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William Wyler  1936

Réalisé par William Wyler. Etats Unis. Drame. 1h51 (Sortie 1936). Avec Walter Huston Walter Huston, Ruth Chatterton, Paul Lukas, Mary Astor , David Niven, Gregory Gaye et Maria Ouspenskaya.

A la Cinémathèque française, on peut entendre les habitués commenter la rétrospective William Wyler. Manifestement, nous sommes nombreux à n’être familiers qu’avec quelques œuvres de cette carrière monumentale.

William Wyler en 42 films, nous avons tous beaucoup à rattraper ! Commençons donc par "Dodsworth", un film rare, l’un de ceux dont on ne connaît quasiment rien, et qu’on découvre sans aucun a priori.

Le premier plan est une splendeur. Il y a un grand bureau, avec, au fond, une large baie vitrée. Par la fenêtre, on aperçoit la façade d’une usine. En larges lettres conquérantes, le nom "DODSWORTH" dessus. A la fenêtre, il y a un homme, de dos, qui regarde son empire. Un travelling avant commence ; la musique du générique, doucement, se mue en "Auld long sygn", la chanson déchirante des adieux. La caméra ne bouge plus.

L’homme, toujours de dos, toujours immobile, est à présent cadré en plan épaule, avec, à ses côtés, l’enseigne de l’usine. C’est un plan inoubliable, à l’architecture parfaite, où l’émotion gagne peu à peu, un plan qui raconte, en quelques secondes, toute une histoire, toute une vie.

Dodsworth (Walter Huston) vient de vendre son usine. Avec l’argent, il compte partir pour un second voyage de noce avec son épouse. Il faut dire que vingt ans à Zenith ont largement suffit à Franny (Ruth Chatterton), qui n’en peut plus de son existence de femme au foyer dans une ville de province. Cette fois, c’est l’Europe, le faste, l’élégance, la belle vie pour un couple marié de longue date.

Mais ce voyage ne se passe pas comme prévu. Car Franny, encore belle, comme on le dit cruellement des femmes vieillissantes, refuse de voir finir sa jeunesse si rapidement. Coquette, soignée, elle entend profiter de tout, et se trouve bien embarrassée de son brave, mais un rien pantouflard de mari. Il veut aller aux Invalides, elle préfère les dîners mondains. Il reste, à ses yeux, désespérément américain, provincial, quand elle voudrait donner le change et trouver sa place dans le beau monde parisien.

Cette distorsion du couple n’est évidemment pas sans humour. Le personnage de Franny, plutôt caricatural, confronté à son mari bienveillant donne parfois lieu à des disputes assez savoureuses. Mais, assez vite, la tristesse s’installe. La fatigue vient, l’épuisement de l’amour commence à se faire ressentir.

Car Dodsworth, aussi maladroit soit-il, aime sa femme, accepte tous les caprices, subit toutes les trahisons en espérant retrouver sa vieille Franny. A mesure que le film avance, on retrouve cet homme qui regardait pour la dernière fois tout ce qu’il a construit, et qu’il ne reverra jamais. Un homme qui assiste au naufrage de son mariage, mais qui continue à attendre, à espérer.

Une très belle séquence raconte ce qu’est ce couple qui avance en âge. Les époux se préparent pour aller se coucher, après une scène un peu pénible avec des amis de Madame. Lui, l’industriel retraité, ôte son pantalon ; en caleçon, il déboutonne sa chemise, laissant apparaître un début de ventre tandis qu’il continue à discuter avec sa femme. Elle, moulée dans une robe du soir satinée, abaisse sa fermeture éclair, laissant voir, en bas des reins, le haut d’un jupon blanc.

Le contraste de ce bout de tissu secret, un peu trivial, avec la beauté de la robe déconstruit le personnage soigneusement créé par Franny. Les masques tombent, on ne tente plus de séduire. Dodsworth tapote les bras de sa femme avec énergie, comme on flatte le flanc d’une pouliche. Franny le déteste de la voir telle qu’elle est, en jupon et cold-cream, sans mystère.

Dans leurs grands appartements parisiens ou viennois, les personnages se tiennent de plus en plus à distance. William Wyler - cela faisait sa réputation - joue admirablement avec la profondeur de champ pour dire la séparation des êtres. Leur isolement, aussi, et leur ressentiment. La danse des amours commence, les personnages traversent chambres et salons, s’évitent.

La fin est bien sûr cruelle. Non pas que le film finisse mal, à première vue. Mais on garde un goût amer en bouche en constatant que le personnage de Franny - souvent ridicule, soit -, voit son bonheur dénié en raison de son âge. Aux yeux des autres, ses attitudes d’ "écolière" la décrédibilisent et masquent mal la réalité biologique : elle est une femme qui ne peut plus avoir d’enfant.

Dodsworth, lui, bien que plus âgé, a le droit à une seconde chance, à une deuxième vie aventureuse. Quand il est comparé à un enfant, le terme est mélioratif : sa jeunesse n’est pas finie. Le temps et la société n’ont pas la même cruauté pour tous.

 

Anne Sivan         
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