Depuis ce début d’année nous avons pu, ici ou là, lire et entendre un certain nombre de banalités et quelques belles conneries sur cet album. Au registre des banalités, l’incontournable "écrin pour le diamant de la voix de l’interprète"… OK… de toute façon, rajoutez 3 ou 4 violons à un morceau et on vous ferra, à un moment ou un autre, le coup de l’écrin… Au rang des belles conneries, le plaisir d’entendre "enfin" un album de Leprest, dans lequel la musique est à la hauteur de la puissance des textes…
Pourtant cet album n’a pas vocation à renier la discographie du poète, à minimiser plus de 20 ans de chansons et 54 ans de Leprest ! Leprest sut parfaitement porter ses textes au firmament de la chanson, accompagné simplement - humblement - d’un piano. Leprest a su mettre tout le monde d’accord, par le choc musical de la rencontre de sa voix au poing levé et d’un accordéon. Leprest a souhaité aussi offrir un autre regard sur son œuvre, une autre entrée, une belle invitation : Leprest symphonique ! Il fallait faire confiance à l’ami de toujours, Romain Didier, aux manettes de cette épopée symphonique, pour aller au bout de l’aventure et achever leur projet : un Leprest aux mille violons, un Leprest invitation, à l’authentique émotion !
Une histoire d’amitié, de fidélité et une recette incroyable font de cet enregistrement un album à part, une particulière production dans notre histoire musicale. Leprest donne sa voix, fatiguée, brute, pour un dernier enregistrement, sans l’orchestre. Le 15 août, tristement, nous donnera de ses nouvelles… Connaît-on encore Leprest ? Fera-t-il encore des chansons ? Oui ! Romain Didier persévère et convoque l’orchestre pour mettre en symphonie les derniers enregistrements d’Allain. Sont appelés des amis de Chez Leprest pour les morceaux manquants : Jehan, Kent, Christophe, Enzo Enzo, Daniel Lavoie, Sanseverino. Un duo avec Romain Didier clôturera l’opus avec une ultime valse pour rien.
Au final, treize morceaux réorchestrés avec brio et un nouvel éclairage porté sur chacun. La musique appuie là où ça fait du bien et donne à voir de nouveaux versants des chansons choisies. Un pas de côté dans un pas de géant. Les interprétations, personnelles, décuplent la force (Jehan, Kent), la poésie (Christophe), la sensibilité (Enzo Enzo) ou la folie (Sanseverino) de l’œuvre. Mais tout reste Leprest, et c’est la grande réussite de l’album. Arrangements nouveaux, interprétations personnelles, voix usée du poète, puissance de l’orchestre symphonique, et pourtant, c’est bien Leprest qui nous parle. Ce sont ses mots et sa poésie qui transpirent et qui restent, collés à l’oreille, vissés aux tripes.
Un Leprest à mettre en toutes les mains, dans l’indispensable nécessité à diffuser l’œuvre au plus grand nombre. Un Leprest pour se laisser surprendre. Un Leprest pour découvrir Leprest, comme une ouverture sur un monde de poésie. Un Leprest pour le plaisir de Leprest.
Un Leprest réhabillé pour se redécouvrir, un Leprest dans son plus beau posthume ! |