sentons que le format album est en train de devenir de plus en plus obsolète, c’est une forme un peu contraignante, lourde avec ses 12 morceaux, etc. Souvent on crée une chanson deux ans auparavant et cela sort à un moment où, en quelque sorte, on n’est plus en phase avec ces morceaux. Pouvoir sortir des morceaux plus rapidement, avoir d’avantage de spontanéité, casser les logiques "préparation d’album  pendant deux ans sans faire de concerts puis après la promo, les concerts puis après on disparait…" qui a un côté très énervant. Alors que de se dire que l’on peut s’installer dans un flot continu, personnellement je trouve cela super. On n’est pas tous d’accord dans le groupe, on en discute… Je pense qu’un projet comme cela facilite ce genre de choses.

 

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