Tous les ans on se dit
que non, décidément on ne reviendra pas l'année
prochaine, ça suffit comme ça, et qu’on attendra
que le groupe passe lors d'un vrai concert à lui pour le
voir. Et puis arrive l'automne et là, paf !, on replonge
Cette année le prétexte incontournable c'était
dEUS, dont le concert annonçant leur retour, lors de la route
du rock 2004, après 5 ans d'absence, nous avait mis l'eau
à la bouche. Et oui que voulez vous, il est de certains groupes
comme celui-là pour qui on sacrifierait même nos plus
grands principes.
Bref, en ce samedi 5 novembre nous voilà installés
à la Cigale pour une soirée qui verra se succéder
5 concerts et 2 petits "showcase" en guise d'interlude.
Ça commence vers 18h par le petit français qui monte
en ce moment, parmi quelques autres, Florent
Marchet. Sur quelques mesures de "Du côté
de chez Swann" interprété par Dave, décontracté,
il entre avec son groupe et s'inquiète de savoir si tout
le monde a bien eu le temps de prendre son goûter... (Et à
en croire l'éternel et inévitable déballage
de petits sandwichs divers de leur papier d'aluminium, ce n'est
pas le cas pour tout le monde).
S'enchaînent alors les titres de son album dans des interprétations
plutôt rock'n roll et si l'on craignait un peu d'avoir un
concert de chansons françaises un peu réchauffées,
la surprise est de taille face à ses titres à la fois
pop par la voix et rock par la musique.
Quelques autres petites vannes à destination du public
viendront ponctuer le concert ("Vous n'êtes
pas encore saouls, c'est l'avantage de jouer en ouverture des festivals..."
ou encore, entre 2 titres "Vous êtes
bien silencieux, vous parlez vachement plus pendant les morceaux
non ?", "Désolé,
j’étais accordé comme un porc. Vous ne vous
en êtes pas rendu compte ?"). Bref un peu cynique
mais très juste et somme toute assez bon enfant.
Florent Marchet nous gratifiera donc en vrac du corrosif "Levallois",
"Mes nouveaux amis" de "On
est tous pareil" dédié à tous les
petits malins qui voyagent dans de beaux pays et qui reviennent
craner avec un T shit du Hardrock café, et le bien nommé
"Je m'en tire pas mal" tant
cette ouverture de festival est réussie ! Cerise sur le gâteau
et malgré le timing serré, Florent glissera aussi
sa reprise de "Et quand bien même"
de Gainsbourg.
Nous vous reparlerons rapidement de cet artiste dans nos colonnes.
En attendant, le show continue et pendant l'installation de la
scène suivante, sur quelques centimètres carrés
de scène devant le rideau rouge, entre une jeune chanteuse,
façon Suzanne Vega, dont la voix et les applaudissements
nous empêchent de saisir son nom et que le responsable du
stand organisateur du festival sera dans l’incapacité
de nous donner à la sortie. Dommage, mais nous allons mener
l'enquête.
Accompagnée de sa seule guitare acoustique, elle joue quelques
titres intimistes ("T’es beau",
"Je suis floue", "Quand
je suis ivre") de bonne facture avec une voix plutôt
soul très singulière. A suivre.
Le rideau s'ouvre ensuite sur une scène quasi vide si ce
n'est une harpe majestueuse posée en plein centre. Joana
Newsom, la révélation parait-il de ce festival
2004, elle arrive cool sur la scène en entamant une chanson
a cappella et en incitant le public à taper des mains. Une
voix stridente de personnage de cartoon rappelant Betty Boop saisit
le public d’étonnement. Salve d'applaudissement alors
qu'elle rejoint son instrument... C'est vrai quoi ! Faudrait pas
avoir l'air con en n'applaudissant pas celle qui représente,
pour qui vous savez, la musique de demain !
Bon rien à dire sur le jeu impeccable de la dame, c'est
pas la première fois qu'elle touche à une harpe et
ça s’entend. Le problème de la harpe c'est que
ce n'est pas un instrument soliste pas excellence et que à
la longue, ça lasse...surtout quand il joue du Debussy sur
lequel se pose une voix, certes singulière mais agaçante
sur la durée,
Le jeuen Joana, avec son air de Barbie un peu illuminée,
pourraît être la fille cachée de Linda Lemay
et de John Cale et la petite sœur de Bjork élevée
au fin fond du Tennessee par Dolly Parton, pour le meilleur et pour
le pire ... En tout état de cause à écouter
dans de meilleures conditions, autrement dit dans une salle plus
petite, et peut être sur disque, mais ce n'est pas sur que
cela évite l'impression de répétitivité
ressentie à la fin du set.
Un public enthousiaste en tout cas salue sa prestation même
si, comme toujours, certains ne connaissent pas la notion de respect
de l'artiste et papotent comme dans leur salon.
Bref intermède musical avec Kelly Di
Martino, dont la jolie prestation en première partie
de Pierre Bondu avait retenu notre attention. Ici seule avec un
guitariste et une guitare pas très bien accordée elle
joue 3 chansons dont une reprise de Magnapop ("Open
the door") et puis s'en va. Frustrant ...
Mais la scène est déjà prête pour le
groupe suivant. 22/20's, nouvelle sensation
blues rock un peu crade venue d'angleterre. Pas grand chose à
dire sinon que cela fait beaucoup de bruit, que le bassiste répète
comme un dindon les mêmes mimiques de façon mécanique
en imitant Mick Jagger et que quelques morceaux sont plutôt
potables, notamment les 2 derniers dont un où le guitariste
chanteur se retrouve seul avec le batteur.
Le reste du temps, c'est plein de bonnes idées mais, beaucoup
trop maniéré pour donner à l'ensemble ne serait
ce qu'une vague idée de musique "tripale", plutôt
un amalgame de mimétisme physiques et musicaux piqués
ça et là, et fort heureusement plutôt aux bons
endroits.
Quelques petits courts métrages plus tard, la scène
est investie par les Buzzcocks ... hein ?? ah ben non c'est Graham
Coxon et sa bande qui débarquent ! Après avoir
quitté ses belles lunettes arty, Graham s'en donnera à
coeur joie. Il bondira, se roulera à terre, gesticulera dans
tous les sens sans jamais perdre une seconde le contrôle de
sa guitare déchainée pour un set époustouflant
de puissance.
Les morceaux déjà rock de son album deviennent carrément
punk et le show s'il est surprenant prouve que l'Angleterre n'est
pas encore enterrée musicalement... et accessoirement que
si Blur faisait du punk ce ne serait pas une mauvaise idée...
Graham remet ses lunettes et salue le public. Il a l'air heureux
d'être là, ça tombe bien, nous aussi et on en
aurait bien repris un peu mais...
...Quelques petits courts métrages plus tard c'est au tour
de dEUS de poursuivre et conclure cette
soirée à la Cigale. Heureux d'être ici et remerciant
le public d'être venu les voir si nombreux après une
si longue absence, Tom Barman nous présente
le nouveau bassiste et le groupe entame un excellent "Instant
Street".
On ne pouvait rêver meilleure introduction pour ce concert
qui s'avèrera largement le meilleur de la soirée,
avec un mélange de classiques (notamment une incroyable version
de "Theme from turnpike" )
et de nouveaux morceaux qui donnent un avant goût prometteur
du prochain album à paraitre au printemps 2005. Finie la
mélancolie, bonjour le gros son rock'n roll ! La cuvée
2005 de dEUS promet.
Un concert superbe tout en puissance maîtrisée mais
... alors que le groupe part en coulisse et que les roadies préparent
le matériels pour le rappel, un charmant monsieur de l'organisation
débarque sur scène et tire les rideaux, signifiant
que le concert est terminé et qu'il n'y a pas de temps pour
les rappels... Le public siffle et hue pendant de très très
longues minutes, tente de rouvrir les rideaux mais 2 gros bras de
la sécurités viennent jouer les cowboys ...
Quand le business rattrape la musique ... privé de rappel,
le public et dEUS repartiront sans doute avec un goût amer
dans la bouche, surtout que les 10 minutes de plaintes du public
auraient largement suffit à un rappel à l'issu duquel
tout le monde serait parti content...
Décidément, c'est sûr ! Ce festival là,
on ira pas l'an prochain !
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