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Ingmar Bergman  1963

Réalisé par Ingmar Bergman. Drame. Suède. 1h35 (Sortie 1963). Avec Ingrid Thulin, Gunnel Lindblom et Jorgen Lindstrom.

Son nom est si écrasant qu’il effraie parfois. Ingmar Bergman, 45 films et feuilletons télévisés, des dizaines de mises en scène de théâtre. Il aurait eu 100 ans cette année. On croit parfois connaître Bergman, sans l’avoir vu. On le sait, chez lui, il y a toujours le poids de la conscience, de la religion, de la mort. Woody Allen, grand admirateur du maître, s’en moquait gentiment dans "Guerre et amour," en convoquant les spectres du "Septième Sceau".

Son cinéma n’est pas réputé pour son accès facile. Pourtant, il suffit d’avoir un jour croisé le regard de sa Monika pour avoir été directement touché au cœur. On n’oublie pas le visage des femmes chez Bergman, ces femmes dont il raconte l’attente, les combats, les déceptions, des femmes qui se tiennent de profil devant une fenêtre, ou qui font face, crânes, au spectateur.

Bergman, ce n’est pas que l’austérité protestante, le noir du tombeau et le blanc du linceul. Bergman est aussi rouge. Ce rouge est parfois celui du sang, celui qui macule la chemise de nuit d’Ingrid Thulin dans "Cris et chuchotements"; c’est aussi celui du lourd rideau de théâtre, qui accompagne "En présence d’un clown".

Pour moi, c’est avant tout le rouge vivant, éclairé par mille bougies, du réveillon de Noël dans "Fanny et Alexandre", un chef-d’œuvre réalisé pour la télévision suédoise. Dans la chambre des enfants, le père est magicien. Sur les murs, des apparitions : une lanterne magique déroule lentement un imaginaire qui prend vie. "Laterna Magica" est le titre de la biographie d’Ingmar Bergman. Un maître-enchanteur, enfant et sorcier, un inventeur de visions.

Dans le cadre de la rétrospective à la Cinémathèque française du 19 septembre au 11 novembre 2018, était projeté en séance d'ouverture "

La mère a laissé sa main sur l’épaule de son enfant. Epuisée par la chaleur, elle voudrait dormir. Le wagon est étroit. A côté d’elle, une femme, blonde, grande, très belle, se met à tousser sans s’arrêter. On écarte l’enfant, ça va passer. Dehors, c’est la guerre. Depuis la fenêtre du train, les tanks ressemblent à des jouets. Les deux femmes et l’enfant font halte dans un grand hôtel, presque vide.

C’est dans l’espace formé par les deux chambres contiguës et la salle de bain que va se jouer une grande partie du film. Anna (Ingrid Thulin) reste au lit. elle est en train de mourir. Ester (Gunnel Lindblom) attend qu’elle aille mieux, ou qu’elle meure. Peu à peu, la sensation d’étouffement va croissante.

La confrontation entre femmes dans un espace clos est l’un des grands thèmes explorés par Bergman. On pense, bien sûr, à "Persona", et à la fascination qui opposait et réunissait Liv Ullmann et Bibi Andersson, et à l’agonie de la sœur dans "Cris et chuchotements".

Ingmar Bergman joue de l’architecture de la pièce pour marquer l’opposition entre les deux femmes. Ester ne cesse de s’asperger d’eau, de chercher à se rafraîchir et à sortir, tandis que de l’autre côté de la porte, Anna tremble de froid sous ses couvertures.

Ester est celle qui veut ouvrir les fenêtres pour s’échapper, mais ferme la porte de communication entre Anna et elle. Anna, au contraire, garde la fenêtre fermée mais essaie de passer outre cette barrière de la porte, espionne celle qu’on imagine être sa sœur. Plus tard, elle tambourinera, puis s’endormira devant la porte qui cache les amours secrètes de sa sœur et de son amant.

Dans cette histoire de mort, la volupté est partout, moyen de conjurer la douleur et l’angoisse. Anna, enfouie dans un duvet comme dans un cocon, se caresse furtivement, tandis que sa sœur s’abandonne à un étranger dans une chambre d’hôtel.

Bergman scrute le visage de ces deux actrices, déformés par la douleur ou le plaisir. Agrippée aux barreaux de son lit, Ester crie sur sa sœur, avant de céder à son amant. Agrippée aux barreaux de son lit, Anna est submergée par la mort.

Rarement on a vu scène d’agonie plus forte. La caméra reste concentrée sur ce visage qui se tord, lance un cri muet, étouffe tandis que la vie semble sortir de son corps, par à-coups forcenés.

La splendide photographie de Sven Nykvist, collaborateur attitré du cinéaste, magnifie ces pénombres et ces clartés où se jouent et se déjouent les destinées humaines. Il y a le blanc d’un sein de femme, offert dans l’obscurité d’une loge de cinéma, le blanc des robes que porte Ester pour rejoindre son amant dans une chambre noire, le blanc, aussi, du visage d’Anna, qui se saoule dans le lit qu’elle macule peu à peu, comme un avant-goût de la décomposition qui l’attend.

Johan, quant à lui, s’échappe dans les couloirs interminables de l’hôtel, armé de son pistolet en plastique. Lui aussi trouve dans son échappée un moyen de s’affranchir de cette mort qui envahit tout, même les photographies d’enfance qu’un maître d’hôtel à la fois inquiétant et comique, au long corps d’insecte, lui montre. Des photographies où un petit garçon pose à côté du corps de sa mère morte, rappel d’un temps où la vision même de la mort faisait presque partie du quotidien.

Petit Poucet rêveur, Johan fera dans sa marche de curieuses rencontres. Ainsi, ce moment de grâce où derrière une porte entrouverte, l’enfant tombe sur une troupe de nains, qui l’engagent immédiatement à se joindre à leurs jeux. Ingmar Bergman fait soudain de cet hôtel déserté un espace d’émerveillement, où la magie et le rire surgissent au détour d’un couloir.

Dans cette terre étrangère, le trio formé par les deux femmes et l’enfant ne comprend pas les autres personnages. Pourtant, le langage se révèle parfois inutile pour communiquer : Johan n’a pas besoin de parler avec ses nouveaux amis pour les comprendre ; Ester ne veut pas discuter avec son amant, et se livre à lui parce qu’elle peut lui parler sans peur, Anna se fait comprendre par signes auprès du maître d’hôtel. Elle qui est traductrice comprend mieux les langues étrangères que sa propre sœur. Quand la discussion éclate entre elle, elle se fait haineuse et orageuse. Le silence brisé marque la rupture définitive entre les deux femmes.

Anna a appris quelques mots de la nouvelle langue : visage et main. Les deux seuls mots qui importent, finalement, puisqu’ils désignent les deux choses qui comptent le plus. Le visage, qui exprime la rage ou l’amour, le visage qui n’a plus besoin de mots. La main, pour caresser et reconnaître, comme Johan le fait avec sa mère, aimée et fuyante. Le regard et le toucher, pour contenir le monde.

 

Anne Sivan         
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# 17 mai 2020 : le joli mois de mai

Après tout ce temps confiné, l'impression d'une liberté quasi retrouvée n'a d'égale que la prudence avec laquelle il faut aborder ses semblables. En attendant des jours meilleurs, voici de quoi se mettre du baume au coeur avec notre petite sélection culturelle hebdomadaire.

Du côté de la musique :

"Chante-nuit" de Facteurs Chevaux
"9 songs" de Pierre
"Sex education" de Ezra Furman
"Cage meet Satie" de Anne de Fornel et Jay Gottlieb
Interview de Batist & the 73' réalisé à l'occasion de son live Twitch dont des extraits accompagnent cette entretien
"Hundred fifty roses" de Dune & Crayon
"F.A. Cult" de Hermetic Delight
"Love is everywhere" de Laurent Bardainne & Tigre d'Eau Douce
"Hum-Ma" de Les Enfants d'Icare
"Spirals" de Sébastien Forrestier
et toujours :
"Soir paien" de Alexis Kossenko, Anna Reinhold & Emmanuel Olivier
Interview de Morgane Imbeaud accompagnée d'une belle session acoustique
"Enrique Granados : Oeuvres pour piano" de Myriam Barbaux-Cohen
"For their love" de Other Lives
"Schubert, sonates pour piano D.845 & D.850" de Philippe Cassard
"Nothing is never over" de The Eternal Youth

Au théâtre dans un fauteuil de salon avec :

des créations :
"Cléopâtre in love"
"Affordable Solution for Better Living"
"Queen Blood"
"One night with Holly Woodlawn"
du des classiques revisistés :
"Antigone"
"La Dame de chez Maxim"
des comédies de moeurs:
"La garçonnière"

"Deux hommes tous nus"
du boulevard :
"Panique au Plaza"

"Grosse chaleur"
"Oscar"
du côté des humoristes :
"Shirley & Dino à Marigny"
"Philippe Lelièvre - Givré !"
Au Théâtre ce soir :
"Trois partout"
"Quand épousez-vous ma femme ?"
"J'y suis, j’y reste"
et une échappée opératique de classiques recontextualisés :
"Madame Butterfly" de Puccini
Pelléas et Mélissande" de Debussy

Expositions :

voir et revoir:
la récente exposition "Le Rêveur de la forêt " du Musée Zadkine en vidéo et avec les images commentées sur le site du musee
et la rétrospective "Christian Dior - Couturier du rêve" qui s'est tenue au Musée des Arts Décoratifs avec une visite-reportage réalisée par Benjamin Wu assortie des commentaires des commissaires
sillonner l'Hexagone en direction de l'exposition"Balenciaga, Magicien de la Dentelle" à la Cité de la Dentelle et de la Mode à Calais et du Musée La Piscine de Roubaix
partir ensuite pour l'Europe :
au Pays-Bas avec le Musée Van Gogh à Amsterdam et la visite virtuelle de chacun des quatre niveaux de monstration
puis au Danemark au Ny Carlsberg Glyptotek de Copenhague
et encore plus loin en Turquie au Pera Museum d'Istanbul
et en Corée du Sud pour explorer en 6 étapes le National Museum of Modern and Contemporary Art
enfin revenir à Paris au Musée du Louvre avec les visites commentées par les commissaires des expositions "Vermeer et les maîtres de la peinture de genre" et "Un rêve d'Italie, la collection Campana"
et finir en musique avec un revival musical avec l'exposition en ligne "Mai 68 - De la révolte à la légende" au Musée de la Sacem

Cinéma at home avec :

voir ou revoir :
de la romance avec "Coup de foudre au Caire"
de la comédie musicale hollywoodienne avec "Mariage royal" de Stanley Donen
de la comédie dramatique avec "Coffee and Cigarettes" de Jim Jarmush
du policier avec "Jeff" de Jean Herman
du thriller avec "Volte face" de John Woo
du western avec "Mon nom est personne" de Tonino Valerii et Sergio Leone
du fantastique avec "La femme aux bottes rouges" de Juan Luis Bunuel
de la comédie avec :
"Absolument Fabuleux" de Gabrieh Aghion
"Cash Express" de Jerry Zucker
au Ciné Club avec des films des années 50 :
"Topaze" de Marcel Pagnol
"Sacré jeunesse" d'André Berthomieu
"Vous n'avez rien à délarer ?" de Clément Duhour
une curiosité avec "Le Père Noël contre les Martiens" de Nicholas Webster
et une rareté avec "L'invincible Kid du Kung Fu" de Eddie Niccart

Lecture avec :

"Là où chantent les écrevisses" de Delia Owens
"Les lumières de Tel Aviv" de Alexandra Schwartzbrod
et toujours :
"Faites moi plaisir" de Mary Gaitskill
"La chaîne" de Adrian McKinty
"Incident au fond de la galaxie" de Etgar Keret

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Bonne lecture, bonne culture, et à la semaine prochaine.

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