Manifeste contre la peur
(L-A Be / Absilone) avril 2016
Après des intro pop Louis XIV, avec ses clochettes au clavecin un peu guindé, le son s’intensifie jusqu’à devenir une puissante rafale à faire s’envoler les poudrées. Retenez bien qu’il n’est jamais bon de se fier aux apparences, dans son Manifeste contre la peur, Violett Pi déchire les cordes et casse sa voix aux accents gutturaux façon Bossu de Notre Dame. Punk ? Si vous le dites.
Violett Pi sait qui il est, et comme les accros à la douche italienne-cuisine américaine, il a certainement trouvé sur son chemin des enfonceurs de porte ouverte, se délectant de fantasmes de caribous à Montréal. Parce qu’il est canado-québéqueux, l’artiste. Grandi dans les vertes prairies de Montréal, c’est en gagnant une réputation de clown chantant qu’il gagne plusieurs prix au festival International de la Chanson. Et c’est par là qu’il nous arrive, avec Klô Pelgag comme acolyte de mélodie.
Que ce soit pour filer en apesanteur ou descendre dans les bas fonds, tous les prétextes sont bons pour hausser le ton. La démarche reste toutefois subtile, puisqu’il n’est pas question de brailler pour le plaisir de faire trembler les morts, Violett Pi civilise son album en posant des textes sensés, certainement puisés dans ses émotions personnelles, transférables à notre situation de commun des mortels : "Par delà le bien et le mal, il y a tout ce que je ferai par amour pour toi" ("La mémoire de l’eau").
Bien sûr, on est emporté par le vent, on regrette et on se pâme, et ce sont justement les vapeurs de l’être qui forgent la puissance émotionnelle des titres : "A regarder les étoiles je me suis brûlé la rétine et je me suis arrosé d’alcool au beau milieu de la rue devant tous ces inconnus et puis j’ai brûlé comme un arbre, est-ce que tout va bien, dites à mon frère que tout va bien, et si tu ne veux plus de moi, dis-moi qui voudra bien de moi" ("Betsey Johnson").
Chaque titre suit une progression méthodique, et chaque titre se mêle évidemment aux nuances grunge et pop issues les cordes électriques. Entre autre, le début patient de "Singe de ville" : "Mais moi, et moi, je sais bien ce qui ne va pas, entre tes petites culottes et tes bas, dans tes armoires, dans tes armures, à dire que l’amour n’existe pas", se salit progressivement d’accents plus éraillés et de griffures plus enragées, et puis il s’agace : "Cesse de me dire que tout va bien, je vois bien que rien ne va bien aller, et peut-être qu’un jour tu devrais t’écouter".
Il susurre les premiers accords de chaque titre, avant de monter dans la puissance avec assurance, Violett Pi serait donc un genre de super héros du décollage, avec prise d’élan sur une falaise forcément découpée dans un coin de Bretagne battu par les vents venus de plus haut là-haut. Vigoureux.
# 21 avril 2024 : Des beaux disques, des beaux spectacles, une belle semaine
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