Comédie de Marivaux, mise en scène de Michel Raskine, avec Stéphane Bernard, Christine Brotons, Jean-Louis Delorme, Christian Drillaud, Marief Guittier, Guy Naigeon et Michel Raskine.
Point d'audace ou de clairvoyance qu'écrire que le répertoire classique est miné par les relectures contemporaines et pas un metteur en scène, même aguerri, qui ne cède à la tentation de donner sa lecture, voire même sa "vision", du texte.
Tel Michel Raskine, metteur en scène réputé à la soixantaine bien portée, qui monte son premier classique français en dynamitant
"Le jeu de l'amour et du hasard" de Marivaux. Autant le savoir avant d'aller aux Ateliers Berthier.
En effet, il faut donc oublier l'oeuvre originale, le nom de l'auteur et son propos, et voir ce qui est donné a voir : une comédie de café-théâtre, avec de vagues colorations de commedia dell'arte, qui sombre dans le pathétique interprétée par une troupe de seniors.
Dans cet opus, Michel Raskine affirme sa volonté délibérée de s'inscrire à contre-courant de la tradition et du conformisme qui présideraient à la manière de monter Marivaux et sa croyance en l'incapacité des jeunes comédiens à jouer cet auteur faute d'endurance, de technique et d'expérience.
De surcroît,
il affirme clairement vouloir distribuer les comédiens de sa génération, plus précisément les compagnons de sa route théâtrale, dont notamment Marief Guittier, qui en l'espèce joue le rôle principal de Silvia, pour laquelle il indique essayer de "trouver des spectacles où il y a un rôle pour elle".
Dès lors, l'action semble transposée quarante ans après. Ainsi, à titre d'exemple, la jeune file à marier est interprétée par une dame décharnée à la voix rauque de fumeuse qui a largement dépassé la cinquantaine. Le tout à l'avenant.
Et cette comédie, reposant sur le subterfuge du double travestissement maîtres-valets pour éprouver le caractère des promis, qui célèbre le triomphe de l'esprit et de la conscience claire et conforte, sinon légitimise, le déterminisme de classe, se transforme en farce tragique farcie d'anachronismes rebattus.
Toutefois, dans ce registre, la troupe de vétérans
incarne parfaitement les personnages transmutés en burlesques pantins et vieux cabotins. |