Costard sur mesure, cheveux impeccables et poils au menton savamment tailladé (la taille où ça gratte et ça pique méchamment les bisous), Zanarelli fait penser à un dandy maniaque du contrôle, un de ceux qui savent ranger les pantalons sur le pli en un petit coup de poignet discret et efficace.
Après 350 concerts, il s’est dit qu’il devrait peut-être graver ses histoires sur une petite galette, juste pour voir, pour la postérité, pour conclure ou pour commencer une nouvelle aventure. L’écho des vertiges est le premier album de ce jeune élégant.
Les premiers accords ont le goût du vent dans les branches et des ballades sous un cache-nez. Oui, je l’avoue, je me suis d’abord retranchée derrière un cynisme de couverture croyant reconnaître une pâle copie de crooner aux sourcils asymétriques. Un genre de séducteur en rouflaquettes, les yeux rivés sur la caméra me disant, yo n’aime que toi.
Et puis non. A commencer par sa voix à la capacité d’oscillation étonnante. Zanarelli passe du bleu au parme en un souffle, sans trémolo et avec franchise. D’intonation quasi féminine, ses murmures s’échauffent et réchauffent les oreilles piquées de givre, jusqu’à se teinter d’une légère rocaille essoufflée.
Et puis il y a la musique, des petits pas légers sur piano en déshabillé de soie, jusqu’aux galipettes dans les embruns d’une eau salée jamais repue de va-et-vient. Quelques cordes pour faire accélérer les battements de cœur, des caisses souriantes comme un chat de cheshire, mutines et carnassières.
Zanarelli croque la vie comme elle vient, avec ses séparations au goût de savon blues "Il m’arrive de croire que je suis seul au monde" ("La nuit noire") et ses plaisirs à la tomate gorgée de soleil "j’aime regarder la nuit, ton corps s’arrondir dans les draps enlacés" ("J’aime"). Son génome de dandy n’a pas oublié le garnement qu’il reste encore un peu. L’écho des vertiges respire d’insouciance attentive.
Sans prétention et efficace, Zanarelli fait écho aux vertiges intérieurs, des restes d’optimisme pas encore blasé de vieillerie, un soupçon d’espièglerie pour dérider les tristesses, une élégance accessible, et une furieuse envie de crier des âneries du haut d’une falaise.