Derrière Antiloops se cache Ludivine Issambourg. Et derrière Ludivine Issambourg se cache un CV assez impressionnant. Concours national de flûte jazz, Wax Tailor, de nombreux concerts et du studio, encore du studio, toujours du studio… de quoi en imposer.
Mais du papier aux oreilles, il y a un pas gigantesque à franchir ; alors on se lance à l’assaut des treize titres et verdict à la fin.
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Flûte. Wax Tailor. Dès le premier morceau, le CV est bien présent dans la musique d’Antiloops, et "Flutadelik" qui ouvre l’album, ou l’intro de "Sasse" qui le suit, le font bien sentir. Mais très rapidement on voit la flûtiste et sa formation prendre leurs distances avec cet héritage et se lancer dans des expérimentations plus personnelles. La virtuosité des musiciens vient se frotter au tourbillon des machines dans une ambiance jazz très urbaine qui nous projette tantôt dans un polar des années 70, tantôt dans un club New-Yorkais, ou dans ces quartiers, aujourd’hui fantasmés, où du chaos naissait des aventures musicales qui allaient révolutionner la fin du 20e siècle.
Cela fleure bon la liberté. Dans la composition d’abord, et les ruptures rythmiques, cette façon de jouer en live dans l’esprit des musiques samplées, passant d’une esthétique à l’autre sans transition mais en gardant un son, une voix ou un motif mélodique en fil rouge. Dans le jeu des musiciens ensuite, tous très bons et très clairement impliqués dans le processus créatif.
Si l’album est avant tout instrumental, la voix n’est pas absente. Par touches d’abord, sample toujours, puis plus franchement avec quelques featurings : Milena Fattah tout en douceur sur "Are gonna make it" (superbe), puis Edash Quata qui apporte une touche de hip-hop sur "Party" (ultra groove, impossible de ne pas bouger), la jeune et talentueuse Nina Attal sur "Fight" et Adam Vadel sur le très dense et puissant "Leaf for the others".
Flûte, basse, batterie, clavier, machines, scratchs, samples (et auto-sample) et quelques voix, les possibilités sont infinies et particulièrement intéressantes quand, comme ici, le talent des musiciens est au rendez-vous.
[] Stop
Bien sûr, cet album est marqué au fer rouge du jazz, plus ou moins acid, du trip-hop et du hip-hop, mais en plus d’être de très bonne facture dans son domaine, il se laisse pénétrer de couleurs plus électroniques et d’une vie hybride, mélange d’imperfection humaine et d’erreurs analogiques. Je pourrais parler d’un son organique, mais je crois que l’utilisation de cette expression dans une chronique est passible d’une lourde peine.