Après avoir passé ses deux derniers albums à raconter des histoires comme autant de contes musicaux, Josh Ritter opère un retour sur lui-même avec son nouvel album The Beast in Its Tracks et parle de lui.
Le septième album de cet originaire de l’Idaho est un disque de rupture. Pas forcément de rupture musicale mais assurément de rupture sentimentale. Les albums de séparation ont pour eux d’être à forte teneur émotionnelle. Sans être forcément spectaculaires, ils ont une identité propre et contiennent souvent des allusions que seuls les intéressés peuvent décrypter. La question est donc de savoir à qui s’adressent ces quelques titres, l’auditeur pouvant de fait être placé dans une situation de voyeuriste pas forcément agréable.
Les treize chansons s’articulent autour de ses deux amours, passé et présent, en racontant la séparation d’avec sa compagne et chanteuse Dawn Landes, puis l’amour retrouvé. Plus ascète que son précédent effort, un dépouillement voulu et servant son propos, l’album contient autant de titres que de phases post-rupture.
Musicalement, on est donc dans du Josh Ritter sans édulcorant, un style forgé puis affiné depuis maintenant son premier album, il y a quatorze ans. La veine folk-country continue à être exploitée avec classe mais sans grande surprise. Le but recherché ici n’est sans doute pas l’originalité à tout prix. Rien de nouveau donc de prime abord, ses mélodies coulent toujours toutes seules et la guitare acoustique accompagne irrémédiablement sa voix chaude. Mais cette dernière doucereuse n’empêche pas de dire quelques gentillesses au passage. De ce fait, c’est au niveau des textes que s’opère le changement. Josh Ritter utilise le "je" pour raconter ses histoires intimes.
A l’instar de son précédent album, The Beast in Its Tracks s’ouvre sur une introduction d’une minute ("Third arm") qui plante ici clairement la thématique de l’album. Ainsi "A certain light" célèbre son nouvel amour en n’omettant la comparaison et "Hopeful" met les choses au point. Puis "New lover", sur un air presque gai, enfonce le clou et en bon homme blessé, l’américain dans un même couplet espère que son ex a retrouvé l’amour mais en même temps se réjouirait si ce n’était pas le cas. Suivent alors "Nightmares" qui lorgne du côté de Eels, "Bonfire" ouvertement country et "The Appleblossom rag" uniquement voix/guitare qui apparaît comme une comptine d’avant sommeil. Enfin "Joy to you baby", éclaircie lumineuse dans laquelle il trouve finalement l’apaisement précède le minimaliste "Lights" qui referme l’album en douceur, conclusion de son histoire, une fin étant toujours un nouveau début.
The Beast in Its Tracks est un album dont Josh Ritter avait sans doute besoin, une parenthèse dans sa discographie, résultant d’un besoin d’écrire et de transcrire ses émotions. Disque très personnel, trop peut-être pour l’auditeur sans pour autant que cela ne lui enlève aucunement ses qualités intrinsèques, il est évidemment hautement recommandable. Sensible exutoire, album thérapie pour oublier et s’apaiser. Chacun trouve son chemin pour surmonter, pour certains ça sera le dessin, le voyage, les mots et pour d’autres l’écriture de chansons... |