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Jean Renoir  septembre 1956

Réalisé par Jean Renoir. France/Italie. Comédie dramatique. 1h35 (Sortie le 12 septembre 1956). Avec Ingrid Bergman, Jean Marais, Mel Ferrer, Magali Noël, Jean Richard, Elina Labourdette, Dora Doll et Juliette Gréco.

Fatigué, le Jean Renoir d’après la guerre ? Epuisé, le génie du cinéma français des années 1930, après sa lutte avec les studios hollywoodiens ?

Si on le croyait, il suffit de voir la vie qui circule dans "Elena et les hommes", la joie et la passion qui traversent le film pour comprendre que Jean Renoir n’a rien perdu de son entrain, au contraire.

Après "French Cancan" et les retrouvailles avec Paris - celui du quartier de Montmartre qui bat au rythme des danses et des chansons - Jean Renoir continue à faire revivre la Belle Epoque, temps heureux des impressionnistes, dans un Technicolor de rêve, où les roses ont la tendresse d’une aurore sur la Butte, et les rouges la profondeur d’une nuit de passion.

Une vision à la fois flamboyante et idyllique qui jamais ne se fige dans la reproduction picturale, mais qui vient au contraire incarner, faire respirer toute une époque où les robes longues et les chapeaux malcommodes n’empêchent nullement les dames de courir où bon leur semble.

De course, il en sera beaucoup question durant ce film où les personnages - et les spectateurs - ont à peine le temps de reprendre leur souffle, tant l’intrigue avance à sauts et gambades. Dès le début de cette "fantaisie musicale", l’appel de l’aventure est là.

Dans un salon cossu, tout en drapés et tapis, un homme et une femme jouent du piano. Ou plutôt, il joue avec passion, tandis qu’elle réprime un bâillement. L’agitation du pianiste n’est guère communicative, sauf si l’on compte les mouvements que ses petits bonds impriment au tabouret de piano.

De toute façon, la Princesse (Ingrid BergmanMagali Noël) se précipitent à la fenêtre pour faire entrer la clameur populaire dans l’enclave protégée du salon. Chez Jean Renoir, on a beau faire, la joie est communicative, et se préoccupe peu des barrières.

En ce jour de fête, les distinctions sociales sont abolies. Jean Renoir a toujours aimé filmer cette foule en liesse, qu’il s’agisse des révolutionnaires de La Marseillaise ou des spectateurs du Moulin rouge à la fin de "French Cancan". Chez lui, cette marée de visages est belle, avec ses remous et ses rires. Entre les ouvriers et les bourgeoises, les aristocrates et les femmes de chambre, la belle Princesse trouve sans peine sa place.

C’est une merveille absolue, cette plongée dans la foule où la princesse est entraînée d’un côté ou de l’autre, où l’on se passe sans y penser ombrelle, périscope ou bébé vagissant. Cette grande circulation fonctionne comme une chorégraphie comique.

Mais le hasard fait bien les choses, et la dérive d’Elena la fait tomber sur le Comte Henri de Chevincourt(Mel Ferrer), qui n’est pas indifférent au charme de la belle Polonaise. Ami du général Rollan (Jean Marais), il se propose de lui faire rencontrer sa nouvelle connaissance.

La suite est aussi difficile à résumer que l’intrigue de "To be or not to be", de Lubitsch. Sachez qu’il y aura un château, des conspirations, des courses-poursuite jusqu’à Bourbon-Salins, beaucoup de vins, des changements d’identité, des Tziganes… Bref, tout un charivari qui constitue un enchantement, tant le rythme de l’action reste soutenu. Ça court, ça crie, ça va dans tous les sens, et Renoir orchestre à la perfection les entrées et les sorties de ses personnages.

Le cinéaste exploite la profondeur de champ pour donner à voir une multitude d‘actions qui se déploient en même temps avant de se rencontrer. On pense énormément à la "Règle du jeu", avec le passage des cuisines au salon, les jeux de cache-cache de la servante et du fils de famille. Galanteries et affaires d’Etat font ici plutôt bon ménage.

L’aspect vaudevillesque du film s’exprime également à travers la satire d’une bourgeoisie bien installée de la IIIème République. Le personnage du fiancé d’Elena, roi de la chaussure, est un délice.

Préoccupé avant tout des marchés - il cherche à marier son fils avec une autre princesse, mais elle, du caoutchouc - il ne cesse de pousser Elena dans des salons dont il ferme la porte, la laissant en compagnie des hommes qui pourraient servir son intérêt. Une forme de prostitution que vient confirmer le dernier lieu de l’action, une auberge qui abrite des amours illicites, et sans doute tarifées.

Le bourgeois fait bien la paire avec tous ces hommes en noir qui accompagnent partout le Général Rollan, et le poussent vers la conquête du pouvoir. Une bande d’ambitieux qui tirent les ficelles, la partie sombre, même si elle reste comique, de la IIIème République.

Dans le petit théâtre de Jean Renoir, la représentation est partout. Derrière chaque porte close, une nouvelle pièce se joue ; à la fenêtre, on s’embrasse pour de faux, mais quand la comédie se finit, on se rend compte que ce n’en était pas une. Alors que s’élève la voix de Juliette Gréco, l’intérieur et l’extérieur communique, à l’image de la première séquence du film. Dans la rue, tout le monde s’embrasse.

Peu de cinéastes ont su filmer cette circulation du désir, qui passe ainsi d’un couple à tout un peuple, après avoir traversé tous les personnages du film, du bourgeois à la bonne, du soldat à la princesse.

Ce désir, dont l’accomplissement avait été empêché, retardé, promis, trouve soudain sa résolution dans un final où le bonheur est partagé. L’amour existe, surtout s’il est accompagné de musique.

 

Anne Sivan         
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# 21 avril 2024 : Des beaux disques, des beaux spectacles, une belle semaine

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Du côté de la musique :

"Génération (tome 1)" de Ambre
"Out" de Fishtalk
"Take a look at the sea" de Fontanarosa
"Venus rising" de Trio SR9 & Kyrie Kristmanson
"Perpétuel" de Vesperine
"Liminal status" de Watertank
"The great calm" de Whispering Sons
"Keep it simple" de Yann Jankielewicz , Josh Dion & Jason Lindner
Quelques nouveautés en clips avec Isolation, Resto Basket, Greyborn, Bad Juice, Last Temptation, One Rusty Band, We Hate You Please Die
nouvel épisode du Morceau Caché, consacré à Portishead
et toujours :
"Kit de survie en milieu hostile" de Betrand Betsch

"Let the monster fall" de Thomas de Pourquery
"Etat sauvage" de Chaton Laveur
"Embers of protest" de Burning Heads
"Sin miedo" de Chu Chi Cha
"Louis Beydts : Mélodies & songs" de Cyrille Dubois & Tristan Raës
"Arnold Schönberg : Pierrot lunaire" de Jessica Martin Maresco, Ensemble Op.Cit & Guillaume Bourgogne
"C'est pas Blanche-neige ni Cendrillon" de Madame Robert
"Brothers and sisters" de Michelle David & True Tones
"Prokofiev" de Nikita Mndoyants
"Alas" de Patrick Langot, Alexis Cardenas, Orchestre de Lutetia & Alejandro Sandler
"Symptom of decline" de The Black Enderkid
"Tigers blood" de Waxahatchee
"Not good enough" de Wizard

Au théâtre :

les nouveautés :

"Sonate d'automne" au Théâtre Studio Hébertot
"Frida" au Théâtre de la Manufacture des Abbesses

"Preuve d'amour" au Théâtre du Guichet Montparnasse
"Après les ruines" au théâtre La Comète de Chalons En Champagne
"Objets inanimés, avez-vous donc une âme ?" au Théâtre du Guichet Montparnasse
"Royan, la professeure de français" au Théâtre de Paris
Notes de départs" au Théâtre Poche Montparnasse
"Les chatouilles" au Théâtre de l'Atelier
"Tant que nos coeurs flamboient" au Théâtre Essaïon
et toujours :
"Come Bach" au Théâtre Le Lucernaire
"Enfance" au Théâtre Poche Montparnasse
"Lîle des esclaves" au Théâtre Le Lucernaire
"La forme des choses" au Théâtre La Flèche
"Partie" au Théâtre Silvia Monfort
"Punk.e.s" Au Théâtre La Scala
"Hedwig and the angry inch" au théâtre La Scala
"Je voudrais pas crever avant d'avoir connu" au Théâtre Essaïon
"Les crabes" au Théâtre La Scala
"Gosse de riche" au Théâtre Athénée Louis Jouvet
"L'abolition des privilèges" au Théâtre 13
"Lisbeth's" au Théâtre de la Manufacture des Abbesses
des reprises :
"Macbeth" au Théâtre Essaion
"Le chef d'oeuvre inconnu" au Théâtre Essaion
"Darius" au Théâtre Le Lucernaire
"Rimbaud cavalcades" au Théâtre Essaion
"La peur" au Théâtre La Scala

Une exposition à la Halle Saint Pierre : "L'esprit Singulier"

Du cinéma avec :

"Le déserteur" de Dani Rosenberg
"Marilu" de Sandrine Dumas
"Que notre joie demeure" de Cheyenne-Marie Carron
zt toujours :
"Amal" de Jawad Rhalib
"L'île" de Damien Manivel
"Le naméssime" de Xavier Bélony Mussel
"Yurt" de Nehir Tuna
"Le squelette de Madame Morales" de Rogelio A. Gonzalez

Lecture avec :

"Hervé le Corre, mélancolie révolutionnaire" de Yvan Robin
"Dans le battant des lames"' de Vincent Constantin
"L'heure du retour" de Christopher M. Wood
"Prendre son souffle" de Geneviève Jannelle
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"L'origine des larmes" de Jean-Paul Dubois
"Mort d'un libraire" de Alice Slater
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