"Eternel Féminin de l'éternel jocrisse ! Fais-nous sauter, pantins nous pavons les décors ! Nous éclairons la rampe... Et toi, dans la coulisse, Tu peux faire au pompier le pur don de ton corps". Féminin singulier, Tristan Corbière.
Le poète Édouard-Joachim Corbière, dit Tristan Corbière, est né le 18 juillet 1845 au manoir de Coat-Congar dans le Finistère et mort le 1er mars 1875 à Morlaix. Dès l’âge de 14 ans, il commence à souffrir de rhumatismes articulaires qui l’obligeront à une vie de douleurs et de tourments. Il s’installera à Roscoff, en Bretagne, dans une maison appartenant à ses parents. Il sera surnommé par les habitants de la ville : l’Ankou : le spectre de la mort, en raison de sa maigreur et de son allure. C’est sous le nom de Tristan Corbière (pour triste en corps bière) qu’il publie à son propre compte en 1873 son recueil de poèmes Les Amours jaunes. Il décède vraisemblablement de la tuberculose en mars 1875. Il n’a pas même trente ans et n’aura connu qu’une vie misérable faite de douleur et de supplice. Poète maudit parmi les maudits, Verlaine lui consacrera un chapitre dans ses Poètes maudits en 1884, où même l’amour n’aura été que torture et où seule la mer, il aurait dû être marin s’il n’avait été malade, ne sera que son seul apaisement.
Qu’un féru de littérature comme Emmanuel Tugny adapte en musique l’univers de Tristan Corbière n’est pas un hasard, surtout que sa mère, la peintre Bernadette Février fut l’une des premières à réhabiliter le poète Breton dans les années 70. Mais comment mettre en musique une poésie proche du symbolisme et du décadentisme, rejetant tout courant littéraire, définie par une ponctuation omniprésente, une écriture incisive rêche et brute ayant pour volonté de déstructurer volontairement les vers ? Déjà en prenant le parti, fort judicieux, d’une voix féminine (Chloé Lavalou), en évitant tout traditionalisme Breton (on ne trouve que quelques traces d’orient, le disque ayant été enregistré en Egypte) mais surtout en choisissant une musique sombre, torturée, minimaliste et amélodique. Quel plus bel hommage en sorte ?
# 14 avril 2024 : En avril, de la culture tu suivras le fil
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