Avec la première rétrospective consacrée à "Jordaens, la Gloire d'Anvers" qui met en lumière d'un des maîtres de la peinture baroque flamande, le Petit Palais s'inscrit dans le peloton de tête des grandes expositions de la rentrée muséale 2013, tenant la dragée haute à son "grand" frère de l'avenue Einsehower.
Organisée sous le commissariat de Alexis Merle Du Bourg, historien d'art, et Maryline Assante di Panzillo, conservateur en chef au Petit Palais, l'exposition se déroule selon un parcours thématique lié aux différents registres picturaux.
Passionnante, foisonnante, imposante et truculente, elle bénéficie de surcroît d'une scénographie en majesté conçue par Iva Berthon Gajsak et Giovanna Comana, originale et excellente à visée didactique tant dans la structuration intrinsèque des espaces que dans le rythme scandé par des cabinets de dessins regroupant les oeuvres graphiques.
Jordaens : le Maître d'Anvers
Tout commence avec la ville natale de Jacob Jordaens qui ne la quitta guère et une salle
évoquant l'intérieur cossu des maisons flamandes de la bourgeoise d'affaires. Car Jacques Jordaens, né dans une famille d'artistes et de riches négociants, n'est pas un "artiste maudit".
Et à tout maître tout honneur, est mis en exergue l'autoportrait de l'artiste peint en compagnie de son épouse, de sa fille et d'une servante, toile dont un gros plan est retenu pour le visuel de l'affiche de l'exposition.
Tout aussi grandiose, la troisième salle consacrée à la peinture religieuse de Jordaens s'inspire de l'architecture de la nef d'église dont la ligne de fuite plonge sur une très belle crucifixion d'inspiration caravagesque ("Le Christ en croix").
Les peintures de dévotion sont toutes empreintes d'un réalisme sans hiératisme et témoignent du talent de coloriste de Jordaens ainsi que de son goût pour l'abondance ("Sainte Famille", "L'Adoration des bergers", Le sacrifice d"Isaac").
Et c'est avec cette abondance généreuse sous influence rubenienne qui se retrouve dans les peintures monumentales illustrant des thématiques mythologiques qu'il traite en toute liberté et dans lesquelles les opulents nus féminins ( "Les filles de Cérops") explosent sous le regard.
En revanche, Jordaens ne rivalise pas les deux autres grands du triumvirat flamand que sont Rubens et Van Dyck dans le registre du portrait et fort judicieusement se contente de portraits de famille et d'amis.
A la mi-temps du parcours, le visiteur découvre le point d'orgue de l'exposition avec la section consacrée à la peinture de genre et ses scènes de festivités - dont notamment les toiles de la série "Le Roi boit" - et l'illustration des proverbes qui conforte la réputation de Jordaens comme maître des "bambochades".
Car c'est dans la peinture de genre, à la fois excessive et ambigüe car il ne faut pas oublier la dimension du double regard, qui exalte les scènes de festivités paillardes que s'illustre Jordaens avec ses joyeuses tablées de personnages rubiconds en pleine libation.
L'exposition rappelle également l'importance de l'art de la tapisserie dans les Pays-Bas espagnols au 17ème siècle à laquelle a contribué Jordaens par sa production de cartonnier et elle s'achève avec un élégant et astucieux cabinet de curiosités à vocation pédagogique dont les tiroirs mobiles permettent au public de découvrir les arts, techniques et culture de l'époque. |