Comédie de Serge Serout, mise en scène de Daniel Colas, avec Daniel Colas, Jacques Marcahnd, Patrick Raynal, Eliza Maillot, Yvan Varco, Sara Mortensen, Bernard Tixier, Virginie Ledieu et Pascal Vinet.
Avec la canicule arrive la programmation théâtrale estivale et le Théâtre des Mathurins met à son affiche de l'été 2010 une comédie de Serge Serout au titre explicite, "Une heure trois quarts avant les huissiers", qui lève le rideau sur les coulisses du théâtre, non pas celles de la scène ou des loges, mais celles plus "ésotériques" du bureau du directeur.
En l'espèce, celui du fringant directeur d'un théâtre privé à l'évocateur nom ronflant, "le Théâtre de la Trompette du Pavillon Royal" au bord du dépôt de bilan, qui tente désespérement de monter la prochaine production qui lui apportera l'argent frais destiné à désintéresser les huissiers qui sont à ses trousses. Et pour ce faire, il dispose, non pas de vingt quatre heures chrono, mais, comme l'indique le titre de la pièce, un peu moins de deux heures ce qui laisse augurer de l'urgence et de la frénésie de la situation.
Prototype même de la comédie boulevardière dans son jus est solidement lestée des codes du genre, cadence frénétique, portes qui claquent, dialogues à l'emporte-pièce qui ne font pas dans la dentelle de Calais, femmes légères et légèrement vêtues, cette comédie comporte néanmoins une édifiante et caustique satire sur les dilemmes et petits arrangements qui s'imposent au nom du pragmatisme financier.
Si le directeur de comédie se mouille dans des tractations pas très glorieuses qui l'amènent à sacrifier ses nobles ambitions sur l'art théâtral, à la mise en scène et au jeu dans le rôle principal, Daniel Colas, lui-même directeur de théâtre - ce qui n'est pas sans piquant - mouille sa chemise en tenant la scène non-stop avec un abattage époustouflant.
A ses côtés, la réplique est dispensée par une belle brochette de vieux briscards de la scène trouvant vite naturellement leur rythme de croisière dont, en premier lieu, son acolyte co-directeur des Mathurins, son acolyte co-directeur, Yvan Varco, impressionnant d'auto-dérision dans le rôle d'un danseur de claquettes à l'haleine fétide reconverti au théâtre.
A suivre, Patrick Raynal parfait en comptable souffre douleur-bouc émissaire, Jacques Marchand délicieux en auteur naphtaliné à particule, à rosette et à penchant pour la dive bouteille amené à revoir maintes fois sa copie, de la pièce historique à grand spectacle à la comédie musicale en passant par la tragédie antique et la comédie gay, et Eliza Maillot très à l'aise dans le rôle de la secrétaire-maîtresse crampon et dépressive
dôtée d'un mari
jaloux et violent (Pascal Vinet).
Du côté des prétendantes à la scène, Sara Mortensen la jolie actrice mannequin, sponsorisée par un ministre, qui confond théâtre et défilé de lingerie, et Virginie Ledieu irrésistible en clone blond de Mado dont le talent est d'être "la danseuse" du roi du poulet industriel reconverti en mécène incarné par Bernard Tixier.
Certes, la plus belle fille du monde ne peut donner que ce qu'elle a, mais en l'occurrence, il n'y a pas tromperie sur la marchandise. C'est du divertissement allègre et bon enfant qui a la fraîcheur de la première gorgée de bière en plein soleil qui ne décevra pas le spectateur qui joue le jeu. |