Le 24 janvier 2017, il faisait froid, je n'avais pas envie de sortir, je pensais rester au chaud, chez moi, dans mon canapé, sous un plaid, en regardant une trentième rediff d'un truc genre Jason Bourne sur une chaîne de fond de TNT. Pendant ce temps-là, de jeunes et valeureux musiciens s'étaient gelé les miches en traversant la France pour venir jouer à Paris, devant quelques soiffards avides de rock n'roll hivernal. Qui avait raison ? Pas moi. Je le savais.
Poussé par ma mauvaise conscience et l'envie de bousculer ma flemmardise, j'ai gogglé et c'est comme ça que je suis tombé sur eux : The Slow Sliders. Tombé amoureux, pour être plus exact, d'une vidéo postée sur l'event de leur concert du soir, au Supersonic, une salle qui se trouvait à une demi-heure de chez moi. Dans ce clip intitulé "Impalos", ils apparaissaient dans un blockhaus en pleine campagne Brestoise, dans le froid et les herbes sauvages, près d'une mer agitée et sous un ciel pluvieux, et j'aimais ça, comme on aime une escapade Finistérienne pour son charme mélancolique, à l'image de leur musique pleine d'envolées vocales et guitaristiques. Enchanté, j'étais conquis au Conquet.
J'entrais dans leur histoire, libre et passionnante, franche et insouciante, et j'ai tout de suite su qu'elle m'amènerait vers eux, ce soir-là. Adieu Jason Bourne. Ce concert a été un de mes préférés de toute l'année dernière. Je découvrais leurs chansons, leur style décontracté, pour ne pas dire désinvolte. "Ce groupe est indécemment doué", m'étais-je dit. Est-ce qu'ils s'en rendaient compte ? Si oui, ils s'en foutaient royalement.
Un an et demi plus tard, leur album, tant attendu, sort enfin. Un album court, de 8 chansons seulement, dont "Impalos" et d'autres merveilles. Il n'y a rien à jeter. Tout a un sens, dans le jeu, la production, le format. C'est un repas complet, un plateau varié et cohérent.
"It's hard to hate" et "I'm dead anyway" offrent des montées progressives emballantes, de quoi vous coller un frisson en plein vol. "Lesneu" pourrait vous faire danser, en fait non, elle vous fait danser. Et "Empty days", mon dieu, c'est roulage de pelles garanti.
Bien sûr, on pense à The Walkmen, The Smiths et à ce genre d'écorchés lumineux éclairant la brume de leurs mélodies solaires. Et aussi à Mac DeMarco pour certains choix d'accords et d'arrangements, pour ce groove lancinant typique de l'Atlantique, nuages noirs sur mer bleue-gris, éclaircie à midi...
Il y a de la maturité chez ces jeunes hommes, qui ravit le "vieux pas si con" que je prétends être, celui qui a toujours fui la médiocrité et qui trouve en eux un espoir vivifiant. Voilà un groupe que je suis sorti voir dans le froid, voilà un album que j'écouterai souvent.
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