Comédie dramatique de Anton Tchekhov, mise en scène de Philippe Nicaud, avec Marie Hasse, Céline Spang, Fabrice Merlo, Philippe Nicaud et Bernard Stark.
Il y a quelques années, un éditeur avait voulu réduire les œuvres littéraires trop "longues" pour, disait-il, qu'elles soient toujours lues. Vu le tollé suscité par cette démarche, on n'a plus jamais cherché à condenser "Les Trois mousquetaires" ou "Guerre et Paix". A l'inverse, au théâtre, le pli a été souvent pris au grand dam des puristes. C'est donc une version débarrassée de quatre des neuf personnages d'"Oncle Vania" qu'adapte et met en scène Philippe Nicaud. On ne contestera pas le résultat de ce qui, en toute logique, devrait s'appeler "Astrov" : le récit a gagné en linéarité, en efficacité. Certains diront même que tout devient limpide et dynamise l'affrontement entre le professeur et Vania. Oui, mais, ce qui est plus problématique, c'est que l'oncle Vania, même splendidement interprété par Fabrice Merlo, devient un personnage secondaire. Ici, c'est le médecin Astrov (Philippe Nicaud) qui devient le cœur de la pièce alors que rien chez Tchekhov ne lui prédit pareille promotion. Il faut dire qu'en supprimant le rôle de la mère de Vania, on déséquilibre totalement l'édifice d'"Oncle Vania". Comme, par ailleurs, Philippe Nicaud a délibérément supprimé toute référence à "l'âme russe", il est certain que le personnage de Vania devient anachronique et encombrant. Il ne s'agit pas de critiquer l'absence de samovar, mais on n'avait pas imaginé qu' "Oncle Vania" était un drame romantique, dans lequel Elena (Céline Spang), la femme du professeur (Bernard Starck), vivait un amour impossible pour Astrov. Dans la "version Tchekhov", le docteur était là, effectivement pour faire naître le désir chez Elena, mal mariée à un homme mûr et aigri, et pour donner à espérer à Sonia (Marie Hasse), fille du professeur et de la sœur de Vania, qui gère le domaine avec celui-ci, et qui éloignée de toute vie sociale, a toutes les chances de finir vieille fille.Sonia est aussi une victime collatérale de ce recentrage : son personnage est quasi inutile, alors qu'il est, au contraire, central chez Tchekhov. On le répète, si l'on est prévenu que Philippe Nicaud a décidé de donner un autre sens au chef d'oeuvre d'Anton Tchekhov, on passera une excellente soirée avec des comédiens à leur meilleur. |