"Holy Mary, drive Putin away. Drive away this darkness from your halls. Drive away the ungodly souls. Our Lady tear the eagle off your walls". "Punk Prayer", Pussy Riot
En exergue de son nouvel album, Pal Moddi Knutsen affirme que les gens sont fatigués de la musique pop sans contenance, à comprendre sans contenance politique ou idéologique. Nous ne jugerons pas son constat, et nous ne rentrerons pas dans le débat de savoir si la musique doit être un véhicule à idées, à simple plaisir du ressenti, ou des deux.
Pour être franc, le norvégien pourrait chanter le bottin de l’île de Senja que sa musique nous porterait de la même façon avec ce folk intense, minéral et vibrant, ces chansons fouettées par les vents, battues par les mers. En l’occurrence, ses paroles sont autant travaillées que sa musique et font toujours sens. Peut-être peut-on rappeler son engagement politique, social et écologique ? Ce n’est donc pas forcément une surprise de le voir s’attaquer à un répertoire, assez peu connu et à raison puisqu’interdit, de chansons censurées dans leur pays respectif.
Parti à la base d’une liste de 400 titres (sic), Moddi a choisi de traduire et réarranger 12 morceaux venant de divers pays comme la Chine ("June Fourth 1989" de Liu Xiaobo), Israël ("A Matter Of Habit" d’Izhar Ashdot), Chili ("The Our Worker" de Victor Jara), Vietnam ("Where is my Vietnam ?"), Russie ("Punk Prayer" des Pussy Riot, transformé en sublime complainte)…
L’intéressant coffret Unsongs sketches and demos chez Pledge Music permet de comprendre un peu mieux son choix de sélection. Dire qu’il le fait avec tout son cœur et toute son âme est un euphémisme. Moddi est allé caméras et micros au poing jusqu’à rencontrer les musiciens derrière toutes ces chansons, pour comprendre le pourquoi du comment. Ce qui n’est pas un geste anodin, et cela n'a pas dû ressembler à un voyage d’agrément. Quelle belle idée de redonner, de rendre leur voix à des chansons réduites au silence, à ces chansons muselées et de les faire revivre de cette façon, viscéralement, loin de tout cynisme !
Alors ces morceaux nous étreignent le cœur, musicalement d’abord, parce que l’on retrouve tout le talent pour les belles mélodies, pour les envolées lyriques et les belles échappées du musicien Norvégien ("Punk Prayer", "Army Dreamers", "Parrot, Goat & Rooster", "The Shaman and The Thief" avec Mari Boine, "Strange Fruit"), par leur situation propre, elles sont des cris en faveur des libertés, par leur texte et par leur évidente importance.
Plus qu’un très bel album, un disque nécessaire pour comprendre que la censure est tellement plus que juste une violente interdiction. Elle peut aller jusqu’au meurtre, comme pour le chilien Victor Jara ou l’algérien Lounes Matoub. Elle peut arriver également tranquillement, sournoisement, sans crier gare. C’est le cas de "Army Dreamers", tube de Kate Bush ayant disparu du jour au lendemain, sans que personne ne s’en rende vraiment compte au moment de la guerre du golf. Une chanson dangereuse parce qu’elle suscite la compassion comme l’indique le chanteur norvégien.
"What could he do ? Should have been a rock star, but he didn’t have the money for a guitar. Should have been a politician, but he never had a proper education. Should have been a father, but he never even made it to his twenties". "Army Dreamers", Kate Bush
Le printemps, les giboulées de mars, les balades au soleil ... la vie presque parfaite s'il n'y avait pas tant de méchants qui font la guerre. Pour se détendre, cultivons nous !. Ajoutons à cela nos chaines Youtube et Twitch et la semaine sera bien remplie.