Musique sep Théâtre sep Expos sep Cinéma sep Lecture sep Bien Vivre
  Galerie Photos sep Nos Podcasts sep Twitch
 
recherche
recherche
Activer la recherche avancée
Accueil
 
puce puce
puce Arcade Fire - Fucked Up
Halle Tony Garnier  (Lyon)  vendredi 26 novembre 2010

Alors que la planète rock est à leurs pieds, qu'ils ont publié au beau milieu de l'été The Suburbs, troisième album en forme de consécration, on attendait en vain ces dernières semaines un passage des Canadiens à Paris. L'impatience se fait d'autant plus ressentir qu'on les a ratés début juillet au Casino de Paris et qu'on a volontairement décidé de ne pas les re-revoir (après 2005 et 2007) à Rock En Seine. Bien nous en a pris, la pluie leur ayant joué un sale tour ce soir-là. Pas d'autre choix donc que de plier bagages et filer chez les gones.

Alors que l'on se faufile dans la fosse de l'immense Halle Tony Garnier (un petit Bercy), on a les pieds qui frétillent. Pourquoi faire tant de cas d'Arcade Fire ? Car dans un contexte rock qui a rarement été aussi morose, il ne reste plus grand monde capable de reprendre le flambeau, et personne ne le fait avec plus de verve qu'eux.

On se réjouit donc de les voir prendre lentement mais sûrement le chemin des stades (O2 Arena à Londres et Madison Square Garden à New-York remplis à ras-bord). A l'heure où la programmation des grandes arènes se résume à des groupes ayant un pied (voire deux) dans le passé ou aux Muse, Lady Gaga et consorts, et alors que chaque sortie médiatique des Strokes inquiète chaque fois un peu plus, Arcade Fire est en passe de s'imposer comme le plus grand groupe de rock contemporain.

Ce n'était pourtant pas gagné d'avance : des tronches pas possibles, une musique exigeante et tout sauf soumise aux dictats FM, deux années hors du circuit le temps de se ressourcer, une image arty, une attitude no bullshit. Ils sont résolument à part et c'est ce qui fait leur force : leur vitalité fait tellement de bien dans l'univers ronronnant du rock.

La curieuse première partie (Fucked Up) nous donne à voir un sacré spécimen. Le chanteur est un beau et costaud bébé velu qui braille, rugit et parfois hurle. Le tout secondé par trois guitaristes et un bassiste qui maltraitent leurs six cordes avec application. Une prestation toute en finesse, en somme.

Le frontman-malabar se retrouve la bedaine à l'air dès la fin de la première chanson puis descend dans la fosse serrer des pinces et effrayer le chaland. Le (très bon) groupe se retrouve alors orphelin pour un bon moment, puisque Damian Abraham (c'est son nom) vient faire son show jusqu'au beau milieu du public. Aussi épatant que cela puisse être, il en résulte un manque visuel sur scène.

Musicalement, le groupe sonne comme des Brian Jonestown Massacre sous speed et potards à 12. On apprécie malgré l'épuisante voix hardcore du chanteur. On demande surtout à voir ce que donneraient les Fucked Up avec un chant approprié à leur musique. Ils en seraient assurément grandis.

Montant sur scène au son de "The Suburbs (continued)", Arcade Fire est accueilli comme il se doit : par un déluge de cris et de sifflets. En arrière fond, projeté sur écran géant, un décor d'échangeur autoroutier. La banlieue en arrière-plan, comme un prolongement des récents titres du groupe. Une note de guitare retentit, martelant chaque temps, appuyée par la grosse caisse. Une deuxième vient s'entrelacer avant que la batterie ne fasse s'emballer la machine : "Ready To Start", forcément. Après cette grandiose mise en bouche, The Suburbs est mis de côté au profit de classiques des setlist du groupe : "Keep The Car Running", "Neighborhood #2 (Laïka)", "No Cars Go", "Haïti".

Pendant une heure et demi, Lyon a droit à un festival de grandes chansons, un véritable feu d'artifice rock. Le groupe est en forme, se déchaîne, donne de la voix, les membres jonglent - comme à l’accoutumée - entre les instruments avec une insolente facilité. Will Butler (frère du chanteur et véritable touche-à-tout) maltraite régulièrement son tambour, le finissant même à coups de poings sur l'orgiaque enchaînement "Neighborhood #3 (Power Out)" / "Rebellion (Lies)". Régine Chassagne (moitié de Win Butler à la ville) mériterait un paragraphe à elle seule : Régine fait de la batterie, Régine joue de l'orgue, Régine chante, Régine agite des rubans de couleur dans tous les sens, Régine joue de l'accordéon, Régine est aux claviers...

Avec ces diables de canadiens, il se passe en permanence quelque chose sur scène. Mais, trônant au beau milieu de ce fatras, c'est bel et bien Win Butler qui hypnotise l'assemblée. A première vue, qui aurait parié un kopeck que ce chanteur jadis accoutré comme un croque-mort, plutôt timide et humble hors des planches, deviendrait un jour le chef de meute de la formation la plus passionnante depuis Radiohead ? Pas grand monde. Sauf que sur le champ de bataille, enfilant le costume de prédicateur à l'aura quasi-chamanique, il se révèle en général grandiose.

Arcade Fire a de l'or dans les doigts et les cordes vocales : avec eux, un bon morceau devient instantanément un hymne : entre un "No Cars Go" épique, un magnifique "Haïti" au final musclé, un "Month Of May" électrisant, un "Sprawl II (Mountains Beyond Mountains)" tubesque, "Une Année Sans Lumière" à la fin fin jubilatoire, on ne sait plus où donner de la tête.

Intensité et énergie, tempo frénétique, envolées grandioses, son massif, telle pourrait être la formule magique d'Arcade Fire. Sauf que perché à l'orgue ("My Body Is A Cage", bonne surprise de la setlist - pas jouée en concert depuis deux ans, prévient le chanteur -, avec le rouquin déjanté Richard Reed Parry à la contrebasse) ou au piano (splendide "The Suburbs"), Win Butler prouve en deux chansons trois mouvements que sa troupe sait aussi faire preuve de subtilité et de douceur.

Les canadiens nous réservent une fin de soirée fabuleuse : "Neighborhood #1 (Tunnels)" (beau à pleurer) et "We Used To Wait" avant le clou de la soirée : "Neighborhood #3 (Power Out)" - enivrante malgré une voix pas très assurée - et "Rebellion (Lies)" se succèdent sans transition, dynamitant tout sur leur passage. En rappel, Lyon a droit à "Intervention" - un peu pompier mais diablement efficace - et l'incontournable "Wake Up", qui finit de nous achever les cordes vocales.

Avec une setlist centrée sur Funeral et The Suburbs et une générosité admirable dans l'effort, Arcade Fire a livré en cette fraîche soirée lyonnaise un concert pas parfait mais presque. La faute à un son certes puissant mais manquant de relief, de profondeur. On a aussi senti quelques pointes de fatigue dans la voix de Win Butler. Enfin, on ne peut que regretter de ne pas avoir entendu résonner "Empty Rooms" et "Deep Blue" dans la halle Tony Garnier.

Parmi des dizaines d'autres raisons, on sera éternellement reconnaissant à Arcade Fire pour avoir décomplexé tous les chanteurs en herbe. Car à un concert des canadiens, on chante sans retenue ni arrière-pensée des refrains exaltants, créant une pulsion libératrice commune à tous les spectateurs. On est à mi-chemin entre les choeurs de l'armée rouge version rock et la bande de marins de retour sur la terre ferme. Quoi qu'il en soit, après avoir beuglé tout notre saoul la pléiade de refrains magnifiques proposés ce soir, on ressort de la Halle Tony Garnier trempé de sueur et ivre de bonheur.

 

A lire aussi sur Froggy's Delight :

La chronique de l'album Funeral de Arcade Fire
Une 2ème chronique de l'album Funeral de Arcade Fire
La chronique de l'album The Suburbs de Arcade Fire
La chronique de l'album Reflektor de Arcade Fire
Articles : Festival Rock en Seine 2010 - Programmation du dimanche - Wallis Bird - The Temper Trap - Success - The Black Angels
Arcade Fire en concert à la Maison de la Radio (White session) (9 mars 2005)
Arcade Fire en concert à l'Olympia (19 mars 2007)
Arcade Fire en concert à l'Olympia (20 mars 2007)
Arcade Fire en concert au Festival Les Eurockéennes 2007 (dimanche)
Arcade Fire en concert au Festival Summercase 2007 (vendredi)
Arcade Fire en concert au Festival des Vieilles Charrues 2007 (vendredi)
Arcade Fire en concert au Festival Rock en Seine 2010 (dimanche 29 août 2010)
Arcade Fire en concert au Festival International de Benicàssim #17 (dimanche 17 juillet 2011)
Arcade Fire en concert au Festival Les Vieilles Charrues 2017 - du 13 au 16 juillet 2017
Arcade Fire en concert au Festival Les Vieilles Charrues 2017 - du vendredi au dimanche
L'interview de Arcade Fire (1er mars 2005)
La chronique de l'album The Chemistry of Common Life de Fucked Up
La chronique de l'album Couple Tracks : Singles 2002 - 2009 de Fucked up
Fucked Up en concert au Festival Les Eurockéennes de Belfort 2008

En savoir plus :
Le site officiel de Arcade Fire
Le Myspace de Arcade Fire
Le site officiel de Fucked Up
Le Myspace de Fucked Up
Le blog de Pierre


Pierre Baubeau         
deco
Nouveau Actualités Voir aussi Contact
deco
decodeco
• A lire aussi sur Froggy's Delight :


# 13 octobre 2024 : Sur un malentendu ca peut marcher

Le replay de la MAG#91, du théâtre, du cinéma, de la musique, de la littérature, c'est parti pour notre sélection de la semaine...Pensez aussi à nous suivre sur nos réseaux sociaux.

Du côté de la musique :

"The new sound" de Geordie Greep
"Tomorrow can wait" de King Crab
"Rien ne presse" de Laurent Benitah
"Coeur de cible" de Lofofora
"Chance" de Miki Yamanaka

et toujours :
Bertrand Betsch en concert à la Manufacture Chanson
"Sway" de Headcharger
"Norna" de Norna
"Endorphine" de Clemix

"Spectacle Daisy the great VS Tony Visconti" de Daisy The Great
"Jamais plus" de Faut qu'ça Guinche
"New internationale" de Kit Sebastian
"Rivière" de Mirabelle Gilis
"Lost & found" de Raul Midon
"Soft Tissue" de Tindersticks
"Probably for nothing" de Two Trains Left
Nouvelle saison du Morceau Caché ! nouvel épisode "Passerelles, Partie 3"

Au théâtre :

"L'art de ne pas dire" au Théâtre Saint Georges
"Passage en revue" à La Divine Comédie
"Le choix des âmes" au Théâtre des Gémeaux Parisiens
'La double inconstance" au Théâtre Le Lucernaire
"ADN" au Théâtre Michel

"Variations Pirandelliennes" au Théâre de Poche Montparnasse
"Dany Parmentier, gourou" au Petit Palais des Glaces
"Formica" au Théâtre des Gémeaux Parisiens
"Les liaisons dangereuses" à la Comédie des Champs Elysées
"Lettres d'excuses" au Théâtre Le Lucernaire
"The loop" au Théâtre des Béliers Parisiens
"Sur tes traces" au Théâtre de La Bastille
"L'art de ne pas dire" au Théâtre Saint-George
"Belvédère" au Théâtre Le Guichet Montparnasse
"La longue route" au Théâtre Le Funambule Montmartre
"Les marchands d'étoiles" au Théâtre Le Splendid
"Rentrée 42 Bienvenue les enfants" au Théâtre Comédie Bastille
des reprises :
"Nulle autre voix" au Lavoir Moderne Parisien
"Fini la comédie" au Théâtre Montmartre Galabru
"Les vengeurs, le flower killer" à la Divine Comédie
"Aymeric Lompret, Yolo" au Théâtre de la Renaissance
"Du bonheur de donner" au Théâtre La Scala
"Les fourberies de Scapin" au Théâtre Lepic
"Frida" à la Manufacture des Abbesses
"La parure" au Théâtre Le Guichet Montparnasse
"Looking for Jaurès" au Théâtre Essaïon
"Pourquoi Camille ?" au Théâtre Le Guichet Montparnasse
"Van Gogh, deux frères pour une vie" au Théâtre Le Guichet Montparnasse
"Glenn naissance d'un prodige" au Théâtre Montparnasse
"Majola" au Théâtre Essaïon
"Gisèle Halimi, une farouche liberté" au Théâtre La Scala
"L'odeur de la guerre" au Théâtre La Scala
"Le premier sexe" au Théâtre La Scala

Du côté de la lecture :

"Bonheur d'occasion" de Gabrielle Roy
"Histoire de la guerre en infographie" de Julien Peltier, Vincent Bernard & Laurent Touchard
"Hurlements" de Alma Katsu
"L'armée allemande 1870-1945" de Benoit Rondeau
"Le paradis des fous" de Richard Ford
et toujours :
"Les voisins" de Diane Oliver
"18 Barnfield hill" de Robert Goddard
"Histoire de l'Europe, Tome 1" de Violaine Sebillotte Cuchet
"Only lovers left alive" de Dave Wallis
"Amours manquées" de Susie Boyt
"Blackouts" de Justin Torres
"Emanciper ou contrôler" de Pascal Clerc
"Le débarquement de Provence" de Claire Miot
"Les présences imparfaites" de Youness Bousenna
"Seul restait la forêt" de Daniel Mason

Il est toujours temps d'aller au cinéma ou regarder un bon film :

nouveauté :
"Terrifier 3" de Damien Leone
"Papa est en voyage d'affaires" de Emir Kusturica

"Gondola" de Veit Helmer
"Aventurera" de Alberto Gout
"Karmapolice" de Julien Paolini
un DVD avec "Berlin boys" de David Wnendt
"Saravah" de Pierre Barouh
"La récréation de juillet" de Pablo Cotten et Joseph Rozé
"El profesor" de Marie Alché & Benjamin Naishtat
"Six pieds sur terre" de Hakim Bensalah
"Nouveau monde" de Vincent Capello
et toujours :
"La Gardav" de Thomas et Dimitri Lemoine
"Heroico" de Davis Zonana
"Roqya" de Saïd Belktibia
"L'esprit Coubertin" de Jérémie Sein

Et toute la semaine des émissions en direct et en replay sur notre chaine TWITCH

Bonne lecture, bonne culture, et à la semaine prochaine.

           
twitch.com/froggysdelight | www.tasteofindie.com   bleu rouge vert métal
 
© froggy's delight 2008
Recherche Avancée Fermer la fenêtre
Rechercher
par mots clés :
Titres  Chroniques
  0 résultat(s) trouvé(s)

Album=Concert=Interview=Oldies but Goodies= Livre=Dossier=Spectacle=Film=