Grosse affiche pour ce dernier jour, qu'on attendait avec impatience. The Flaming Lips, The National présentant leur dernier album ou The Rapture, que demande le peuple du Fort ?
The Ganglians étaient prévus pour l’ouverture de ce troisième jour. Mais après une malheureuse blessure du guitariste, le groupe a dû annuler sa tournée européenne.
Remplaçant de dernière minute, Thus:Owls joue devant un public plus nombreux que la veille au même moment.
Grâce à la météo, sans doute, qui a décidé de se montrer clémente pour le final de l’édition 2010.
Majoritairement venus de Suède, les cinq musiciens proposent un set plutôt expérimental. Le piano semble souvent en désaccord avec le reste de la bande.
La belle voix de la chanteuse est utilisée comme un instrument ayant sa place à part entière dans les compositions musicales. Mais malgré l’air habité de cette dernière, on a du mal à accrocher.
Au tour d'Archie Bronson Outfit de monter sur scène. Les quatre musiciens apparaissent vêtus de boubous africains. Ce serait pour que les gens se concentrent sur leur musique et non pas sur leur apparence. Pas sûr que cela fonctionne… Le public est attentif aux lourds sons sales qui jurent avec l’apparence, justement, des quatre Anglais.
Le concert semble orchestré de main de maître par le chanteur Sam Windett. Alternance de morceaux rock garage ou aux accents électro, des rappels tribaux ou pop. Un mélange des genres dans lequel chacun des spectateurs présents peut trouver ce qui lui plaît, mais qui étonne. Les spots lumineux commencent déjà à s’agiter rapidement et il fait encore jour. On espère que ce sera moins insupportable que la veille.
Les Norvégiens de Serena Maneesh suivent, apportant avec eux une tempête de sons noisy. L’impression de brouillon donnée par le début du concert, entre les amplis qui tombent, les sons de guitare inaudibles, les problèmes de micro ou de bandeau dans les cheveux, laisse rapidement place au chaos total. Le chanteur complètement survolté s’excite sur sa guitare pendant que la bassiste répète inlassablement les mêmes pas, de la batterie au devant de la scène. Certains spectateurs délaissent la fosse pour aller boire une bière.
Effectivement, le spectacle n'est pas forcément beau à entendre, ni à voir d'ailleurs. Dansant comme un possédé, Emil fait tomber le micro et se débarrasse de sa veste dans laquelle son bras reste coincé. Se couvrant la tête d’un drapeau et d’une couverture, il continue d’occuper la scène pendant que ses collègues jouent un dernier morceau d'une dizaine de minutes. Il se retrouve finalement seul, grattant quelques notes sur sa guitare, couché par terre. Quittant enfin la scène, il laisse nombre de spectateurs dubitatifs.
Après ce cataclysme déroutant, je monte pour la conférence de presse de Wayne Coyne, leader de The Flaming Lips, en espérant qu’elle n’empiète pas trop sur le concert à venir : The National.
N’ayant pu assister à leurs shows l’année dernière à Paris ou à Montréal, où je résidais, il me tardait de les voir enfin en live. Visiblement je n’étais pas la seule à les attendre. Difficile de se frayer un chemin vers la scène. Je trouve une place perchée et affronte les vents bretons. Le groupe arrive, élégant, sous les applaudissements.
Dès le premier morceau, des problèmes techniques apparaissent. Le guitariste doit changer d'instrument au plein milieu de la chanson. Par la suite, des grésillements se font entendre quand Matt, le chanteur, crie dans le micro. Sur scène, le groupe est accompagné d’un trompettiste, d’un tromboniste et de Padma Newsome (avec qui il collabore régulièrement) au clavier. Alors que le concert avait commencé calmement, Matt se laisse rattraper par ses chansons, extraites de leurs divers albums, et les vit à fond. Sa voix grave, tantôt cassée, tantôt gueulante résonne dans le Fort. Un morceau est joué pour "tous les Français qui ont apprécié leur musique un peu avant tout le monde". Cette dédicace faite en français, ne pouvait pas faire plus plaisir à un public déjà conquis. Le titre "Mr. November" est, lui, dédicacé à leur ami Sébastien, au premier rang, qui portait un T-shirt des Mets en leur honneur.
Un chat, qui s’était frayé un passage dans la foule tenu en l’air en laisse, est monté sur scène, puis relancé dans le public à la fin d'un concert prenant. Pas de déception, The National est un grand groupe, qui annonce même les autres à suivre, The Flaming Lips et The Rapture : "It's gonna be awesome !".
Arrive enfin le tour de ceux que tout le monde présentait comme l'affiche du vingtième anniversaire. La préparation du plateau qui va accueillir The Flaming Lips est un spectacle à part entière, à en croire la foule qui s'amasse devant la scène. On s'extasie sur les ballons, on s'attarde sur les techniciens en combinaisons DDE : "Ça va être énorme, ils sont tous en orange, et les amplis aussi !", s'exclame un festivalier. Beaucoup sont déguisés, d'autres sont maquillés.
Toute cette agitation nuit à Josh T. Pearson. Le musicien Texan, qui avait accompagné Yann Tiersen vendredi soir, est perché sur la colline aux moutons. Eclairé par un spot, la guitare en bandoulière, il entame quelques morceaux vite perturbés par des cris d'acclamation. De l'autre côté du Fort, Wayne vient de faire son apparition sur scène. Josh tente vainement de reprendre son jeu, mais décidément The Flaming Lips sont plus forts ce soir. Même les quelques spectateurs amassés au pied de sa colline désertent.
L'arrivée du groupe sur scène reçoit de nombreux applaudissements. Une vidéo passe une image de femme. L'image se resserre au fur et à mesure sur son sexe, duquel sortent les musiciens. Wayne apparaît dans un énorme ballon qui se gonfle et se précipite dans le public. Après quelques roulades, il regagne son perchoir. Le spectacle a déjà commencé. Jet de confettis, nounours géant, lâché de ballons, bénévoles qui dansent vêtus en orange... The Flaming Lips offrent bien plus qu'un concert. Pour certains c'est un gâteau d'anniversaire, bien que ce soit là leur show habituel. Un telle mise en scène se marie parfaitement avec les morceaux complètement psychédélique qu'ils jouent. Si ce n'est pas du goût de tout le monde (certains dans la foule réclament de la vraie musique), personne ne peut rester indifférent à l'enthousiasme contagieux qui se dégage de la scène.
Après une telle joie visuelle, difficile à suivre pour The Rapture, qui ont l'honneur de clôturer la soirée. Visiblement ravis du spectacle auquel ils viennent d'assister, ils ont décidé de ne pas laisser leur public en reste. En conférence de presse, ils avaient annoncé qu'ils joueraient leurs hits et aucun morceau de leur futur album qui devrait sortir en début d'année prochaine. Ils souhaitent une symbiose avec les spectateurs et ils ne seront pas déçus. Ceux qui sont restés si tard le dimanche soir profitent à fond des rythmes dansants. Bras levés, jambes sautillantes, beaucoup se lâchent. Et certains lâchent... Alors que Luke, le chanteur, avait décidé de tâter la chaleur du public par un petit tour de slam, il n'est porté que par quatre ou cinq spectateurs avant de tomber tout aussi sec. Il parvient à remonter sur scène, tout content d'avoir retrouvé sa chaussure, qu'il avait perdue dans la chute. Loin d'être rancunier, il redescend dans la fosse à la fin du set pour aller serrer les mains des festivaliers. L'édition 2010 de la Route du Rock se termine sans un rappel, devant une assemblée frustrée que ce soit déjà fini.
Ce vingtième anniversaire aura été un bon cru, présentant des groupes à suivre, tel que The Hundred in the Hands, et des légendes comme Massive Attack. Un petit bémol sur les balances, qui ont parfois gâché le plaisir d'écouter. Et un petit mal à la tête et aux yeux à cause des stroboscopes qui ne s'arrêtaient plus le soir venu. Et c'est exténués que vos reporters ont repris le chemin de... leur chambre. Eh oui, qui eût cru que pour ce dernier jour nous nous fûmes accordé le luxe de prendre un hôtel. Et pourtant… Démonter les tentes sous une pluie éventuelle, au petit jour pour se dépêcher de rentrer, ne donnait pas envie. Couvrir pour vous un tel festival n’est pas de tout repos, et les vacances me semblent bien méritées. Sauf que l’avion ne m'attendra pas. Or, à l’heure où vous lisez ces lignes, j’espère bien n’être déjà plus en France. En attendant peut-être de reprendre la Route une prochaine fois… |