Il est scénariste, parolier, il présente un road-movie nocturne dans Paris sur la chaîne Paris Première, et il écrit. En l’absence des hommes, L’arrière-saison, Son frère, Les jours fragiles, Retour parmi les hommes… Onze livres en huit ans, onze romans à l’écriture si fluide qu’elle en devient poétique, aux sujets si graves et pourtant si ordinaires qu’ils nous touchent forcément.
Son douzième opus, Une bonne raison de se tuer, est paru le 5 janvier et c’est une très bonne raison de présenter, enfin, Philippe Besson sur Froggy’s Delight.
Ce sont deux personnages, dans ce nouveau roman : Laura et Samuel. Bien sûr, on croise aussi les ex-époux, des amis, des collègues, des clients… mais ils ne sont que deux, en fait. Et leur solitude. Et leurs blessures. Le reste n’est vraiment que secondaire.
Laura est une femme d’une quarantaine d’années, séparée depuis trois ans de son mari. Ce divorce, inimaginable pour elle, subi, l’a évincée de son existence à lui, de sa vie à elle. Car, depuis, elle est en dehors des murs protecteurs de sa maison, en dehors de ses fils, en dehors de son rôle de mère et de femme au foyer qui donnait jusque-là un sens à sa vie. Il y avait ces certitudes ; il ne reste que le vide, les absents et l’étouffante impression de son inutilité.
Samuel, lui, est un homme meurtri, un père à jamais incomplet : il y a cinq jours, son fils de dix-sept ans s’est suicidé. Il connaît donc lui aussi la perte tragique, la souffrance du manque de l’autre, la certitude de s’être perdu à jamais, par ce deuil.
Ils sont à Los Angeles, le 4 novembre 2008, jour de l’élection d’Obama. Le peuple américain espère ou redoute, selon les opinions. Est uni en tout cas dans cette attente. Eux sont en marge. Car pour Samuel, ce jour-là, c’est celui de l’enterrement de son fils. Pour Laura, celui où elle a décidé de se donner la mort. Fatalement, ces deux-là vont se croiser, se rencontrer. Forcément, il y aura l’espoir d’un sauvetage.
Dans ce roman, Philippe Besson raconte donc cette journée particulière pour ces deux personnages. Il dit leurs souffrances intolérables, leurs jolis souvenirs, leurs espoirs et leurs projets envolés, les questions oppressantes mais inévitables du père face au suicide de son fils, les regrets de la mère déchue. Il dit tout cela, comme il en a l’habitude, dans un style fluide, presque rythmé, par des phrases simples et belles de cette simplicité.
Une bonne raison de se tuer est un roman triste, stressant, accaparant. Un roman qui laisse une trace en nous, dont on ne ressort pas indemne. L’absence (toujours), la vacuité de nos vies, le manque d’amour qui dévore le cœur et détruit le corps ; autant de sujets qui ne peuvent laisser le lecteur en dehors de ces pages. Laura et Samuel sont touchants dans leur désespoir et dans leur simplicité à y faire face. Ils ne nous quittent pas, une fois le livre terminé.
Philippe Besson a écrit le 5 janvier - jour de la parution de ce roman - qu’il ressentait un mélange d’excitation et de peur. Beaucoup de ses lecteurs ont également dû partager cela : l’impatience de lire son nouveau livre mais la crainte aussi, même minime, même inavouée, d’être peut-être déçus. A l’évidence, ce ne sera pas pour cette fois. |