Comédie d'Eugène Labiche mise en scène par Stéphane Bouby avec Stéphane Bouby, Pascal Daubias, Anne-France Mayon, Anthony Perrat et Christophe Santer (Christian Termis en alternance).
Embrassons nous Folleville est une pièce de jeunesse du très prolifique maître du vaudeville, Eugène Labiche, genre qui selon sa propre définition était "l’art d’être bête avec des couplets".
De son vivant déjà, "adonné presque exclusivement à l’étude du bourgeois, du philistin, cet animal [qui] offre des ressources sans nombre à qui sait le voir, il est inépuisable. C’est une perle de bêtise qu’on peut monter de toutes les façons", sa notoriété était établie et ses répliques sont passées dans le langage courant. Ainsi en est-il d’ailleurs de la réplique "Embrassons-nous Folleville !" et le discours de réponse à son discours d’entrée à l’Académie française est édifiant à cet égard (*).
L’argument est simple voire simplissime : le bouillonnant marquis de Manicamp a organisé le mariage de sa fougueuse fille Berthe avec le fâlot chevalier de Folleville, qui lui a sauvé la face lors d’un incident de chasse au canard. Mais celui-ci est déjà engagé et c’est sans compter avec la rencontre énergique de Berthe et du bellâtre vicomte de Chatenay.
Cette pièce a connu un succès constant qui ne rend pas si facile que cela les nouvelles adaptations. Au théâtre du Tambour Royal, lieu superbe qui rappelle les théâtres populaires du siècle passé, Stéphane Bouby s'y est attaqué avec réussite et fidélité, par exemple en conservant les parties chantées sur des compositions interprétées live par l’auteur compositeur Jean Michel Voiront et les comédiens, non dénuée cependant de modernisme, parsemant sa mise en scène de petites trouvailles (les trois coups, depuis longtemps abandonnés, frappés par la balayette du valet me ravissent) qui renouent avec la comédie populaire tout en flirtant avec la commédia dell’arte.
Sur scène, une distribution talentueuse et ébouriffante qui nous prend par la main dès les premières répliques pour nous emmener sur les chemins du rire et de la bonne humeur.
Pascal Daubias campe avec aisance un père truculent qui virevolte sur la scène, toute émotion lui faisant perler une larme sous ses longs cils (sic !) face à Anne-France Mayon qui manifeste un tempérament et un talent tout à fait singuliers et qui est tout simplement irrésistible.
Du côté des prétendants, le fameux Folleville qui croule sous les embrassades est interprété tout en finesse et délicatesse par Christophe Santer et c’est Anthony Perrat qui endosse avec un sens avéré du comique la mèche rebelle et l’épée encombrante du vicomte.
Un spectacle complet à côté duquel il convient de ne pas passer !