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Deniz Gamze Ergüven  juin 2015

Réalisé par Deniz Gamze Ergüven. Turquie/France/Allemagne. Drame. 1h27 (Sortie le 17 juin 2015). Avec Güneş Nezihe Şensoy, Lale Doğa Zeynep Doğuşlu, Elit İşcan, İlayda Akdoğa , Nihal Koldaş, Ayberk Pekcan et Bahar Kerimoğlu.

A travers l'histoire et le destin de cinq soeurs, "Mustang" réalisé par Deniz Gamze Ergüven aborde la discrimination sexiste et l'oppression des femmes qui existe encore dans certains pays ou enclaves sociales.

Alors certes, le film est ancré en Turquie, État républicain, nationaliste, populiste, étatiste, laïque et réformateur dans lequel le dénigrement des valeurs religieuses de la population presque exclusivement de confession musulmane constitue une infraction pénale, mais le scénario co-écrit avec la scénariste et réalisatrice française Alice Winocour se garde bien de prêter le flanc à une éventuelle critique d'anti-islamisme primaire.

En effet, à aucun moment les situations, qui sont dépourvues de tout psychologisme et reposent sur uniquement sur le factuel, ni les dialogues qui ne s'aventurent jamais sur un discours réflexif, ne mettent en scène le fait religieux. Il est procédé de manière non seulement plus habile mais également plus efficace.

D'autant que l'oppression féminine, liée souvent à la sexualisation du corps féminin - la femme étant une créature du diable qu'il convient d'ostraciser et de juguler, son corps l'émanation d'une nature essentiellement vicieuse, et sa vue une provocation permanente pour exciter le désir des hommes alors qu'elle n'est qu'un miroir réfléchissant leur propre concupiscence, n'est pas l'apanage de certains états ou civilisations et a existé dans toutes les sociétés, toutes les époques et sous toutes les latitudes.

En premier lieu, le drame se déroule dans un village relativement progressiste et le zélé délateur des jeux entre adolescents des deux sexes n'est pas une instance quelle qu'elle soit mais un individu, et pas n'importe quel individu, mais une femme.

Celle-ci, équivalente de la grenouille de bénitier voyant le mal partout, et sans doute frustrée devant cette provocante et éblouissante jeunesse et la promesse d'une vie et d'un bonheur qui lui ont été refusés, et, avec pour le chef opérateur David Chizallet, Deniz Gamze Ergüven livre, portées par la musique du compositeur australien Warren Ellis, membre du groupe Dirty Three et des Bads Seeds qui accompagnent Nick Cave, de belles scènes solaires captant cette joie de vivre et de cette beauté si particulière et éphémère de l'adolescence et la tendresse de la sororité.

Immédiatement, elle se dresse en gardienne de l'ordre moral et ne se contente pas de dire mais accuse, condamne et colporte sa sentence : les cinq soeurs sont des dévergondées et des vicieuses.

Le ver est dans le fruit. Son jugement devient l'opinion du village, belle illustration du paradoxe d'Olson, qui estime obscène leur comportement, ce qui couvre d'opprobre leur famille, leur nom, et pis encore, l'honneur de l'homme, honneur qui réside dans le corps des femmes, beau paradoxe pour un corps considéré comme un sexe pernicieux.

Pour mettre un terme à cette dérive, les mesures prises ne sont ni décidées ni imposées par une autorité laïque ou une instance religieuse, mais par la famille elle-même, de sa propre initiative.

Et plus précisément par un homme, en l'occurrence, comme elles sont orphelines, l'homme de la maison, un oncle qui vit avec leur grand-mère tutrice, un homme célibataire dans la force de l'âge dont personne ne s'inquiète de la présence au sein d'un tel gynécée, et dont le sens de l'honneur ne va pas jusqu'à lui interdire la pratique de l'inceste.

Conçu en grande partie comme un huis-clos (sic), le film retrace de manière quasi méthodique le processus attentatoire d'abus de pouvoir sur mineures, universel et intemporel, qui commence par la déscolarisation et l'absence d'apprentissage d'un métier afin d'exclure tout développement de la pensée critique et d'éviter toute velléité d'autonomie et d'indépendance complété par la clôture, depuis l'assignation à domicile avec fermeture des portes à l'édification de murs d'enceinte et l'apposition de grille aux fenêtres dont l'acmé est le mariage forcé pendant la minorité.

Ce qui n'est pas sans évoquer l'enfermement au couvent des filles des bonnes familles notamment dans la France de l'Ancien Régime et le puritanisme des pays rigoristes du Nord de l'Europe au 19ème siècle, pour ne citer que ces exemples occidentaux.

Ensuite, "Mustang" montre l'effet pervers d'un système construit par les hommesdont la mise en pratique est perpétuée par les femmes : les femmes maintenant la sexuation sociale en formant les filles à la culture essentiellement domestique, le mariage étant le seul avenir de la femme, les femmes marieuses, les femmes érigées en gardiennes du temple et et geôlières de leurs filles.

Les différentes manifestations de détresse, la résignation pour l'une, le comportement auto-destructeur pour la troisième, la joie de l'ainée qui a "la chance" d'épouser son amoureux mais qui va déchanter, voir la scène des funérailles où elle apparaît à l'identique avec sa puînée, éteinte, mal fagotée, et ressemblant, n'était le foulard qui se substitue à la perruque, à une épouse

Seule la cadette s'inscrit dans une dynamique de rébellion et va faire de la maison devenue prison va devenir un camp retranché - si personne ne peut sortir, personne ne peut entrer - pour mettre en oeuvre la fuite dont elle sait qu'elle constitue la seule échappatoire.

D'aucuns établissent, à tort, un parallèle, voir davantage, avec "Virgin Suicides" réalisé en 1999 par Sofia Coppola, qui résulte non d'un scénario original mais de l'adaptation du roman éponyme de Jeffrey Eugenides, dont, outre l'approche formelle, la problématique est totalement différente puisque qu'opposée : l'isolement n'est pas "justifié" pour la gent féminine considérée comme facteur de trouble et de désordre dans une société patriarcale et machiste mais par le souci paranoïaque de soustraire les jeunes filles à l'influence d'une société démocratique immorale.

Dans "Mustang", aucune figure ni pratique religieuse n'est montrée ce qui aboutit un sombre constat qui tient à l'enracinement des croyances, us et coutumes même chez les opprimés qui reproduisent des schémas ancestraux (la grand-mère disant à sa petite fille qu'elle peut bien subir ce qu'elle a subi, que ce n'est pas si terrible et qu'on s'y habitue) et, autre illustration du paradoxe d'Olson, la majorité, en l'espèce asservie, ne réagit pas. Il faudrait une minorité rebelle et agissante, or, celle qui se manifeste est tout sauf progressiste.

Cela étant, le film se clôt sur une note d'espoir, une échappée belle vers la liberté, certes individuelle, patiemment élaborée par une encore enfant, ce beau mustang qu'est la cadette, interprétée par la prometteuse Günes Nezihe Sensoy.

 

 

 

MM         
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