Comédie de Marivaux, mise en scène de Salomé Villiers, avec Salomé Villiers, Raphaëlle Lehmann, Philippe Perrussel, Bertarnd Mounier, François Nambot et Etienne Launay.
Voir ou revoir "Le jeu de l'amour et du hasard" ne peut jamais faire de mal. Surtout quand la version proposée respecte le texte de Marivaux et lui donne un écrin moderne sans le dénaturer.
C'est dans un jardin avec un belle pelouse que se dérouleront à un bon rythme les marivaudages mis en scène par Salomé Villiers. Sur un linge étendu en son milieu, passeront opportunément des vidéos chargées de faire les intermèdes entre les actes.
Agrémentés de musique pop, ces petits moments "off" n'auront pas les fâcheuses conséquences habituelles de l'usage de la vidéo au théâtre. Car Léo Parmentier a tourné des saynètes muettes rigolotes qui ne perturbent pas, bien au contraire, la mise en scène enlevée de Salomé Villiers, par ailleurs très convaincante en Silvia et qu'on doit félicite pour sa compréhension de Marivaux.
En effet, elle a su retranscrire tout ce qu'il y a derrière ce jeu apparemment anodin de l'amour. Sans aller jusqu'à la thèse marxiste ou à la théorie à la Bourdieu, elle montre que l'inversion des rangs sociaux entre les maîtres et les domestiques n'est pas une opération à somme nulle, comme pourrait le suggérer le "tout est bien qui finit bien" précédant les applaudissements.
Raphaëlle Lemann en Lisette et Etienne Launay en Arlequin ont l'abattage attendu et y joignent une part de colère rentrée quand la farce est terminée. Les deux complices de la manipulation, Philippe Perrussel en Orgon, et Bertrand Mounier, jouant son fils Mario, sont sur un registre plus léger, croyant que tout ça n'est que jeu et sont peut-être les ascendants de futurs guillotinés.
Quant à François Nambot, que l'on peut voir également à son avantage dans le film "Théo & Hugo dans le même bateau", il est un Dorante un peu déboussolé, un peu emprunté, qui est peut-être le seul dans le clan des maîtres à comprendre les dangers de cet apparent petit jeu sans conséquences.
On appréciera donc la cohésion de toute la troupe et surtout sa capacité à faire ressortir la belle langue de Marivaux et la subtilité de ses dialogues tac-au-tac. Peut-être que le travail de Salomé Villiers perd un peu de force quand vient le temps des explications des uns et des autres qui s'effectuent de façon trop statique dans le jardin. Mais ce léger "coup de mou" avant le final est sans conséquence.
Salomé Villiers a bien servi et compris Marivaux et donne au public l'occasion de le redécouvrir avec un vrai et grand plaisir. |