La Réunion des Musées Nationaux-Grand Palais présente "la" grande exposition d'ouverture de la saison muséale 2018-2019 avec la rétrospective en 150 peintures, dessins, céramiques et sculptures de l'oeuvre du maîte catalan Joan Miró.
La monstration simplement intitulée "Miró" dont le commissariat est assurée par Jean-Louis Prat, ancien directeur de la Fondation Maeght (1969-2004), membre du Comité Joan Miró et ami de l'artiste, se développe sur deux niveaux dans un parcours chronologique à la scénographie "white cube" réalisée par l'Atelier Maciej Fiszer. Ainsi se dévide le fil de sept décennies d'une création majeure dans l'Histoire de l'Art de la première moitié du 20ème siècle qui navigue entre figuration et abstraction et retrace un rapport au monde entre tellurisme et onirisme, réalisme visible et abstraction poétique signée par celui se voulait "l'assassin de la peinture" et dont la vision de l'oeuvre était celle d'"un poème mis en musique par un peintre". Joan Miró, les pieds sur terre et la tête dans les étoiles Contemporain de Matisse et de Picasso, Joan Miró a réalisé une oeuvre prolifique résultant d'une production intense et plus complexe qu'il n'y paraît en raison de l'effervescence de son invention plastique. En effet, elle résulte d'une combinatoire atypique entre l'art catalan, l'attraction pour la palette chromatique saturée du fauvisme, la tentation cubiste, le surréalisme pour l'alchimie des formes et des lignes qui irrigue son langage pictural, l'expressionnisme abstrait pour la dimension spatiale de ses triptyques et même le Nouveau réalisme avec ses toiles brulées.
Son oeuvre oscille entre la figuration et l'abstraction lyrique, le tellurisme et l'onirisme, l'infiniment petit et l'infiniment grand, pour traduire son univers intime et sa cosmogonie. Ainsi à la réalité visible Miró substitue la figuration fantastique des "Paysages imaginaires" scellant la symbiose de la nature, de la faune et de l'homme.Ce qu'il pratique également dans la série de gouaches les "Constellations" à laquelle s'ajoute l'expérimentation sur les effets de texture.
Mais si le peintre crée sa planète-refuge, "le miromonde", il est néanmoins rattrapé par le principe de réalité et happé par les événements politiques et historiques de la première moitié du 20ème siècle : la montée du fascisme qui se traduit dans le cycle des "Peintures sauvages" et la guerre d'Espagne avec les "Peintures sur masonite" puis plus tard en réaction contre les exactions
franquisme avec le Triptyque du condamné à mort. Celui-ci constitue la deuxième série des "Grands Formats" après "Les Bleus" de 1961 sur le thème du ciel qui entre en résonance avec l'abstraction à l'américaine.
Dans les années 1950-60, Miró privilégie l'art en trois dimensions et puise dans ses origines catalanes pour, oeuvrant dans la céramique, réaliser les superbes "Terres de grand feu" en exemplaire unique.
Ensuite, il renoue avec la sculpture-objet expérimentée dans les années 30 avec ses "constructions" qui ressort à l'assemblage et au recyclage de matériaux divers à la manière du Nouveau Réalisme.
Il renoue également avec la figuration stylisée pour ses motifs de prédilection que sont notamment la femme et l'oiseau parfois réunis dans d'amusants assemblages.
L'exposition se clôt sur l'oeuvre ultime du peintre alors nonagénaire qui se révèle en proie à ses préoccupations ultimes avec l'invasion violente de la couleur noire et la reprise de la pratique de la carbonisation et de la lacération. Et des toiles telles "Les oiseaux de proie foncent sur nos ombres" ou "Silence" s'avèrent éloquentes. A ne pas rater l'oeuvre graphique de Miró, qui fut conséquente, avec les lithographies réalisées pour ses amis poètes et écrivains tel Tristan Tsara pour son recueil "Parler seul", pour "A toute épreuve", celui de Paul Eluard ou les eaux fortes pour le recueil "Adonidès" de Jacques Prévert.
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