Encore une formation belge prête à faire parler d'elle. Peut-être y a-t-il là-bas un vent de liberté qui, tout en permettant au pays de tourner sans gouvernement depuis plusieurs années, autorise ses habitants à oser ce que les français ne pensent souvent qu'à contempler de loin : un rock "à l'américaine", long format, premier degré et cinémascope. Les anversois de Triggerfinger officient dans le registre d'un rock musclé, que l'on dirait stoner, power trio épatant qui ne sera pas toujours loin de rappeler leurs éminences des Queens of the stone age. C'est musclé, direct et tout à fait convaincant. A vrai dire, pour son deuxième long format, le groupe pourrait fort bien acquérir une renommée importante.
Il manquera peut-être à l'ensemble le single imparable qui lui donnerait une exposition massive. Il manque toujours un single imparable aux formations les plus sérieuses. Certains considèrent même que les formations cessent d'être sérieuses lorsqu'elles ont bénéficié d'une exposition massive – objet de soupçon, tout au moins, qui pourrait bien avoir vendu son âme au diable de la grande distribution. Mais, quoi, que dire quand la musique est bonne ?
Triggerfinger a plusieurs arguments de poids qui pourraient fort bien valoir leur pesant d'or : la voix de Ruben Block, tout d'abord, l'une de ces vraies voix, caméléonne et contorsionniste, capable d'habiter une ligne de chant ; un duo basse-batterie des plus solides, pachydermiquement groovy, de ces machines lourdes implacables qui vous font de la dentelle sidérurgique ; une réelle richesse de composition qui lui permet de ne pas se répéter ni s'autociter en onze titres et cinquante minutes.
Par moment, on se souviendra des grandes heures de Soundgarden ; on retrouvera des réminiscences d'un System of a down (sur Tuxedo) ; on trouvera même quelques similarités avec les Black Box Revelation, autre formation belge tout à fait recommandable (dont les albums se trouvent justement être produits par Mario Goossens, le très solide batteur des Triggerfinger – ceci expliquant cela ; la ressemblance pourra sembler claire par exemple sur l'étiré "My Baby's Got a Fun").
Seule remarque, que l'on juge indispensable : play this music loud. |