Musique sep Théâtre sep Expos sep Cinéma sep Lecture sep Bien Vivre
  Galerie Photos sep Nos Podcasts sep Twitch
 
recherche
recherche
Activer la recherche avancée
Accueil
 
puce puce
puce Je me mets au milieu mais laissez-moi dormir
Théâtre du Rond-Point  (Paris)  janvier 2016

Comédie dramatique d’après un film de Jean Eustache, mise en scène de Dorian Rossel, avec David Gobet, Dominique Gubser et Anne Steffens.

Après avoir proposé au Monfort, il y a quelques semaines, une version très ramassée d'"Oblomov", le roman d'Ivan Gontcharov, Dorian Rossel renouvelle l'expérience de l'adaptation théâtrale d'un texte majeur, en l'occurrence le scénario de "La Maman et la Putain" de Jean Eustache.

Le film, hors normes, durait près de quatre heures et ceux qui l'ont vu se souviennent qu'on avait l'impression d'un flot constant de mots, essentiellement prononcés par Alexandre, le personnage central qui oscillait entre Marie et Veronika, entre la "maman" et la "putain". De temps en temps, la logorrhée verbale était interrompu par un disque qui passait souvent dans son intégralité.

Damian Rossel a choisi de respecter le dispositif d'Eustache, contrairement à Julie Duclos dans "Nos Serments", qu'on a pu voir la Colline au début de l'année dernière, qui préférait l'improvisation au texte de "La Maman et la Putain" et la vidéo à l'électrophone. Chez Rossel, il y a donc bien de bons vieux 33 tours qui grésillent et l'action se situe au début des années 1970.

Mais cette adaptation "Reader's Digest", si elle respecte le texte et le contexte, perd beaucoup en sens. Car Eustache n'est pas, contrairement à ce qu'on pourrait croire ici, un rejeton de la "Nouvelle Vague". Pour lui, et son alter ego Alexandre, parler, traîner dans les cafés, boire trop de whisky, c'est exprimer ses états d'âme et son dégoût révolutionnaire de la société post-soixante-huitard.

Il n'est nullement question, dans le portrait de ce parasite volontaire, de cet artiste qui ne crée pas au point de paraître un mythomane, de dresser le portrait d'une génération. Alexandre est un individu singulier, et si son malaise existentiel a des correspondances avec celui de ses semblables, il se vit avant tout comme un dandy germanopratin qui traîne entre le Flore et les Deux Magots.

A l'ère où la jeunesse montrée au théâtre tangue souvent entre le pôle emploi et l'intermittence du spectacle, il est bien difficile à Dorian Rossel et à Julie Duclos de comprendre Alexandre et a fortiori de le faire comprendre à ses spectateurs. Comme Oblomov, il tranche des autres parce qu'il fait de la paresse et de la lenteur des vertus cardinales.

En "accélérant" son débit, au point de loger quatre heures de discours en une heure trente, Dorian Rossel commet un gros contresens et d'abord celui de donner la vedette au personnage de Véronika, l'infirmière, incarnant le réel, le trivial.

Evidemment, son discours paraît plus fort que les élucubrations d'Alexandre, et garde aujourd'hui toute sa force. Mais, si l'on revoit le film, on s'apercevra que cette force n'est que le contrepoint de ce que dit Alexandre dont le discours prend une toute autre nature quand il n'est pas un bout à bout linéaire, mais s'entrechoque avec les scènes diverses du film.

Pour qui n'a pas une grande connaissance de l'oeuvre d'Eustache, hélas introuvable en DVD, ce qu'en fait Dorian Rossel aura le grand mérite de leur donner envie d'en savoir plus. La performance d'Anne Steffens dans le rôle de Véronika les marquera forcément et ils apprécieront le jeu en demi-teinte de Dominique Gubser, qui doit faire vivre Marie après Bernadette Lafont et qui ne bénéficie pas d'une grande exposition scénique.

Quant à David Gobet, il tire Alexandre vers Antoine Doisnel, profite avec gourmandise de l'effet "mots d'auteur" que donne le resserrement du texte. Si l'on ignore que Jean-Pierre Léaud était chez Eustache tout le contraire de ce qu'il était chez Truffaut, on ne se plaindra pas en écoutant ce texte d'une grande beauté littéraire.

Si, malheureusement, on a l'âge d'avoir connu les années 1970, on sera plus critique. Dès le premier disque posé sur le pick-up, on pourra avoir le poil hérissé : jamais, au grand jamais, Alexandre n'aurait écouté le douteux Maurice Chevalier. Pas plus que le mièvre Christophe et ses mots bleus. Comme Fassbinder, à qui on devrait se référer en l'adaptant au théâtre, Eustache aimait les voix féminines tragiques pas celle de "Prosper yop la boum".

"Je me mets au milieu mais laissez-moi dormir" rate aussi toute la noirceur poétique d'Eustache, et c'est fort dommage pour explorer une œuvre qui conserve encore de nombreux mystères.

 

Philippe Person         
deco
Nouveau Actualités Voir aussi Contact
deco
decodeco
• A lire aussi sur Froggy's Delight :

Pas d'autres articles sur le même sujet


# 21 avril 2024 : Des beaux disques, des beaux spectacles, une belle semaine

On fait le plein de découvertes cette semaine avec des tas de choses très différentes mais toujours passionnantes. Pensez à nous soutenir en suivant nos réseaux sociaux et nos chaines Youtube et Twitch.

Du côté de la musique :

"Génération (tome 1)" de Ambre
"Out" de Fishtalk
"Take a look at the sea" de Fontanarosa
"Venus rising" de Trio SR9 & Kyrie Kristmanson
"Perpétuel" de Vesperine
"Liminal status" de Watertank
"The great calm" de Whispering Sons
"Keep it simple" de Yann Jankielewicz , Josh Dion & Jason Lindner
Quelques nouveautés en clips avec Isolation, Resto Basket, Greyborn, Bad Juice, Last Temptation, One Rusty Band, We Hate You Please Die
nouvel épisode du Morceau Caché, consacré à Portishead
et toujours :
"Kit de survie en milieu hostile" de Betrand Betsch

"Let the monster fall" de Thomas de Pourquery
"Etat sauvage" de Chaton Laveur
"Embers of protest" de Burning Heads
"Sin miedo" de Chu Chi Cha
"Louis Beydts : Mélodies & songs" de Cyrille Dubois & Tristan Raës
"Arnold Schönberg : Pierrot lunaire" de Jessica Martin Maresco, Ensemble Op.Cit & Guillaume Bourgogne
"C'est pas Blanche-neige ni Cendrillon" de Madame Robert
"Brothers and sisters" de Michelle David & True Tones
"Prokofiev" de Nikita Mndoyants
"Alas" de Patrick Langot, Alexis Cardenas, Orchestre de Lutetia & Alejandro Sandler
"Symptom of decline" de The Black Enderkid
"Tigers blood" de Waxahatchee
"Not good enough" de Wizard

Au théâtre :

les nouveautés :

"Sonate d'automne" au Théâtre Studio Hébertot
"Frida" au Théâtre de la Manufacture des Abbesses

"Preuve d'amour" au Théâtre du Guichet Montparnasse
"Après les ruines" au théâtre La Comète de Chalons En Champagne
"Objets inanimés, avez-vous donc une âme ?" au Théâtre du Guichet Montparnasse
"Royan, la professeure de français" au Théâtre de Paris
Notes de départs" au Théâtre Poche Montparnasse
"Les chatouilles" au Théâtre de l'Atelier
"Tant que nos coeurs flamboient" au Théâtre Essaïon
et toujours :
"Come Bach" au Théâtre Le Lucernaire
"Enfance" au Théâtre Poche Montparnasse
"Lîle des esclaves" au Théâtre Le Lucernaire
"La forme des choses" au Théâtre La Flèche
"Partie" au Théâtre Silvia Monfort
"Punk.e.s" Au Théâtre La Scala
"Hedwig and the angry inch" au théâtre La Scala
"Je voudrais pas crever avant d'avoir connu" au Théâtre Essaïon
"Les crabes" au Théâtre La Scala
"Gosse de riche" au Théâtre Athénée Louis Jouvet
"L'abolition des privilèges" au Théâtre 13
"Lisbeth's" au Théâtre de la Manufacture des Abbesses
des reprises :
"Macbeth" au Théâtre Essaion
"Le chef d'oeuvre inconnu" au Théâtre Essaion
"Darius" au Théâtre Le Lucernaire
"Rimbaud cavalcades" au Théâtre Essaion
"La peur" au Théâtre La Scala

Une exposition à la Halle Saint Pierre : "L'esprit Singulier"

Du cinéma avec :

"Le déserteur" de Dani Rosenberg
"Marilu" de Sandrine Dumas
"Que notre joie demeure" de Cheyenne-Marie Carron
zt toujours :
"Amal" de Jawad Rhalib
"L'île" de Damien Manivel
"Le naméssime" de Xavier Bélony Mussel
"Yurt" de Nehir Tuna
"Le squelette de Madame Morales" de Rogelio A. Gonzalez

Lecture avec :

"Hervé le Corre, mélancolie révolutionnaire" de Yvan Robin
"Dans le battant des lames"' de Vincent Constantin
"L'heure du retour" de Christopher M. Wood
"Prendre son souffle" de Geneviève Jannelle
et toujours :
"L'origine des larmes" de Jean-Paul Dubois
"Mort d'un libraire" de Alice Slater
"Mykonos" de Olga Duhamel-Noyer
"Des gens drôles" de Lucile Commeaux, Adrien Dénouette, Quentin Mével, Guillaume Orignac & Théo Ribeton
"L'empire britanique en guerre" de Benoît Rondeau
"La république des imposteurs" de Eric Branca
"L'absence selon Camille" de Benjamin Fogel
"Sub Pop, des losers à la conquête du monde" de Jonathan Lopez
"Au nord de la frontière" de R.J. Ellory
"Anna 0" de Matthew Blake
"La sainte paix" de André Marois
"Récifs" de Romesh Gunesekera

Et toute la semaine des émissions en direct et en replay sur notre chaine TWITCH

Bonne lecture, bonne culture, et à la semaine prochaine.

           
twitch.com/froggysdelight | www.tasteofindie.com   bleu rouge vert métal
 
© froggy's delight 2008
Recherche Avancée Fermer la fenêtre
Rechercher
par mots clés :
Titres  Chroniques
  0 résultat(s) trouvé(s)

Album=Concert=Interview=Oldies but Goodies= Livre=Dossier=Spectacle=Film=