Comédie de Fabrice Donnio, mise en scène de Arthur Jugnot et David Roussel, avec Guillaume Bouchède, Alain Bouzigues, Fabrice Donnio et Marie Montoya.
"Une chance inestimable", premier opus d'auteur de Fabrice Donnio, acteur versé dans le café-théâtre et one man show, constitue une inattendue et bonne surprise dans le paysage souvent indigent et lénifiant de la comédie de divertissement inféodée au comique appuyé pour le rire à tout prix.
Et ce, d'autant que, n'ayant pas choisi la classique et bien balisée comédie de moeurs, il place haute la barre en le qualifiant, dans sa note d'intention, de comédie de science-fiction ressortissant tant au huis-clos sartrien sous acide qu'à la farce fantastique qu'il développe autour d'une thématique peu usitée, et qui, a priori, ne déclenche l'hilarité, celle du suicide.
Usant de cette thématique comme véhicule pour aborder, sans prétention philosophique mais néanmoins de manière sagace et résolument humoristique, différentes attitudes face aux épreuves de la vie, il a écrit une pièce bien ficelée dans le registre de l'absurde et de l'humour noir avec des dialogues corsés qui font mouche.
Alors qu'il s'apprête à mettre fins à ses jours par pendaison, le temps s'arrête pour Kirian et débarquent dans son appartement trois émanations fantomatiques, en l'occurrence des suicidés célèbres, chargés d'intervenir auprès des futurs suicidés pour les en dissuader ce qui, en cas de réussite, leur permet l'obtention des points nécessaires pour quitter les limbes dans lesquelles ils sont confinés.
Et Fabrice Donnio n'a pas eu froid aux yeux en choisissant des figures historiques dont Cléopâtre et Gérard de Nerval et surtout Hitler, dont la confrontation se traduit par des scènes aussi loufoques qu'hilarantes.
Dans une scénographie sobre de Sarah Bazennerye, nonobstant la présence d'un dispensable pantin pendu, la partition est efficacement mise en scène par Arthur Jugnot et David Roussel qui ont trouvé le juste dosage comique et soutenue par une interprétation
Outre Fabrice Donnio, juste dans l'ébahissement sidéré du candidat au suicide, la distribution comporte un trio de choc composé de comédiens aguerris tant à la scène qu'aux registres décalés.
Marie Montoya incarne une reine d'Egypte aussi pulpeuse que survoltée par plusieurs siècles de libido inassouvie et au franc parler décapant et Guillaume Bouchède use de son flegme droopien et de son habile propension à partir en vrille au quart de tour pour camper le poète délirant.
Mention spéciale à Alain Bouzigues pour sa magistrale et édifiante composition d'un Fuhrer furieux, dont l'auteur a fait un personnage fantoche doté d'un certain sens de l'humour, sans verser dans la caricature outrancière.
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