L'histoire qui a conduit à la réalisation de l'album Violence with benefits des deux frangins de Narrow Terence, Antoine et Nicolas Puaux, est étonnante. Il y est question de mauvais garçons, de bagarre, de justice, de rencontre avec une chapelle et de rédemption par la musique. Récit de ce qui pourrait servir de trame pour un film d'Abel Ferrara mais avec des décors à la Pagnol.
Le nouvel album a mis du temps à sortir. Pouvez-vous nous en expliquer la genèse ? Et pourquoi avoir choisi de joindre un DVD à l'album ?
Nicolas Puaux : Il y a eu comme un nœud dans nos existences. Suite à une altercation avec un individu, nous avons joué les mauvais garçons. Nous avons été condamnés à des travaux d'utilité collective. Sur les lieux où nous avons effectué notre peine, il y a une chapelle, ce qui a une portée symbolique en terme de rédemption. C'est là que nous avons accouché de ce disque.
Lorsque nous avons su que nous allions être condamnés suite à cette bagarre et passer sous le régime des travaux d'intérêt général, nous nous sommes dit que c'était une histoire à raconter quelque part. Dans le DVD, nous voulions expliquer que nous avons réussi à sortir quelque chose du chaos dans lequel nous étions, que nous avons porté notre croix, plus que montrer les arrière-cuisines de la réalisation de l'album.
C'est pour nous un album de transition, un album apaisé. Nous réinvestissons d'anciennes chansons de manière acoustique pour les adapter au son de la chapelle. C'est aussi une manière de nous tourner vers l'avenir avec de nouvelles chansons.
Le titre de l'album est en rapport direct avec cette histoire.
Nicolas Puaux : On peut traduire "Violence with benefits" par "Violence qui paie". Mais ce n'est pas une apologie de la violence.
Antoine Puaux : Le cadre religieux qui a entouré la création de l'album donne un double-sens qui colle parfaitement à cette histoire.
L'histoire de la pochette est donc aussi liée à cette histoire ?
Nicolas Puaux : Bien entendu. On a un album et un documentaire. Le documentaire raconte notre chemin de croix, alors que l'enregistrement de l'album s'est déroulé sous le regard de Jésus-Christ. Donc montrer cette statue d'un prêtre avec un œil au beurre noir rappelait autant les conditions d'enregistrement que l'altercation qui nous avait menée jusqu'à ce lieu.
Comment s'est comporté le groupe durant cette période trouble ?
Nicolas Puaux : Antoine et moi sommes du sud de la France. Actuellement le groupe vit à Paris, mais notre attache dans le sud-est est claire. C'est d'ailleurs pour cela que nous avons pu effectuer notre condamnation dans ce coin de France. On avait tout un réseau dans les centres culturels de la région. On les a contactés et demandé s'ils pouvaient faire quelque chose de nous. On avait déjà travaillé avec les gens d'Apt dans le cadre d'un festival.
Antoine Puaux : Comme nous pouvions effectuer notre peine dans le domaine de la musique, ils étaient même ravis qu'on ait été condamné (rire). Ça a été certainement profitable pour les élèves de l'école de musique, mais ça l'a été pour nous aussi. Ça a été la plus belle manière de nous aider à remettre le pied à l'étrier.
Vous avez effectué votre peine à l'école de musique. Les élèves ont-ils collaboré à l'album ?
Nicolas Puaux : L'école de musique d'Apt est un ancien hôpital qui a été construit autour de la chapelle. C'est le coeur de l'école. En plus, nous avions des instruments à disposition à l'école. Sur le DVD, il y a des morceaux live interprétés en collaboration avec des élèves. Et peu après l'enregistrement, nous avons été reprogrammés par le festival d'Apt. C'est plus pour ce concert qu'on a travaillé avec eux, qu'on les a fait intervenir. Nous-même sommes intervenus sur des chansons à eux. L'échange a bien eu lieu.
Votre musique est cinématographique. Est-ce une source d'inspiration ?
Antoine Puaux : Pas vraiment. Cette impression provient d'abord des conditions d'enregistrement. On retourne encore une fois au fait que cette chapelle est au coeur des compositions et des arrangements. On l'entend résonner sur le disque. On entend le son des pierres.
Nicolas Puaux : C'est vrai, la chapelle est un personnage à part entière de l'album. C'est d'ailleurs pour cela que pour les dates de la tournée liée à cet album, on recherche d'abord des chapelles, ou au moins des endroits qui ont une âme, comme cela. De vieux théâtres, d'anciens cinémas.
Justement, votre pochette qui représente un prêtre avec un œil au beurre noir ne rend-elle pas difficiles vos démarches de prospection de lieux atypiques où jouer ?
Antoine Puaux : (rires) Il y a la première stratégie qui consiste à cacher la pochette lorsque nous rencontrons des gens d'église...
Nicolas Puaux : ... Et la seconde où on explique notre histoire et notre démarche. La chapelle, c'est le lieu de la rédemption par excellence. Mais la plupart du temps, ça reste des chapelles qui ont une importante activité culturelle, qui sont des lieux ouverts. C'est finalement plus facile de jouer à Saint-Eustache au coeur de Paris que dans une petite église de village.
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