L'orage arrive, oblige les gens à entrer rapidement et nous donne l'occasion de faire du "people watching" : un public hétérogène, des gabbers avec des veste de jogging Adidas, des têtes rasées, quelques personnes plus agées, un autre en kimono et bottines style cowboy.

Quand on descend, on voit tout de suite que le stand du merch est pris d'assaut : il y a du monde, tous ont hâte de voir Monsieur Jamie Stewart.

En premier partie ce soir des Xiu Xiu (oui, prononcer exactement comme "chouchou" ou si vous voulez "shoo-shoo" en anglais), on a l'honneur d'accueillir le trio Delacave, véritables héritiers de la scène batcave, dérivé du post-punk qui prend le nom d'une boîte londonienne (dont le mot d'ordre était "Absolutely No Funk !") où jouaient beaucoup de musiciens comme Alien Sex Fiend, Siouxsie and The Banshees, The Birthday Party et Lydia Lunch.

L'ambiance est chauffée pour Le Prince Harry, pas le vrai, hein, plutôt le groupe liégeois electro-synth / wave (signé sur Teenage Menopause, le même label que Xiu Xiu), qui fait penser, pas trop de loin, à la scène gabber, et vu les stages diving dans le public, on ne peut qu'être d'accord.

Jamie Stewart arrive derrière le mix juste après le changement de scène. Le public est étonné de le voir super concentré à écouter le son, avec Angelo Seo qui lui donne des directives de la scène. Dès qu'il remonte, c'est au tour d'Angela de faire cette espèce de check de dernière minute.

Presque 20 ans de carrière musicale, plusieurs collaborations (notamment avec Devendra Banhart et Larsen) et douze albums à son actif, dont un qui reprend la BO de Twin Peaks (magistralement dirigé par le Maestro Badalamenti) et un autre qui cligne de l'oeil à Nina Simone avec 13 pistes reprises de la chanteuse américaine.

Le set est prêt : Angela fait penser à une Ménade en pleine extase, lorsque Jamie commence à se disputer avec un mec dans le public : "Hey you, hey man !" hurle-t-il, et là on comprend que quelque chose ne va pas. "S'il vous plaît" dit-il avec un fort accent américain et beaucoup de colère. Sa voix douce, son génie borderline et sa tendresse tout ça mélangé fait partir le mec vers le bar sous les applaudissements du public.

Le génie borderline de Jamie entraîne le public avec lui, pendant qu'il détruit un clash ou qu'il répète d'une façon obsessive "I like my neighborhood / I like my gun / Drive in my little car (...)" sur le riff de "Sad Pony Guerilla Girl" ou quand il crie, en gardant son expression hiératique sur "Fabulous muscles".

Jamie Stewart est Xiu Xiu : un mélange d'émotions, de genres, du post-punk, à l'attitude hardcore, au folk des ballades, à la beauté d'une hystérie qui veut juste devenir musique. Il ouvre avec "Petite", première piste du nuveau album Forget et continue avec "Wondering" : "Tonight is anything / Goodbye to anything / Outside of anything / Collide with everything", véritable manifeste de sa musique.

Un son angoissant devenu libre, qui peut beaucoup nous apprendre à travers la vie simple d'un musicien qui avait juste envie de partir. Et qui est resté. Une expérience à faire en live et si pour le moment vous n'en avez pas l'occasion, écoutez le dernier Forget.