Réalisé par Pan Nalin. Inde/Allemagne. Comédie dramatique. 1h43 (Sortie le 27 juillet 2016). Avec Amrit Maghera, Rajshri Deshpande, Pavleen Gujral, Anushka Manchanda, Sandhya Mridul, Sarah-Jane Dias, Tannishtha Chatterjee et Adil Hussain.
"Déesses indiennes en colère" de Pan Nalin constitue une curiosité à plus d'un titre et en premier lieu au regard de la production cinématographique indienne, puis par sa thématique.
Pour évoquer la condition des femmes dans un pays considéré comme l'un des plus dangereux pour les femmes, celles-ci payant un lourd tribu au machisme et au patriarcat traditionnels (marchandisation avec le système de la dot, mariage forcé, assassinat de l’épouse en cas de dot incomplète, polyandrie imposée, immolation des veuves, infanticide, abandon et maltraitance infligés aux bébés filles, avortement sélectif des foetus de sexe féminin et violences sexuelles) et notamment ces dernières, le réalisateur indien a fait des choix, tant pour le registre que pour les personnages, qui laissent perplexes.
En effet, ressortant à la comédie girly sur le mode du "buddy movie" au féminin, la quasi-totalité de l'opus met en scène des jeunes femmes belles et émancipées issues de la classe aisée, qui ont été à l'université, dispensées de l'obligation du mariage social et économique et exercent une activité professionnelle valorisante, de l'executive woman aux artistes, réunies pour célébrer l'enterrement de vie de jeune fille de l'une d'elles qui s'apprête à un mariage peu conventionnel.
Elles meublent leur oisiveté du moment par les "pia-pia" de filles et l'évocation de leurs désagréments pseudo-existentiels de pauvres petites filles riches, qui ne suscitent ni intérêt ni empathie, certes pas militantes, et dont le féminisme se limite à leur pré-carré. Ces "drôles de dames" figurant sur l'affiche sont bien étrangères au Gang en saris roses.
Pour elles, la modernité et la liberté dont elles disposent visent essentiellement à une occidentalisation par l'anglicisation de leur prénom, ce qui est étonnant en raison de la domination anglaise pendant deux siècles, et à troquer le sari pour la panoplie californienne T-shirt /jeans troué ou mini short
Guère représentatives de la femme indienne, elles ne sont, par ailleurs, ni féministes, ni même womanistes, et conservent un préjugé de classe supérieure pour qui une bonne reste une bonne.
Et pour affronter les quolibets plébéiens, quand elles traversent en trombe les villages côtiers, elles en appellent non à la déesse-mère et combattante Durgâ mais à la féroce et destructrice Kali qui, sans doute les inspirera, quand survient le drame. Car elles ne réagissent non pas de manière politique mais émotionnelle par la pratique de la vengeance punitive et de la justice expéditive.
Cela étant, Pan Nalin montre une belle figure de femme résistante et combattante, celle de la servante qui lutte avec ses petits moyens mais une farouche détemination, et signe une scène finale à couper le souffle. |