Arnaud Michniak s'ouvre une autre voie que celle de la colère, du refus, de l'amertume désabusée. Pose sa voix. Dévoyant le programme, passe soudain à un autre chemin. Tait le cri, murmure. Comme s'il avait fini, ou tout au moins un instant cessé de presser ce citron acide qui lui sert de cœur, l'Agent Réel reprend à son compte son nom propre et profite de l'accalmie pour oser l'intime, chuchotant.
Arnaud comme apaisé s'ouvre, parle. De lui, de toi. Du bonheur, même, sur des guitares désaccordées. Il est, soudainement, fragile, aérien. Incroyable. Il y a dans ce nouvel album (autoproduction vinyle, transposition numérique – pas de CD à l'horizon), ce qu'il n'y avait jamais eu dans les albums du musicien : des paysages, un ailleurs, une tendresse qui s'ose, peut-être même quelque chose comme un espoir, pour sortir de cet enfer tiède.
Le Poing perdu (nom du premier album solo, 2007) s'est ouvert. Une main tendue ? Mieux : une caresse, un adieu. Et l'un des albums les plus poignants de l'un des musiciens français les plus essentiels. Ancien acolyte ex-Diabologum, Michel Cloup, en duo, nous avait déjà fait avec succès le coup de la renaissance miraculeuse, de l'instant de grâce auto-bio-fictif sincère, avec son Notre silence (2011). Pour qui sonne le tilt lui emboîte le pas, aisément. Plus abstrait, plus frêle esquif mais, au total, tout à fait magistral, lui aussi. Ce toulousain là-aussi a grandi ; et se révèle – "j'avais enfin compris, la vie c'est pas une idée, on est vivants" (A.M). |