Si le silence après du Mozart c'est encore du Mozart, Dieu merci le silence après du Merzbow ce n'en est plus...
De son vrai nom Masami Akita, ce musicien aussi bruitiste que prolifique a en effet sorti 350 disques depuis 1979 et est reconnu comme étant une figure majeure, incontournable et absolument culte de la noise. Selon le dictionnaire du petit reporter, il semblerait même que l'on appelle ce mouvement underground "la japanoise", qui est donc une musique débridée.
En termes de cuisine, Merzbow passe littéralement la musique telle qu'on la connaît (qu'importe le genre) au chinois pour en ressortir les élans les plus primitifs et chaotiques. Cela peut sembler casse-tête pour un être n'ayant jamais posé une oreille sur Metal Machine Music de Lou Reed, cette fameuse cacophonie avant-gardiste. Pourtant, il n'en est rien !
Rentrons dans le snobisme, mais soyons logique et cohérent. On ne peut définitivement pas résumer l'oeuvre de Merzbow à un capharnaüm ambulant et encore moins à de la musique d'ameublement.
Bref, du bruit pour les mauvaises langues. Non, derrière cette cathédrale sonore il y a un véritable travail d'orfèvre, de (dé)composition, de (dés)harmonie. Rien n'est décidé au hasard, même s'il y en a toujours eu dans la musique dite improvisée, la maîtrise est constante. De toute façon, comme dirait le principal intéressé : "Ce qui est agressif pour certains, peut être musical pour d'autres..." et puis, Merzbow ne serait-il pas avant tout l'un des précurseurs de la musique éléctro ? Qui s'intitulait dans les années 70 la guerilla éléctronique ?
Très certainement. D'ailleurs, à ce sujet il n'est pas surprenant qu'il ait travaillé avec Richard Pinhas, véritable pionnier français du genre avec le groupe Heldon. Leur album Keio Line est plus que recommandable et une belle porte d'entrée pour ces deux artistes singuliers.
Revenons à l'Aéronef, où finalement l'expérience Merzbow se vit plus qu'elle ne s'écoute. Le travail sur les infrabasses est remarquable et structure le tout. Le concert est une pièce improvisée de cinquante minutes. Le son est d'une puissance rare, un Boeing qui décolle non-stop. Ce fut une performance. Un concert méta, physique et métaphysique, d'une musique du corps et d'au-delà. Une véritable expérience dont il serait bête de se priver.
En première partie, on retrouvait Murmur Metal, projet expérimental de David Bausseron, pour un set aussi strident que lancinant, qui se terminera en apothéose grâce à une configuration intelligente. En effet, le performeur sciera littéralement une cage à oiseau dans laquelle résonne une guitare posée sur un pied en croix. Autre moment anthologique particulièrement bruitiste, le coup du capteur passé à tabac sur une rape à fromage.
A découvrir, en live bien évidemment, les enregistrements de ce genre de performance étant pour la plupart emblématiques. |