"Štoht hïrr štoht !
Dö wïrr dëhn soï dön waï
Ündïa dëhn dö wïlëhn downah
Ündï dëhlöwoh rïw/ëhn sïn dreïss
Ündiï dëhn dö L/ëwöska
Dëh wëh rï wëh soï - Šlaöss !
Dö wïrr dëhn stoï
Dö wïrr Dö wïrr
Dowëri seï Höss
Ündïa dëhlö d/ëm worëtsoï
Ündï dëhlö Ïoškoïa"
Si vous n'avez rien compris, c'est que vous êtes trop jeune, et ce disque n'est probablement pas fait pour vous. Néanmoins, nous vous conseillons fortement de vous renseigner sur la planéte Kobaïa et sur le mouvement musical Zeuhl.
En revanche, si comme moi vous ne dites pas "bonjour" aux gens, mais "hür" et que votre collègue vous répond la même chose, vous avez frappé à la bonne porte (ou alors vous prônez la fin du monde en mangeant des scarabées dans une grotte, mais la seule toile à votre disposition est alors sûrement celle d'une araignée qui n'est pas prés de passer au 2.0).
Un peu d'histoire pour les cancres quand même : Christian Vander est le fondateur / batteur / chanteur du groupe Magma depuis 1969 mais aussi l'inventeur du kobaïen (language inspiré par l'allemand et le slave aux frontières de l'esperanto).
Pour comprendre ce disque, il est aussi important de savoir que Christian Vander s'est toujours revendiqué comme étant perpétuellement inspiré par John Coltrane, suivant constamment sa trace de manière spirituelle. Le poème chanté lors du morceau "Coltrane à l'instant" est d'ailleurs assez explicite sur le sujet.
Disque logique donc, et important aux yeux de son auteur, qui fut enregistré à une période bien précise. En effet, les sessions ont débuté le 17 juillet, date du décès de John Coltrane, pour se finir le 21 juillet à minuit, jour de ses funérailles.
D'ailleurs, l'année 2011 fut, lorsque l'on y réfléchit un peu, placée sous le signe de Coltrane. Des albums furent réédités en vinyle, mais surtout un moyen métrage du nom de Pursuance fut réalisé par un certain Guillaume Deraedt, autour donc du troisième mouvement de A Love Supreme, chef-d'oeuvre absolu du saxophoniste.
Tout ceci n'est pas anodin, surtout lorsque l'on observe que la cérémonie de clôture du festival Cinéma Brut, où était présenté le film en sélection officielle, se déroulait un 17 juillet...
Ce disque tout droit sorti d'un rêve de Christian Vander ne pouvait alors qu'être enregistré au cours de cette année.
Parlons-en, d'ailleurs, du disque, tout d'abord même si le kobaïen est présent sur plusieurs parties de l'album, le disque est à détacher du travail de Magma, il est capital de le comprendre.
Tout ici est improvisé en direct, au cours des cinq jours d'enregistrement. Tout est donc créé dans une spontanéité assez saisissante, même si pas toujours inspirée, où l'on sent que le groupe se donne à corps et âme afin de rendre un hommage ultime à une idole qui nous quitta malheureusement trop tôt.
Dans cette optique, l'on retiendra notamment l'épique "Klameuhr", où Vander est au top de sa voix, nous livrant une performance vocale exceptionelle rappelant les prouesses de Leon Thomas sur le "Karma" de Pharoah Sanders, disciple de Coltrane.
Certains morceaux sont par contre parfois un peu trop long, "Definitely" par exemple, qui débute pourtant sur une formidable improvisation de batterie (comme toujours de toute façon chez Vander), s'éternise bien trop sur un solo de clavier dispensable.
Dans l'ensemble néanmoins, le disque est cohérent dans sa démarche et reste intéressant, tout en prenant une place à part dans la discographie de l'un des musiciens les plus inventifs, avant-gardistes et donc passionants que la France ait jamais connu, et qui régalera aussi bien les fins connaisseurs kobaïens, les novices en la matière, que les passionnés de jazz qu'ils soient branchés free ou classique. |