Réalisé par Damián Szifron. Argentine/Espagne. Comédie dramatique. 2h02 (Sortie le 14 janvier 2015). Avec Ricardo Darín, Oscar Martinez, Leonardo Sbaraglia, Erica Rivas, Dario Grandinetti, Julieta Zylberberg et María Marull.

Avec "Les Nouveaux Sauvages", le scénariste et réalisateur argentin Damián Szifron, adoubé par Pedro Almodovar, signe un film à skteches, genre aujourd'hui délaissé qui connut son heure de gloire durant les années 1960-1970, dont le titre renvoie de manière patente les cinéphiles aux "Nouveaux Monstres" de Dino Risi, Mario Monicelli et Ettore Scola.

Toutefois ce n'est pas la satire des institutions qui l'inspire mais les individus pour qui la vengeance constitue la seule réponse possible à une situation de détresse émotionnelle, même celle suscitée par un fait d'une bêtise insondable, et qui, faisant abstraction du libre arbitre, sont le jouet de pulsions archaïques incontrolées qui peuvent les conduire à la barbarie.

Damián Szifron ne s'impose aucune limite et c'est avec une belle délectation et un humour noir radical qu'il présente son petit jeu de massacre illustré par six histoires courtes monstrueusement jubilatoires au cours desquelles l'humiliation, la trahison ou , sans oublier les blessures d'amour propre, entraînent un dérèglement de l'humeur qui peut confiner à la folie en passant par la sauvagerie et la destruction.

La charge est féroce, d'une lucidité qui frôle le cynisme, et Damián Szifron épingle la méchanceté, la bêtise et la rapacité humaine avec un humour ravageur qui taille dans le vif façon Hara-Kiri qui n'est pas forcément fédérateur.

De similaire facture, les opus constituent un ensemble cohérent et sont tous réussis même si la maelstromique mécanique comique trouve son acmé dans l'apocalyptique et cartoonesque duel à mort version "capitalisme no pasara" de deux automobilistes bornés avec les truculents Leonardo Sbaraglia et Walter Donado et le mariage bon chic bon genre qui finit en pugilat mené par l'époustouflante Erica Rivas.

Ce dernier épisode, même s'il s'achève par un happy end, laisse un petit goût amer car la question de l'argent, qui est bel et bien présente dans certains des autres sketches, ne semble pas tout à fait étrangère à l'opportune réconciliation.