Monologue dramatique de Peter Turrini interprété par Jean-Quentin Châtelain dans une mise en scène de Claude Brozzoni.
L'écrivain et dramaturge autrichien Peter Turrini livre avec "C'est la vie", à laquelle le titre "C'est ma vie" serait davantage approprié, une partition autobiographique monologale intimiste.
Sont plus particulièrement évoqués les souvenirs d'enfance fondateurs de sa personnalité, tels l'ambivalence parentale, la main qui caresse et qui punit, les complexes du petit gros timide qui préfère rêver l'amour et la xénophobie ambiante dans le Tyrol où naît en 1944 ce fils d'émigrés italiens qui n'ont pas leur place à la table des habitués du village.
Pour apprécier la transposition scénique proposée par Claude Brozzoni, pour laquelle il a complété le texte original d'inserts poétiques et lui a superposé un omniprésent habillage musical, deux conditions sont nécessaires et indispensables.
D'une part, apprécier la qualité de jeu et la scansion atypique du comédien Jean-Quentin Châtelain, celui qui dit "pratiquer le monologue comme un derviche tourneur", colosse aux pieds d'argile avec sa présence physique très terrienne contrastant avec son interprétation sublimée, qui investit et vampirisent les textes pour les proférer de manière, et selon la sensibilité de chacun, investie, habitée, incarnée, illuminée ou hallucinée.
D'autre part, et surtout, avoir, outre une résistance confirmée aux acouphènes, la nostalgie de la musique allemande des années 1980, plus précisément l'electro de Kraftwerk et l'electro-industriel à la Einstürzende Neubauten. Car, Grégory Dargent et Claude Gomez dispensent de manière quasi ininterrompue une composition musicale non seulement très largement datée, et dont l'adéquation avec le propos laisse sceptique, mais, en sus, d'une intensité sonore assourdissante.
Et, insupportable sur la durée d'une heure et demie avec de surcroît riffs stridents et beat de rave party délivrés dans une petite salle qui n'est pas dédiée aux concerts, tout comme la morbidité qui préside à la projection d'images de mort et de charniers de l'Holocauste pour rappeler la mauvaise conscience autrichienne, elle engloutit la partition textuelle comme elle submerge la voix du comédien alors même que celle-ci est amplifiée par l'usage du micro.
Alors, pour la présence magnétique de Jean-Quentin Châtelain... |