L’art de l’intime. Il ne faut pas croire forcement ce que l’on voit. La démonstration d’un Maître a souvent à faire avec l’art du camouflage. Ce moment d’exposition est rarement celui de l’œuvre. Il faut donc faire preuve de patience et de temps pour discerner entre les mots les pièces exposées.
Le secret de l’intimité artistique est ici, à l’Espace Dali, 11 rue Poulbot Paris 18ème, dévoilé. On doit cette performance à Enrique Sabater, le secrétaire particulier du Maître.
Une aventure singulière qui aurait pu être signée d’un grand scénariste. Celle de cet homme bourlingueur, séduit en 1968 par l’œil moqueur du Maître.
"Signé Dali", comme on signe "Zorro". Il y a dans cette exposition l’extravagance d’une histoire humaine.
Enrique Sabater, aujourd’hui âgé de 85 ans, garde en lui ce charme du héros. Joueur professionnel, pilote de ligne, photographe, journaliste. Traqueur de stars alors que d’autres plus peinards s’offrent des fauves en clichés. Il ne faudra pas beaucoup de temps pour qu’une complicité animale s’instaure en cet été 68. Les mois de tous les possibles même celui de rendre complice l’homme dépêché par l’agence pour photographier le Maitre en retraite artistique dans ce petit port de pêcheur qu’est Lligat (Costa Brava) en Espagne.
Entre les deux hommes, 15 000$. Le salaire pour l’interviewer. Tout comme Godard plus tard qui considèrera qu’un entretien est un travail à part entière et du temps… Les 15 000$, Enrique Sabater ne les avait pas.
Peu importe, il y avait chez Dali cette malice, cette provocation enfantine qui rend complice ceux qui détectent chez l’Artiste autre chose que l’aspect représentatif de ce qu’il désire bien montrer. Tout l’art est ici, chez Dali, d’oser bousculer le monde endormi. Enrique Sabater le savait trop bien lui, qui plus d’une fois, de par sa fonction privilégiée jouait le rôle de protecteur face aux excès du Maître.
L’aventure peut alors commencer.
Elle durera 23 ans, comme ami, photographe, secrétaire particulier. Une rencontre hors norme qui vous change la vie d’un homme.
L’exposition que l’on peut découvrir depuis le 10 février et cela jusqu’au 10 mai n’est pas seulement un condensé de vie. C’est la VIE. Un bonheur entier que Montmartre nous offre, complétant la collection permanente, 120 œuvres du Maitre pas une de moins se sont jointes à la fête.
Enrique Sabater en âme d’artiste a compris que la folie restait pour nombre d’entre nous la sagesse même. Dali en est un exemple, à suivre aujourd’hui sans modération. |