Spectacle pour un comédien et une marionnette conçu et mis en scène par Ulrike Quade et interprété par Phi Nguyen.
Réputée sur la scène européenne du théâtre visuel, la créatrice allemande Ulrike Quade propose avec "Maniacs", sous-titré "Scènes de la vie conjugale pour une poupée et un comédien", un spectacle inspiré par le phénomène sociétal émergent de la poupée de compagnie.
Combinant plusieurs disciplines, la marionnette, les arts visuels et le théâtre, et ressortant à la performance, il constitue une immersion dans l'univers intime d'un jeune homme indiquant ne pas avoir de problèmes tant relationnels que sexuels et vouer un culte à Eros qui "possède" une "real doll", une poupée en silicone représentant de manière réaliste une femme grandeur nature qu'il manipule au gré de ses envies et pulsions.
De la poupée objet transitionnel de l'enfant à la poupée "sextoy" pour adulte en passant par les jeux de la poupée de Hans Bellmer, la poupée, objet symbolique et néanmoins polysémique par sa modularité plastique et les représentations mentales dont elle devient le support, investit un nouveau domaine, celui de l'investissement affectif et ouvre le champ d'exploration du rôle de cet objet assimilé à un être de substitution et celui de la projection psychotique.
Tels sont les pistes de réflexion induites par le spectacle, qui intègre également la dimension de l'illusion, en l'espèce celle du vivant, essence du théâtre, dont les parti-pris tant scénographiques que dramaturgiques interpellent jusqu'au malaise. Il se déroule dans un espace clos, d'une blancheur clinique, nu, à l'exception d'un canapé design, le "Uncle Jack Canapé" de Philippe Starck, qui évoque tant un peep-show hightech pour maniaque esthète qu'une cellule de contention psychiatrique.
L'officiant, l'acteur Phi Nguyen, manipule, plutôt se collette avec une poupée-marionnette de sa taille qui semble lourde et qui, nue mais avec des socquettes beige et un visage androgyne au maquillage nude, ne ressemble pas à un gadget porno-érotique.
En l'occurrence, la relation sexuelle n'est pas abordée et il est davantage question d'auto-érotisme et de comportements sado-masochistes soft, avec l'homme-chien et le pseudo-bondage, avec un personnage-fantôme aux yeux perpétuellement ouverts mais au regard vide et fixe dont la passivité totale peut conduire à la frustration et à la violence.
La projection d'images afférentes à un fantasmatique Eden retrouvé contribue à brouiller les repères. Peut-être la finalité du spectacle.
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