Julie Rey poursuit son parcours hors cadre. Aujourd'hui, avec Arnaud Cathrine elle propose un projet hybride, entre enquête, théâtre et chansons.
Il n'y a pas de coeur étanche est un spectacle et un album de chansons, des instantanés de vie collectés après plusieurs rencontres avec des résidents du CHS de la Chartreuse, hôpital psychiatrique. Les chansons sont d'une délicatesse extraordinaire pour raconter ces parcours brisés, ces mises à l'écart. Ceux qui ont perdu l'ordre dans leur vie, le sens de leur existence, ceux qui viennent "se reposer", comme on dit pudiquement.
La musique et les textes nous présentent ces hommes et ces femmes heurtés, ces mal aimés, ces envahis de tempête. On refait le chemin avec ces deux artistes qui entrent dans cette institution, on part à la rencontre des personnes, on s'intéresse à elles. Et puis finalement on leur ressemble. Les murs sont censés protéger qui de qui ? Les uns des autres ? Les uns d'eux-mêmes ? De leur propre glissement dans le tragique. Les mots se déroulent, les confidences naissent alors, l'explication et le temps immuable qui font, de ces adultes, des enfants dévorés de chagrin. Ce même chagrin qui menace tout le monde, qu'on domestique tant bien que mal à travers nos habitudes, nos quotidiens : une digue trop fragile. Un miroir au bord du chemin, cet album est tissé de poésie sur la nature humaine, sa complexité, ses combats incessants contre l'Ordre, la famille, le rôle.
Un voyage de tendresse, une caresse réconfortante et troublante. Julie Rey et Arnaud Cathrine reprennent "Le sens" de Dominique A, extrait de son album La Musique, soulignant leur lien artistique. L'artiste construit des passerelles entre les gens, que fait-il d'autre que créer une communion au-delà des origines, des sexes, des âges.
Je n'ai désormais qu'une hâte, c'est avoir l'occasion de voir sur scène ce spectacle mis en scène par Ninon Brétécher, pour toucher de plus près cette vérité, comme un murmure souple loin du brouhaha. Il n'y a pas de coeur étanche en tournée s'annonce au festival Art et Déchirure à Rouen le 9 juin 2012. En attendant la suite... |