Vous
l'avez forcément constaté, en ce moment, les jeunes
groupes croient réinventer le rock et la pop. Dans le genre
"Avant nous rien, avec nous l’histoire de la musique
moderne commence". Et bien moi je dis : Non ! Chers teenagers,
cessez de croire que la musique n'existait pas avant vous !
Et d'ailleurs je ne suis pas le seul à le penser cela puisque
la musique est dans son cycle revival. Pire que chez Foucault du
temps de sa splendeur télévisuelle, toutes les maisons
de disques nous ressortent leurs papys. Dans le meilleur des cas
de l'hospice, au pire du cimetière !
Pour n'en citer que quelques uns, en vrac, Brian
Wilson catatonique, Iggy Pop
plus stoogien que jamais, les Stray Cats
encore plus kitsch à Bercy, les Fleshtones
qui tiennent encore la route ou même des jeunes retraités
qui reforment leur petit groupe de rock américain qui ont
connu leur heure de gloire voilà plus de 10 ans …j’ai
nommé… les Pixies…
Idem pour les Throbbing Gristle qui
obtiennent la palme d’or de la résurrection et même
les Doors reviennent dans la course
avec un pathétisme qui n'a d'égal que l'argent qu’ils
rapportent.
Bref, toute une batterie de vieux jeunes qui nous inondent des
mêmes rengaines sans chercher à aller voir plus loin
s’il se passe quelque chose. En cela David
Bowie a au moins eu le mérite de suivre les modes…
pour le meilleur et pour le pire certes …
Alors c'est dire si dans le contexte actuel, on regarde toutes
ces vieilles idoles un peu oubliées avec suspicion quand
elles pointent le bout de leur canne.
Et Morrissey ne fait pas exception à
la règle puisqu’il ressort lui aussi de sa grotte de
la célébrité pour aller voir si le soleil est
plus chaud sous les sunlights du 21 ème siècle !
Le titre de son précédent album Maladjusted
s’avérait-il révélateur ? Nous
pensions tous qu’il serait le dernier tout en espérant
secrètement le contraire. C'est que le monsieur n'est pas
facile non plus, inadapté peut être mais pas toujours
très volontaire pour faire le premier pas.Pourtant, nous
ne le quittions pas des yeux, épiant ses pérégrinations,
de dépression en disparition, de remise en question en recherche
de label.
Et puis en 2002 voilà que celui qui est sans doute un de
nos derniers mythes vivants et non encore déchus refait surface.
Pas de disque, pas de label mais quelques dates de concerts qui
miraculeusement se trouvent à deux reprises sur Paris (la
plus belle ville du monde dira-t-il à la Mutualité…
sacré Momo tu sais vraiment mettre un public, de toute façon
déjà acquis à ta cause, dans la poche et ce
depuis des décennies…). Et là le miracle se
produit, Morrissey est toujours fabuleux, magique, personne ne tient
une scène comme lui, et cerise sur le gâteau il nous
sert 3 titres jusqu'alors inédits et qui se retrouvent aujourd'hui
sur ce merveilleux objet que je tiens dans les mains, autrement
dit le Saint Graal de tout amateur de pop d'un âge supérieur
à 30 ans, You are the Quarry,
LE nouvel album de Morrissey !
Ce même Morrissey, qui sans label depuis des lustres, se
retrouve tout à coup avec le deal du siècle. Sanctuary
remonte pour lui le myhique label Attack Records et comme si cela
ne suffisait pas Morrissey a carte blanche pour y signer les artistes
qu'il veut ! On croit rêver. Il commencera d'ailleurs comme
chacun sait par Nancy Sinatra. Attack
Records, le label à la mitraillette façon prohibition
exhibé superbement sur la pochette par un Moz impérial
dans un costume armanien, il en jette le bougre. Mais aussi merveilleux
soit le côté anecdotique, il ne fait pas tout. Que
nous réserve la cuvée 2004 du Morrissey nouveau, même
si, se remémorant ces récents concerts, on ne se fait
qu'un souci modéré et on ne pense plus à ce
moment là à tous ces vieux ressurgis de nulle part
précités ?
La première évidence incontournable à l'écoute
de You are the Quarry c'est que personne d'autre que Morrissey et
sa bande n'a jamais aussi bien fait du Morrissey. Morrissey est
un artiste inimitable et incomparable, qui finalement à très
bien réussi à se passer de son alter ego Marr, ou
en tout cas qui a su franchir le cap peut être plus dignement
que l'on voudrait le faire croire. Bref, Morrissey est incomparable
et cela est déjà rassurant, c'est bien lui, fidèle
au poste qui, comme en live, nous offre quelque chose d'unique et
d’excellent.
Car oui, ce petit miracle qu’est son nouvel album relève
de l’excellence, du sublime, de l’unique !
Non seulement il ne contient objectivement que des tubes mais
en plus il y a de vrais morceaux de Momo qu'on aime dedans, voire
même carrément tout le bonhomme. Un rock bande incisif
sans être envahissant, des perles pop rock largement au dessus
du lot, des textes comme il en a le secret … tout y est. Et
on sent même un certain apaisement, une confiance en soi qu'il
ne nous avait que trop peu habitué à montrer ces derniers
temps. Et même si les doutes le poursuivent encore sur "Let
me Kiss you" ("Close your eyes and think of someone
you physically admire and let me kiss you") ou sur "The
world is full of crashing bores" ("… no one
ever turns to me to say take me in your arms and love me")
il le fait tout en douceur, en résignation et calme, sans
révolte.
Et s’il se permet une chanson sur les gloires éphémères
des stars pour adolescents ("you know
I couldn't last"), Morrissey, restera pour nous toujours
notre star, et nous en l'écoutant, toujours un peu adolescent.
Bon je n'ai pas vraiment disséqué le contenu du disque
mais de toute façon sachez que c'est un, que dis-je, le disque
indispensable de toute bonne discothèque. Je laisse donc
le soin aux inconditionnels comme aux petits curieux de le découvrir
par eux-même, notamment l'édition avec DVD, tant qu'à
faire !
Merci encore Monsieur Morrissey. ! Vous pouvez revenir quand vous
voulez !
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