Les
concerts d’Ignatus, au Zèbre
en ce mois de décembre se présentent comme une grande
fête autour de la personne de Jérôme
Rousseau (alias Ignatus). Ce mercredi soir, Ignatus a invité
son poulain de l’écurie Ignatub : Jean
Luc le Tenia à assurer la première partie.
Pour ceux qui ne connaissent pas encore Jean Luc le Tenia il est
l’auteur de quatre cd’s dont le récent Le
meilleur chanteur français du monde où se bousculent
quelques quarante et un titres.
La découverte de Le Tenia sur scène est un véritable
choc ; rares sont les premières parties à la fois
marquantes et à ce point marrantes.
Il est 20h30, lorsqu’il se présente seul sur scène
armé d’une simple guitare acoustique. Il commence par
égrener un accord et demander au public si lui aussi entend
le larsen dans les graves. Le ton est donné ! Et ça
ne s’arrêtera pas avant la fin du concert.
Les chansons de Le ténia ne sont pas très sexy :
trois accords de ci, de là, des rimes improbables (tour rime
avec Youssou’n’dour) et un refrain pourri (aurélie
hi hi hi la la la la).
Il nous dépeint des petites scénettes de la vie courante
avec nonchalance et humour. Et le public est ravi. Mort de rire
mais ravi. Car c’est l’hilarité générale
dans la salle. L’interprétation accentue le comique
des mots, fait ressortir les défauts, les faiblesses. Mais
c’est là que réside le génie de Le Ténia.
Alors que le public rit comme un seul homme, il réussit
à faire passer des idées, des sentiments qui font
mouche. En se rendant lui-même un peu ridicule, il créé
un lien empathique avec le public, qui lui permet de décrire
la vie de monsieur tout le monde sans tomber dans le misérabilisme.
Un concert surprenant, drôle et vivifiant.
Le concert de Le Ténia terminé, le voile est enfin
levé sur les installations scéniques d’Ignatus.
En frontal de la scène, une série de poupées
assises sur un banc masquent un clavier. En arrière, on aperçoit
un mannequin de couturière portant une veste noire et blanche
dont on sait déjà qu’elle nous réserve
des surprises. Sur le côté droit, une guitare blanche
sans cordes mais avec poignées de portes et capteurs attend
d’être manoeuvrée pour révéler
samples et boucles.
Le groupe qui accompagne Ignatus sur scène est composé
de trois musiciens : un bassiste, un batteur, et un multi instrumentiste
assigné au cuivres.
Ce soir, Amour et Christian
Makouya viendront épauler l’homme au cœur
de boeuf dans un corps de nouille sur une poignée de chansons.
Le groupe nous restituera l’intégralité du dernier
opus d’Ignatus dans une ambiance décontractée.
Notre hôte parle beaucoup au public entre les chansons, présentant
avec humour ses morceaux, ses instruments et ses nouveaux projets.
Sur scène, on assiste à un véritable show
original et très personnel : Ignatus tape sur les poupées
pour déclencher des samples, joue de la guitare à
poignées et de la veste à capteurs pour démarrer
et trafiquer des sons. On est très loin du classique concert
pop-rock.
Le groupe, produit une trame solide sur laquelle Ignatus s’appuie
pour aller papillonner au gré des samples et autres riffs
de guitares à poignées et capteurs.
Mais Ignatus sait également revenir à une bonne vieille
guitare classique. Sa musique est à la croisée des
chemins, et sur scène cet étonnant mélange
de Jazz, d’électro, de rock acquièrt une remarquable
cohérence. C’est le jeu scénique qui donne à
l’ensemble sa cohésion, son sens. En le voyant sur
scène, on accède à une meilleure compréhension
de cet univers musical si inhabituel.
Cela
reste malgré tout de l’Ignatus : baroque, drôle,
loufoque, féroce. Cet homme possède visiblement un
amour sincère pour la musique, pour tous les genres de musiques,
pour les textes drôles et acides et les prestations décalées.
Il cherche à faire cohabiter toutes ses passions et ses amours.
Si l’ensemble paraît est parfois un peu insolite et
difficile d’accès, c’est qu’Ignatus recréé
sur scène un langage qui lui est propre, une forme d’expression
originale.
Ignatus est un artiste à part dans la scène musicale
française, et le public ne s’y trompe pas. Ravi de
cette étrange prestation, il en redemande. Alors Ignatus
revient lire un des ses textes en ultime rappel. Il nous livre une
fantaisie historico-enfantine où s’entrecroisent Jésus
Christ et Barbapapa.
Restez à l’écoute ; cet homme est fada et rien
ne l’arrête. |