Spectacle marionnettique inspiré de textes de Charles Baudelaire, mis en scène par Hendrik Mannes, avec Michael Vogel et Charlotte Wilde. Inspirés par les poèmes en prose de Charles Baudelaire publiés dans le recueil posthume "Le Spleen de Paris", le binôme, formé par le marionnettiste Michael Vogel et la musicienne Charlotte Wilde, fondateur de la compagnie Figurentheater Wilde & Vogel, a créé, sous la houlette de Hendrik Mannes à la mise en scène, un spectacle marionnettique exceptionnel tant par ses qualités esthétiques et la maîtrise subtile et sensible de la manipulation que par son impact émotionnel. Aussi "Spleen" s'avère-t-il une pure merveille d'autant que l'officiant n'est pas un marionnettiste qui, de manière factice, se dissimule pour laisser accroire à la magie du pantin. En effet, Michael Vogel procède à vue comme médium qui éveille les créatures endormies et disparues qui peuplaient l'âme du poète et engage un dialogue par le geste. Et, de surcroît, il incarne un personnage intradiégétique ce qui entraîne une pluralité de figures et une superposition de masques quand le personnage est lui-même investi par la créature ultime qu'est la femme. Par ailleurs la musique délivrée en direct par Charlotte Wilde ne s'inscrit jamais dans le registre de l'illustration ou de l'accompagnement superfétatoire ou supplétif s'agissant d'un spectacle sans paroles autres que celles d'inserts en voix off de certains opus baudelairiens lus par des enfants. Guitare et violon samplés, comme les chants en solo ou en duo, concourent à la constitution d'un voix musicale totalement intégrée à la partition. Sur un no man's land couleur de sable, tout commence avec un petit tas monochrome. Les spectateurs les plus perspicaces reconnaîtront un ossuaire dont l'homme va exhumer les restes d'un violoniste et délivrer l'âme pour une ultime sarabande. Un magnifique moment qui en introduit bien d'autres dont la primeur doit être laissée au spectateur. Quelques indices toutefois, ceux du pas de deux érotique avec la femme-grenouille et de l'union amoureuse avec la femme-lune chères à Baudelaire, et un exercice de haute volée avec la manipulation de trois émanations hallucinatoires provoquées par l'absinthe, faux remède au spleen qui conduit à la mort. Du grand art. |