Comédie dramatique de Fabrice Roger-Lacan mise en scène de Isabelle Nanty, avec Jacques Weber et Bénabar.
Imaginez une plage de sable fin, longue de 3 km, complètement déserte. Placez-y un homme. Pas n'importe quel homme : un vieil ours, certainement patron d'une grosse boite du CAC 40, globalement satisfait de sa personne de son argent, de sa haute position sociale et du pouvoir que cela lui confère. Il n'aspire qu'à une chose : une paix qu'il juge bien méritée après une année de dur labeur.
Prenez ensuite un autre homme, pas son opposé, mais presque : un jeune loup, provocateur, ambigu, un brin roublard et surtout insistant. Très insistant.
Que se passe-t-il lorsque le jeune loup vient installer son drap de bain, sur la même plage que l'ours? Pis : qu'il s'installe tout, mais alors vraiment tout à côté de lui, l'amputant de son espace vital ?
Fabrice Roger-Lacan étudie dans "Quelqu'un comme vous", avec subtilité et intelligence, les rouages de l'échange (humain, verbal, social, affectif) et les rapports de force qui en découlent. Deux hommes, qu'a priori tout oppose, se retrouvent dans une situation qui les obligent à se parler.
D'abord purement social, le dialogue glisse doucement vers des eaux plus troubles et prend une tournure inattendue. Les deux personnages manient la langue, acerbe, précise, avec une acuité et une rapidité d'esprit fulgurante.
En choisissant Jacques Weber et Bénabar, Isabelle Nanty prend un pari risqué : la notoriété et le charisme de Weber ne vont-ils pas engloutir l'inexpérience et la fraicheur du jeune Bénabar pour ses premiers pas sur scène ? Il n'en est rien.
Jacques Weber incarne certes avec facilité et naturel son personnage, mais Bénabar se démérite pas face à son illustre partenaire, se révélant d'une insolence juste et précise, et tirant même son épingle du jeu avec brio.
La joute entre ces deux monstres d'égoïsme (chacun à leur manière) est très plaisante, même si la mise en scène manque quelques fois un peu de relief et peu sembler, à certains moments, ennuyeuse. Le format court du spectacle permet heureusement d'aller droit dans le vif du sujet. Les comédiens et le texte font le reste. |