Réalisé par Michael Moore. Etats Unis. Documentaire. 2h00 (Sortie le 14 septembre 2016).
Casquette de base-ball sur la tête, drapeau américain en mains, surcharge pondérable au ventre, voilà Michael Moore de nouveau en croisade...
Et, comme toujours, c'est pour le bien de ses concitoyens qu'il va courir le monde pour annexer partout ailleurs ce qui manque à la première puissance mondiale pour asseoir davantage son leadership sur la planète.
Avec "Where to invade next" de Michael Moore, il ne faut pas s'attendre à une analyse fine et mesurée, à des arguments pesés et soupesés, à des thèses auxquelles répondent des antithèses. Le trait sera aussi gros et approximatif qu'un reportage télé d'une chaîne mondialisée appartenant à un grand groupe capitaliste.
Mais les biais de Michael Moore ont l'avantage de ne pas chercher à manipuler ses spectateurs, ou, tout au moins, de le faire en rigolant avec une mauvaise foi salutaire.
Quand il vient en France pour y louer les cantines scolaires en s'appuyant sur un expérience pilote où les enfants ont l'air d'être des gourmets dans un restaurant gastronomique, on ne peut qu'être hilare et le féliciter d'être le chantre d'une France sans chipolatas-purée.
Pareillement, quand il déniche "un" capitaliste italien dont la politique est de bien payer ses salariés et de ne pas leur rogner leurs acquis sociaux, on a envie d'applaudir en se disant que nos amis transalpins sont bien ingrats de se plaindre du chômage de masse et de l'afflux de migrants...
On a donc compris le principe de "Where to invade next" de Michael Moore : tout est mieux ici que là-bas, de l'autre côté de l'Atlantique. On est prêt à y souscrire, notamment avec les images pertinentes que le polémiste à la caméra montre de son pays. On aurait peut-être aimé qu'il tempère son enthousiasme pour le système européen au point de n'en jamais dénoncer les tares et les faiblesses.
N'empêche que, souvent, on se laisse emporter par son enthousiasme et par les paradoxes saisissants qu'il fournit. Ainsi, dans son escale en Slovénie, il tombe sur des étudiants américains qui se sont installés à Lubiana parce que les études supérieures y sont gratuites pour tous, même pour les étrangers.
Au lieu de s'endetter chez eux pour des années, avec de surcroît un résultat aléatoire, de plus en plus de jeunes étasuniens prennent un billet d'avion direction la Slovénie, d'autant qu'ils peuvent suivre leur cursus dans la langue de Barack Obama...
"Where to invade next" de Michael Moore fourmille de ces anecdotes édifiantes qui font le charme de ce qui ne pourrait être qu'une démonstration longue et ennuyeuse.
Comment, par exemple, ne pas se frotter les yeux en découvrant une joyeuse île-prison sans barreaux où les assassins font du vélo, surtout que le pays visité par Moore est la Norvège post-Anders Breivik ?
Bien sûr, certains diront, à juste titre, que Michael Moore est autant un agitateur qu'un showman et qu'il tient outre-Atlantique le rôle du "Petit Journal" en France. Mais, ce roi de la satire sait vraiment grossir le trait où ça fait mal aux Américains et, ce qu'il expose, libre à ses concitoyens d'en tenir compte pour améliorer ou changer - si c'est encore possible - un monde qui ne va vraiment pas bien... |