Spectacle circassien du Cirque Eloïze conçu sour la direction artistique et mise en scène de Jeannot Painchaud et la co-mise en scène et chorégraphie de Dave Saint-Pierre, avec Colin André-Hériaud, Selene Ballesteros-Minguer, Pauline Baud-Guillard, Ashley Carr, Aaron DeWit, Rosita Hendry, Jonathan Julien Passing, Frédéric Lemieux-Cormier, Alexie Maheu, Arata Urawa, Jérémy Vitupier et Antonin Wicky.
Créé en 1993, au Québec, par Jeannot Painchaud, Daniel Cyr, Robert Bourgeois et Julie Hamelin, le Cirque Éloize a acquis une réputation mondiale. Chaque année, il parcourt triomphalement la planète. Dès qu'il quittera Paris fin octobre, il partira ainsi pour la Nouvelle-Zélande... En voyant "Cirkopolis", son dernier spectacle, on n'a pas besoin de beaucoup argumenter pour expliquer les raisons de ce succès exceptionnel. Alliant rythme et rigueur, imagination et précision, poésie et professionnalisme, le Cirque Éloize est imparable. Contrairement aux cirques traditionnels, ce n'est pas le "chapiteau", "la mythologie cirque" la vedette, mais le spectacle. Il n'y a pas des numéros qui se succèdent, présentés par un "Monsieur Loyal", mais on suit une histoire, avec parfois l'intervention clin d'oeil d'un néo-clown moderne, Ashley Carr. Pas question d'un chapiteau, c'est sur une scène que l'on danse ou que l'on pratique des acrobaties, des équilibres, des jongleries avec en "fond d'écran" la vidéo-projection d'un univers qui rappelle en premier lieu celui du "Brazil" de Terry Gilliam et du "Métropolis" de Fritz Lang. Habillés en gris, chapeautés, tous en pantalons, les quatorze membres de la troupe découvrent un univers bureaucratique, sombre, étouffant sans joie. Mais, peu à peu, sous l'impulsion des chorégraphies de Dave Saint-Pierre, les pantins moroses déguisés en petits fonctionnaires obscurs vont se muer en artistes. L'idée est simple et efficace : comme dans le film "Pleasantville", le noir et blanc va céder la place à la couleur. D'abord, ce sera le rouge qui fera son apparition, avec la radieuse Rosita Hendry et son fabuleux numéro de "Roue Cyr"... Puis peu à peu, l'ordre terne et sans joie, où le papier blanc est calibré avant d'être tamponné, sera dynamité par d'opiniâtres danseurs qui s'ingénient à arpenter en permanence la scène.
On se croirait parfois revenu à l'ère d' Un Américain à Paris". La danse, pour Dave Saint-Pierre, est avant tout démonstration et action. C'est dans la partie artistique que se loge l'émotion, comme pendant ce moment exceptionnel, tout en grâce, où Selene Ballesteros-Minguer officie à la corde lisse. Il faudrait évidemment citer tous les artistes qui, à la différence du cirque traditionnel, participent à tout le spectacle, parfois en lumière, parfois pour faire nombre dans ce qu'on pourrait appeler le "choeur". Toutefois, on soulignera l'adresse diabo...lique d'Arata Urawa au diabolo. Ce qui étonnera le plus dans ce spectacle sans magicien, c'est qu'à l'instant de le quitter, en regardant sa montre, on s'aperçoit qu'il ne s'est passé que 80 minutes. Comment une douzaine de séquences qui paraissent exiger chacune un temps important de mise en place peuvent-elles se succéder à un tel rythme ? Il faut faire cette expérience : elle est unique et sera forcément inoubliable.
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