Un album 6 titres et si riche. Dès le premier, vous êtes transporté dans un autre décor. Où ? Vous le saurez en l’écoutant, parce que la destination dépend surtout de l’endroit où vibrent les images de vos envies "d’ailleurs".

Dès les premières mesures, le voyage commence sur les notes d’une guitare portugaise. Paysages sauvages et inexplorés ou paysages charnels, le voyage est subtil, poétique, abstrait, comme le sublime clip réalisé par Barbara Creutz. Pour le titre éponyme de l’album "Comment te traduire" et qui a déjà remporté les prix suivants : meilleur vidéo clip à Flicapaz, meilleur vidéo clip Mention honorable au KinoDrome, sans compter ses 38 sélections à travers le monde !). Si vous lâchez vos a priori, la musique vous emportera sans doute dans une danse chamanique, presque une transe.

Ce clip reprend curieusement les couleurs dominantes et évidentes des mélodies de Lembe Lokk, celles des baies rouges glanées dans une campagne estonienne certainement, arrosées de vodka ("Il est si tard") sur un violoncelle très présent qui, sur certains titres, prend vraiment la place d’une autre voix et transforme le chant lead en un étrange duo, très puissant.

L’exil, bien évidemment, est très présent. La force de l’absence, les odeurs qui restent en mémoire, les stigmates d’un nom, d’un accent… Un thème qui parle forcément à tous, comme celui du temps qui passe et ne se rattrape plus. Exilés de quelqu'un, de quelque chose ou d'une terre, nous sommes tous des exilés à notre manière si on y réfléchit bien et cet état que chante Lembe, rassure paradoxalement, permettant à celui qui l'écoute de se sentir moins seul.

Que la musique fasse voyager est un lieu commun, ici le voyage apparaît comme exceptionnel. Un véritable passeport de départ (tout en soulevant la question : où est le vrai départ ?), avec une voix exceptionnelle doublée, voire triplée en chœur sur "Toi alors".

Cette voix profonde bouleverse par ses vagues aux gouts salés d’une onde Baltique, accompagnée par des cordes percussives ou lascives selon les mots posés, pour envoler ou pour bercer.

"Tiens" est un titre plus parlé que chanté, mais la poésie n’est-elle pas un chant à elle seule, un champ sans limite de notes, où il fait bon faire résonner ses propres pulsions chromatiques ?

Le seul regret, six titres de plus n’auraient pas été de trop, alors pour se consoler, prendre une deuxième tournée est vivement conseillé, et puis pour recevoir tous ces poèmes ciselés par une écriture de précision et en apprécier toutes les nuances, il faut bien ça, voire plus... N’hésitez pas, l’abus de cette substance n’est pas déconseillé.

Pour terminer je souhaiterais vous partager quelques mots ramenés de mon voyage après écoute : "Regard errant d’un cœur en plein solstice" ; "La poésie a le devoir de brouiller les pistes" ; "Un bouche-à-bouche avec le monde"… Je vous laisse vous imprégner des vôtres.

Lembe Lokk sera en concerts très prochainement :
- le 10 novembre 2018, au Forum Léo Ferré, à Ivry-su-Seine,
- le 29 novembre 2018, à La Trappe, à Paris,
- le 19 janviuer 2019, au Triton, aux Lilas,
- le 9 février 2019, à l'O'Gib, à Montreuil,
- le 8 mars 2019, à l'Eglise de Veneux-les-Sablons,
- le 22 mars 2019, au Comptoir, à Fontenay-sous-Bois.